3ème dimanche de l’Avent — Gaudete

Le mot de Dom Delatte

La joie n’est pas une vertu, parce qu’elle n’est pas une disposition directement opérative ; mais elle est l’atmosphère de la vertu, l’indice, le fruit, la cause, la mesure, la condition de la charité.

Commentaire de l’épître du jour (Phil 4, 4-9) par Dom Paul Delatte

D’après le Docteur Angélique la joie vient ou d’un bonheur possédé par nous, ou d’un bonheur assuré à ce que nous aimons. En effet, aimer c’est mettre son bonheur dans le bonheur d’un autre. Et Dieu étant avec nous, et Dieu étant heureux, la joie doit être au centre même de toute vie chrétienne. Elle est assurée si nous prenons notre foi au sérieux. La joie n’est pas une vertu, parce qu’elle n’est pas une disposition directement opérative ; mais elle est l’atmosphère de la vertu, l’indice, le fruit, la cause, la mesure, la condition de la charité. Elle en est aussi le rayonnement comme elle est le premier fruit de l’Esprit. Aucun précepte, plus que ce précepte de la joie qui vient de la charité, n’était de nature à effacer toutes les dissonances qui affligeaient la communauté de Philippes : mais le précepte de la joie va plus loin, et dessine une attitude de la vie chrétienne. La joie est la condition de tout bien. Nous l’avons dit déjà, nous ne sommes fidèles, nous ne sommes aimants, nous ne sommes délicats, nous ne sommes reconnaissants, nous ne sommes persévérants que dans la joie. Nous puisons la joie aux sources mêmes de la vie chrétienne. Une religion se traduit par le caractère de ses préceptes. Et en même temps qu’il révèle toute la religion, le précepte de la joie révèle Dieu, comme le précepte de l’abnégation, comme le précepte de la paix, comme le précepte de la prière, comme le précepte de la charité : en même temps qu’ils sont la norme de notre vie, tous ces éléments nous définissent la religion, et Dieu même. Dieu seul et le christianisme prescrivent la joie, parce que seuls ils la motivent.

Mais nous n’avons pas le droit de nous écarter du texte. Le Seigneur avait dit déjà : Nolite fieri sicut hypocritae, tristes. On ne sert pas Dieu avec un air maussade. L’Apôtre ajoute : Réjouissez-vous. C’est l’objet du précepte : la joie ; puis la qualité de cette joie, son motif : Réjouissez-vous dans le Seigneur. Quand faut-il se réjouir ? Toujours. Et après, que faut-il faire ? Il semble qu’après avoir prescrit la joie, il y avait place pour un autre devoir et une autre prescription; mais l’Apôtre a foi dans la suffisance de la joie seule : Je vous le dis de nouveau : réjouissez-vous. Cela suffit. Lorsque l’âme est joyeuse, elle est bienveillante aussi. La charité s’exerce spontanément et d’elle-même. Même elle est contagieuse, la joie. Ceux qui ont de la joie en donnent tout autour d’eux. Il n’y a plus alors de dissidences possibles. S’il en est autrement, le bruit des discussions s’entend à l’extérieur, et crée contre nous un préjugé ; les païens se disent alors : Ils nous ressemblent, ils ont leurs divisions et leurs rivalités, eux aussi. Qu’un sage esprit de mesure et de douceur, répandu sur toute notre vie, se laisse donc apercevoir de tous les hommes. L’effacement de l’égoïsme, la charité mutuelle sont un motif de crédibilité, les âmes vont si volontiers là où on s’aime. Mais le motif de cette douceur et de cette mesure est plus profond que l’édification elle-même : le Seigneur est proche. Il est tout près. Il est intime. Il vit en nous. Nous vivons dans un sanctuaire vivant et incréé, où les attitudes et les mouvements doivent être mesurés et définis par le respect.

