10 novembre — Saint Vanne et Saint Hydulphe

Le mot du Vénérable Dom Didier de la Cour à ses moines

Si j’avais quelque pouvoir sur vous, je vous défendrais, sous peine d’excommunication, de dire du bien de moi après ma mort ; car j’ai mené une vie fort commune aux yeux des hommes et très misérable devant Dieu. Un peu de gravité et de retenue, voilà tout ce que je puis avoir de bon.

Les Saints Vanne et Hydulphe sont réunis en une seule et même fête dans la Congrégation bénédictine de France. Celle-ci a en effet été approuvée en 1833 par le Pape Grégoire XVI en tant qu’héritière des anciennes Congrégations bénédictines présentes en France avant la Révolution, dont la Congrégation des Saints Vanne et Hydulphe.

Saints Bénédictins : Saint Vanne, évêque de Verdun

Saint Vanne (en latin : Vitonus, Videnus ou Victo) qui avait embrassé de bonne heure la vie monastique, fut élevé sur le siège épiscopal de Verdun vers l’an 498. La haute opinion qu’on avait conçue de sa sainteté fut confirmée par plusieurs miracles qu’il opéra. Il travailla vingt-six ans avec un zèle infatigable à la sanctification de son troupeau. Il mourut le 9 novembre vers l’an 525, épuisé de fatigues et d’austérités.

D’après Alban Butler, Vies des Pères, des Martyrs et des autres principaux Saints.

Saints Bénédictins : Saint Hydulphe, chorévêque de Trèves et Abbé

Saint Hydulphe, issu d’une des plus illustres familles de Bavière, naquit à Ratisbonne vers l’an 612. Il renonça dès sa jeunesse aux espérances flatteuses qu’il pouvait avoir dans le monde, et se consacra au service de Dieu en embrassant l’état ecclésiastique. Son exemple fut suivi par Erard, son frère, qui devint depuis évêque régionnaire à Ratisbonne et dans la Bavière. Ce dernier est honoré comme saint le 8 janvier. Il mourut à Ratisbonne, suivant l’ancien martyrologe de Moyenmoutier. Ce furent Hydulphe et Erard qui tinrent sur les fonts baptismaux la fille d’Adalric, duc d’Alsace, laquelle était aveugle; ils lui donnèrent le nom d’Odile, parce qu’elle avait reçu la grâce de la vue avec celle du baptême.

Saint Hydulphe ayant été fait chorévêque de Trêves (espèce de coadjuteur de l’évêque du lieu, s’occupant des zones rurales du diocèse) remplit tous les devoirs d’un pasteur zélé et vigilant. Vers l’an 665, il introduisit la règle de Saint-Benoît dans le monastère de Saint-Maximin, qui avait été fondé dans le 4ème siècle, et où sans doute on suivait les observances des moines de l’Orient. Il en augmenta considérablement les revenus, et y établit une régularité si parfaite que cette maison devint l’admiration de ce siècle. Cette abbaye était une des plus célèbres de l’Allemagne.

Après une trentaine d’années, il se démet de sa charge et arrive dans la vallée vosgienne du Rabodeau vers 670. Il bâtit sa hutte à mi-chemin d’Étival et de Senones, dans la forêt. La renommée du nouvel ermite attire bientôt une foule de disciples. Hydulphe décide alors la construction d’un monastère sur le lieu, qui devient « medianum monasterium ». Premier abbé de Moyenmoutier, il adopte la règle de saint Benoît comme mode de vie de la nouvelle communauté. Il y avait plus d’un quart de siècle que Saint Hydulphe était à Moyenmoutier aux prises avec une œuvre de cette ampleur, lorsqu’il sentit faiblir ses forces. Il se démit de sa charge, afin de retrouver au soir de sa vie ce calme auquel il avait aspiré en venant ici comme ermite. Il confia donc la dignité abbatiale à Leutbald, un de ses meilleurs disciples, et prit modestement sa place au milieu de ses frères. Mais ce dernier mourut si prématurément en 704 que les moines s’en émurent, et tout désemparés se tournèrent vers leur fondateur. Le pauvre abbé, dans son ardente foi, vit un signe de la Providence qui lui demandait à nouveau le sacrifice de sa volonté propre. Avec un tranquille courage, il reprit donc sa crosse, mais pour peu de temps, car le Seigneur le rappelait à lui le 11 juillet 707, au terme d’une courte maladie. On l’inhuma dans la chapelle Saint-Grégoire, auprès de ses trois fils de prédilection, Spinule, Jean et Bénigne, qui l’y avaient précédé de peu.