N’ayez pas l’âme divisée par des soucis et des inquiétudes, par toutes les anxiétés ou préoccupations du lendemain (Mt 6, 25). En toute chose, nous dit l’Apôtre, en toute circonstance, que vos prières et vos demandes exposent à Dieu vos besoins : et que votre prière soit toujours mêlée de reconnaissance pour les bienfaits obtenus. Ainsi votre âme cessera d’être partagée et déchirée par des soucis que vous aurez confiés à Dieu. Ainsi au milieu même des épreuves et des anxiétés d’ici-bas, la paix de Dieu régnera sur toute votre vie, la paix qui surpasse tout sentiment.

Peut-être le commentaire, d’ailleurs très vrai et très aimable, habituellement donné à ce passage trahit-il quelque peu le sens littéral. La pensée de l’Apôtre nous semble celle-ci : en face des problèmes qui s’offrent à nous, notre premier mouvement, et il est très légitime, est de faire appel aux ressources de notre esprit pratique, d’étudier les voies, moyens et combinaisons qui pourront nous tirer d’affaire. Sans blâmer aucunement cette disposition naturelle, et de peur qu’elle ne devienne naturaliste, l’Apôtre nous avertit qu’il y a quelque chose qui l’emporte sur la sagesse de nos réflexions et sur nos combinaisons les plus profondes : c’est le repos en Dieu, l’attachement à Dieu, en un mot la paix de Dieu.

Ayons donc moins confiance en nous qu’en elle. C’est elle qui gardera nos cœurs et nos pensées à l’abri de l’anxiété, et formera autour de notre vie comme une sorte de clôture divine d’où nous ne sortirons jamais. Nous y sommes avec Dieu. C’est parce qu’il craint d’oublier un conseil utile à ses chers Philippiens que l’Apôtre résume rapidement (8 et 9) tout l’ensemble pratique des devoirs du christianisme toujours menacés dans les divisions, petites et grandes : Que tout ce qui est vrai et saint, tout ce qui est juste et pur, tout ce qui est aimable et digne d’éloges, tout ce qui est vertu et objet de louange, soit l’objet habituel de vos pensées. Et si ce programme abstrait vous semble trop peu précis, songez à tout ce que vous avez appris et reçu de moi, à tout ce que votre souvenir vous rappellera de mes paroles et de mes actes ; mettez-le en pratique, et le Dieu de la paix, de cette paix chrétienne un instant menacée, sera toujours avec vous.

Humilité de Saint Jean-Baptiste (Io 1, 19-28) : homélie de Saint Grégoire le Grand

Les paroles de l’évangile d’aujourd’hui nous font valoir l’humilité de Jean. Lui dont la vertu était si grande qu’on aurait pu le prendre pour le Christ, il choisit de rester sagement dans son rôle, sans se laisser follement entraîner par l’opinion humaine au-dessus de lui-même. « Il reconnut, il ne nia pas, il reconnut : « Je ne suis pas le Christ. » En déclarant : « Je ne suis pas », il a clairement nié ce qu’il n’était pas, mais il n’a pas nié ce qu’il était, afin qu’en disant la vérité, il devînt membre de celui dont il ne revendiquait pas faussement le nom. Parce qu’il ne voulut pas chercher à prendre le nom du Christ, il devint membre du Christ. En s’appliquant à reconnaître humblement sa propre faiblesse, il mérita de participer vraiment à la grandeur du Christ.
Après avoir déclaré n’être pas un prophète — car il pouvait non seulement prédire le Rédempteur, mais aussi le montrer — Jean explique aussitôt qui il est, en ajoutant : « Je suis la voix de celui qui crie dans le désert. »
Vous savez, frères très chers, que le Fils unique est appelé le Verbe du Père, comme Jean l’atteste en disant : « Au commencement était le Verbe, et le Verbe était auprès de Dieu, et le Verbe était Dieu. » (Io 1, 1) Vous savez, pour avoir vous-même parlé, que la voix doit commencer par retentir pour que le verbe puisse être entendu. Jean affirme donc être la voix, parce qu’il précède le Verbe. Devançant l’avènement du Seigneur, Jean est appelé la voix, du fait que par son ministère, le Verbe du Père est entendu des hommes. Il crie dans le désert, puisqu’il annonce à la Judée abandonnée et désertée que le Rédempteur va la consoler.
Mais que crie-t-il ? Ce qu’il ajoute nous le fait savoir : « Rendez droit le chemin du Seigneur, comme l’a dit le prophète Isaïe. » Le chemin du Seigneur vers le cœur de l’homme est rendu droit quand celui-ci écoute humblement la parole de vérité. Le chemin du Seigneur vers le cœur est rendu droit quand celui-ci dispose sa vie dans le sens des préceptes. C’est pourquoi il est écrit : « Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole, et mon Père l’aimera, et nous viendrons à lui, et nous ferons en lui notre demeure. » (Io 14, 23)
Quiconque gonfle son esprit d’orgueil, quiconque est étouffé par les ardeurs de l’avarice, quiconque se souille des avilissements de la luxure, ferme la porte de son cœur à la vérité ; il se retranche en son âme par les verrous de ses vices afin d’empêcher le Seigneur de venir à lui.
Ceux qui étaient envoyés demandèrent encore : « Pourquoi donc baptises-tu, si tu n’es ni Élie, ni le Christ, ni un prophète? » Ils ne disent pas cela par désir de connaître la vérité, mais par malice et hostilité, comme l’évangéliste le donne à entendre implicitement, en ajoutant : « Ceux qui avaient été envoyés étaient des pharisiens. » C’est comme s’il disait clairement : « Ces hommes qui interrogent Jean sur ses actes sont incapables de chercher un enseignement, ils ne savent que jalouser. »
Cependant, un saint ne se détourne pas de son ardeur au bien, même quand on l’interroge avec perversité. C’est pourquoi Jean répond encore aux paroles de jalousie par des enseignements porteurs de vie. Il ajoute en effet aussitôt : « Moi, je baptise dans l’eau ; mais au milieu de vous, se trouve quelqu’un que vous ne connaissez pas. » Ce n’est pas dans l’esprit, mais dans l’eau que Jean baptise. Impuissant à pardonner les péchés, il lave par l’eau le corps des baptisés, mais ne lave pourtant pas l’esprit par le pardon. Pourquoi donc baptise-t-il, s’il ne remet pas les péchés par son baptême ? Pourquoi, sinon pour rester dans la ligne de son rôle de précurseur ? De même qu’en naissant, il avait précédé le Seigneur qui allait naître, il précédait aussi, en baptisant, le Seigneur qui allait baptiser ; lui qui avait été le précurseur du Christ par sa prédication, il le devenait également en administrant un baptême qui était l’image du sacrement.
Jean a ici annoncé un mystère, lorsqu’il a déclaré à la fois que le Christ se tenait au milieu des hommes et qu’il n’en était pas connu, puisque le Seigneur, quand il se montra dans la chair, était à la fois visible en son corps et invisible en sa majesté. Parlant du Christ, Jean ajoute : « Celui qui vient après moi a passé devant moi. » Il dit : « Il a passé devant moi », comme s’il disait : « Il a été placé devant moi ». Il vient donc après moi, puisqu’il est né après ; mais il a passé devant moi, parce qu’il m’est supérieur. Traitant cette question un peu plus haut, il a expliqué les causes de la supériorité du Christ lorsqu’il a précisé : « Car il était avant moi » (Io 1, 16), comme pour dire clairement : « S’il l’emporte sur moi, alors qu’il est né après moi, c’est que le temps de sa naissance ne le resserre pas dans des limites : né d’une mère dans le temps, il est engendré par le Père hors du temps. »