D’après Alban Butler, Vies des Pères, des Martyrs et des autres principaux Saints.

La Congrégation bénédictine de Saint Vanne (Dom Stephanus Hilpisch, Histoire du monachisme bénédictin)

Pendant les guerres de religion du 16ème siècle, les monastères français avaient souffert de nombreuses destructions et ravages. Beaucoup d’abbayes avaient été saccagées ou entièrement détruites, la plupart appauvries et sans ressources. Quand un monastère avait encore du bien, ses revenus étaient donnés en commende par le roi ; et les abbés commendataires négligeaient l’intérêt du monastère à tous points de vue. C’est au milieu de ces circonstances que le projet d’une réforme naquit dans l’âme du Cardinal Charles de Lorraine. Outre son évêché de Metz, le Cardinal possédait en commende quatre grandes abbayes, et avait la légation de Lorraine et de Barrois. Il se décida à agir dans le ressort de sa légation. À la même époque l’évêque de Verdun, Éric de Vaudemont, qui tenait en commende l’abbaye de Saint-Vanne dans sa ville épiscopale, travaillait lui aussi à une réforme. Un bref de Grégoire XV donna au Cardinal pouvoir de réunir les abbés et prieurs de sa légation, et de discuter avec eux la question d’une réforme dans l’esprit du concile de Trente. L’assemblée, comptant seulement quatre abbés et quatre prieurs, eut lieu le 5 juin 1595 à Saint-Mihiel et décida l’érection d’une Congrégation. Mais le moment de s’exécuter, le Cardinal découragé fit au Pape Clément VIII (1592-1605) la singulière proposition de supprimer les monastères bénédictins de sa légation. Le Pape Clément refusa résolument, et avisa le cardinal qu’il était envoyé pour sauver les malades, non pour les étrangler. La seule pensée de la suppression était déjà un crime.

Le Cardinal appelle alors à l’aide l’abbaye Saint-Maximin de Trèves qui jouissait d’une bonne réputation. Il en reçu deux moines pour Saint-Vanne, et la moisson leva comme d’elle-même. Le prieur était Didier de la Cour, dépendant de l’évêque Éric de Verdun, abbé commendataire. En janvier 1600, sous l’inspiration du prieur, quatre novices et un profès se résolurent à une exacte observance de la règle : humble début. Mais dès 1601 Moyenmoutier recevait de Saint-Vanne des moines réformés, et les deux abbayes décidaient de se constituer en une Congrégation qui, en 1604, fut approuvée par Clément VIII sous le nom des Saint-Vanne et Hydulphe, patrons respectifs des deux abbayes. On adopta la formule de la Congrégation cassinienne. Un bref de Paul V recommanda en 1605 à tous les monastères de Lorraine de se rallier à la nouvelle réforme, et bientôt d’autres abbayes vinrent s’unir à la Congrégation. Jusqu’en 1670 celle-ci compris quarante-cinq abbayes dans les diocèses de Metz, Toul, Verdun, Bâle, Besançon (dont l’Abbaye Notre-Dame de Faverney, réformée en 1613), Châlons, Langres, Laon, Reims, Sens et Troyes, distribués en trois provinces. À la fin du 18ème siècle, elle comptait plus de 600 membres.

Au sommet de la Congrégation se tenait un président élu par le chapitre général pour un an. Le chapitre général était la plus haute autorité et se composait des supérieur de chaque maison et d’un délégué par convent. Comme la plupart des monastères étaient en commende, les supérieurs n’y avait que le titre de prieur, les autres étaient abbés à vie et élu par le convent. La Congrégation possédait sa maison d’études philosophiques et théologiques au Prieuré de Breuil (Commercy). Les études étaient florissantes. La Congrégation compta des noms célèbres qui méritent d’être cités auprès de ceux des mauristes : principalement Dom Calmet, grand exégète et historien de la Lorraine, abbé de Senones, l’un des premiers érudits de son temps ; puis Alliot et Petit-Didier, spécialisés dans l’étude de la Bible. Il fallut la Révolution pour supprimer la Congrégation.