Jean manifeste quel humble respect il lui doit, en poursuivant : « Je ne suis pas digne de dénouer la courroie de sa sandale. » Il était de coutume chez les anciens que si quelqu’un refusait d’épouser une jeune fille qui lui était promise, il dénouât la sandale de celui à qui il revenait d’être son époux par droit de parenté. Or le Christ ne s’est-il pas manifesté parmi les hommes comme l’Époux de la sainte Église? Et n’est-ce pas de lui que Jean affirme : « Celui qui a l’épouse est l’époux. » (Io 3, 29). Mais parce que les hommes ont pensé que Jean était le Christ — ce que Jean lui-même nie — il se déclare avec raison indigne de dénouer la courroie de sa chaussure. C’est comme s’il disait clairement : « Je ne peux pas mettre à nu les pieds de notre Rédempteur, puisque je ne m’arroge pas à tort le nom d’époux. »
Mais on peut aussi comprendre cela d’une autre façon. Qui ne sait, en effet, que les sandales sont faites de cuir d’animaux morts ? Or le Seigneur, venant en son Incarnation, s’est pour ainsi dire manifesté les sandales aux pieds, car il a assumé en sa divinité ce qu’il y a en nous de mortel et de corruptible. C’est pourquoi il dit, par la bouche du prophète : « J’étendrai ma sandale sur l’Idumée. » (Ps 60, 10). L’Idumée désigne les païens, et la sandale, notre condition mortelle assumée par le Seigneur. Il affirme donc qu’il étend sa sandale sur l’Idumée, parce que se faisant connaître aux païens en la chair, sa divinité est en quelque sorte venue à nous les sandales aux pieds. Mais de cette Incarnation, l’œil humain est impuissant à pénétrer le mystère. Il ne peut en effet absolument pas saisir comment le Verbe prend un corps, comment l’être spirituel le plus haut, qui est source de la vie, prend une âme dans le sein d’une mère, comment celui qui n’a pas de commencement vient à l’existence et est conçu. La courroie de la sandale, c’est le lien de ce mystère. Jean ne peut dénouer la courroie de la sandale du Seigneur, car même lui qui a connu l’Incarnation par l’esprit de prophétie, il demeure impuissant à en sonder le mystère. Et pourquoi dire : « Je ne suis pas digne de dénouer la courroie de sa sandale », sinon pour reconnaître ouvertement et humblement son ignorance ? C’est comme s’il disait clairement : « Comment s’étonner qu’il me soit supérieur, puisque même si je vois bien qu’il est né après moi, je ne peux saisir le mystère de sa naissance ? » Voilà comment Jean, tout rempli qu’il soit de l’esprit de prophétie, et admirable par l’éclat de sa science, nous fait pourtant savoir son ignorance.
À ce propos, frères très chers, nous devons considérer et méditer très attentivement la conduite des saints : même quand ils savent certaines choses d’une manière admirable, ils tâchent de se remettre devant les yeux de l’esprit ce qu’ils ne savent pas, afin de conserver en eux la vertu d’humilité. S’examinant ainsi du côté où ils sont faibles, ils empêchent leur âme de s’élever du côté où elle est parfaite. Car si la science de Dieu est une vertu, l’humilité est la gardienne de la vertu. Il ne reste donc qu’à humilier notre esprit en tout ce qu’il sait, pour lui éviter de se voir arracher par le vent de l’orgueil ce que sa vertu de science avait rassemblé.
Quand vous faites le bien, mes frères, rappelez-vous toujours ce que vous avez fait de mal : votre âme, ayant ainsi la prudence de prêter attention à ses fautes, n’aura jamais l’imprudence de se complaire dans ses bonnes actions. Estimez vos proches meilleurs que vous, surtout ceux dont vous n’avez pas la charge ; car même si vous les voyez commettre quelque mal, vous ignorez tout ce qui se cache de bien en eux.
Efforcez-vous d’être grands, mais ignorez pourtant, d’une certaine manière, que vous l’êtes, pour ne pas perdre cette grandeur par la suffisance que vous mettriez à vous l’attribuer. N’est-ce pas ce que dit le prophète : « Malheur à vous qui êtes sages à vos propres yeux et avisés selon votre propre sens. » (Is 5, 21). Et Paul déclare : « Ne vous prenez pas pour des gens avisés. » (Rm 12, 16).
Si donc les saints, même quand ils accomplissent des actions courageuses, ont d’humbles sentiments d’eux-mêmes, que diront pour leur excuse ceux qui se gonflent d’orgueil sans pratiquer la vertu ? Mais quelles que soient les bonnes œuvres qu’on réalise, elles sont sans valeur si elles ne sont assaisonnées d’humilité : une action admirable accomplie avec orgueil ne nous élève pas, mais nous appesantit davantage. Celui qui cumule les vertus sans humilité est semblable à un homme qui porte de la poussière en plein vent, et qui en est d’autant plus aveuglé qu’il paraît en porter davantage. En tout ce que vous faites, mes frères, conservez donc l’humilité, comme racine obligée de vos bonnes œuvres. Ne regardez pas ceux que vous avez déjà dépassés, mais ceux qui vous dépassent encore, pour qu’en vous proposant les meilleurs en exemple, vous puissiez monter toujours plus haut grâce à l’humilité.