La Congrégation Lorraine de Saint-Vanne exerça bientôt une influence salutaire sur les monastères français et trouva en France des appuis éminents, au premier rang desquels il faut placer le prieur du collège de Cluny à Paris, Laurent Bénard, et Dom Anselme Rolle de la Congrégation des Exemps. Le premier monastère français qui appela la réforme de Saint-Vanne fut l’abbaye de Saint-Augustin de Limoges. En 1614 Saint Germain-des-Prés demanda son agrégation. Bientôt suivirent Nouaillé près de Poitiers (1615), Saint-Faron de Meaux et Jumièges (1617). Ces abbayes entraient dans la congrégation Lorraine. Mais comme le gouvernement ne voyait pas d’un bon œil que les monastères du royaume s’unissent à une congrégation étrangère, il fut décidé au chapitre général de 1618 que les monastères français de l’Union se grouperaient en une congrégation spéciale. On compta pour débuter cinq monastères : Saint Augustin de Limoges, Saint-Julien de Nouaillé, Saint-Faron de Meaux, Jumièges, et les Blancs-Manteaux de Paris. Ce fut, à partir de 1618, la Congrégation « gallicana Parisiensis ». Dès 1621 la nouvelle fondation fut approuvée par Grégoire XV sous le nom de Congrégation de Saint-Maur.

Prières

Oratio

Omnípotens sempitérne Deus, qui per beátos pontífices Vitónum et Hydúlphum Ecclésiam tuam lætificásti, et órdinis monástici splendórem restituére dignátus es : fac nos opem eórum iúgiter experíri, et præmia cónsequi sempitérna. Per Dóminum.

Oraison

Dieu, tout-puissant et éternel qui par les bienheureux Pontifes Vanne et Hydulphe avez réjoui votre Église, et qui avez daigné restituer la splendeur de l’Ordre monastique : faites-nous ressentir continuellement les effets de leur aide et obtenir la récompense éternelle. Par Jésus-Christ, notre Seigneur.

Prière de Dom Claude Martin (1619-1696)

Ô Bonté infinie ! Que votre patience m’étonne et me confond ! Ô mon Dieu ! Elle m’étonne, parce que je vois que tous les hommes la fatiguent et que personne ne la soulage ; et elle me confond, parce que je lui suis à charge moi-même, par mes dérèglements, par mes infidélités, par mes péchés. Cet excès de bonté, ô mon Dieu, me porte à faire trois résolutions. La première, puisque tous les hommes exercent votre patience, de la soulager de tout mon possible, en menant avec le secours de votre grâce une vie toute pure, et – s’il est possible – toute angélique et toute céleste. La seconde, de me mettre entre Vous et les pécheurs, comme Abraham se mit entre vous et les villes impures de Sodome et de Gomorrhe, afin d’empêcher, par la prière et par le sacrifice, que leurs fautes ne montent jusqu’à vous et que votre colère ne descende jusqu’à eux. Et la troisième, de prendre votre patience pour la règle de la mienne, afin que, comme vous supportez mes fautes avec une douceur digne de votre infinie Bonté, je supporte aussi avec une parfaite soumission les peines et les privations que votre Providence m’envoie, et me fait ressentir dans le service que vous demandez de moi. Ainsi soit-il.

Antienne

Ã. Isti sunt duæ olívæ, et duo candelábra lucéntia ante Dóminum : habent potestátem cláudere cælum núbibus et aperíre portas eius, quia linguæ eórum claves cæli factæ sunt.

Ã. Ceux-ci sont deux oliviers et deux flambeaux qui brillent devant le Seigneur ; ils ont le pouvoir de fermer le ciel aux nuées, et d’ouvrir ses portes, parce que leurs langues sont devenues les clefs du ciel.

Antienne grégorienne “Isti sunt duae olivae”

Antienne Isti sunt duae olivae

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