Prières

Oratio

Aurem tuam, quǽsumus, Dómine, précibus nostris accómmoda : et mentis nostræ ténebras, grátia tuæ visitatiónis illústra : Qui vivis.

Oraison

Seigneur, prêtez l’oreille à nos prières : et quand vous nous ferez la grâce de venir parmi nous, apportez votre lumière dans l’obscurité de nos âmes.

Prière de Saint Anselme de Cantorbéry (1033-1109)

Mon Dieu et mon Seigneur, mon espoir et la joie de mon cœur, dites à mon âme si sa joie est celle dont vous nous dites par votre Fils : « Demandez et vous recevrez : ainsi vous serez comblés de joie ». J’ai trouvé, en effet, une joie pleine et plus que pleine, car le cœur, l’esprit, l’âme, tout mon être étant rempli de cette joie, elle abondera encore sans mesure. Ce n’est pas elle qui entrera en ceux qui se réjouissent ; ce seront plutôt eux qui entreront de tout leur être en elle. Parlez, Seigneur ! Dites à votre serviteur, au fond de son cœur, si ce que j’éprouve est bien la joie dans laquelle entreront ceux qui goûteront la joie même de leur Maître (Mt 25, 21). Mais cette joie dont jouiront vos serviteurs, « nul œil ne l’a vue, nulle oreille ne l’a entendue, le cœur de l’homme ne l’a pas sentie s’élever en lui » (1 Co 2, 9). Je vous prie donc, mon Dieu, de me donner de vous connaître, de vous aimer, pour qu’en vous je sois dans la joie. Et si je ne le peux pas pleinement en cette vie, faites-moi avancer maintenant jusqu’à ce que j’y entre pleinement un jour. Que ma connaissance de vous ici-bas grandisse, pour qu’elle puisse arriver à la plénitude où vous êtes. Que mon amour pour vous croisse ici pour être total là-haut. Que maintenant ma joie soit immense en espérance, pour être alors totale en réalité. Seigneur, vous ordonnez par votre Fils que nous demandions, et vous promettez que nous recevrons, afin que notre joie soit parfaite. Faites grandir ma faim de cette joie, afin que j’y entre ! Ainsi soit-il.

Antiennes

Ã. Iuste et pie vivamus exspectantes beatam spem et adventum Domini.
Ã. Vivons avec justice et piété, attendant la bienheureuse espérance et l’avènement du Seigneur.

Antienne grégorienne “Iuste et pie”

Antienne Iuste et pie

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