Jeudi 12 novembre (ReConfinement J14)
La Punchline des Pères du Désert
La racine de toute bonne œuvre c’est la vérité.
Un Saint local : Saint Imier (ou Himier), ermite (7ème siècle)
Saint Imier naquit dans la partie du comté de Bourgogne (la Franche-Comté) qui portait autrefois le nom d’Elsgau ou d’Ajoie, et qui était comprise dans le diocèse de Besançon. Ses parents, qui étaient distingués dans le pays, possédaient un château à Lugnez, près de Porrentruy, et c’est là, selon une ancienne légende, que saint Imier reçut le jour, vers le milieu du sixième siècle. Il fut formé de bonne heure à la piété et à l’étude des lettres, et montra, dès sa jeunesse, une grande aversion pour tout ce qui avait l’apparence du vice. Quand il voyait les autres commettre le mal, il gémissait dans son cœur, et invoquait le secours du Ciel contre l’influence des mauvais exemples, en s’écriant : « Que ferai-je, Seigneur, moi qui suis chaque jour exposé à la tentation, et qui ne sais où trouver un abri contre les attaques du péché ? » Effrayé des périls que la vertu court au milieu du monde, il redoubla de ferveur pour connaître les desseins que Dieu avait sur lui, et crut enfin entendre au fond du cœur une voix secrète qui l’appelait dans la solitude. La grâce d’en-haut faisait retentir à ses oreilles ces paroles divines, qui avaient converti autrefois le grand saint Antoine : Celui qui aura quitté pour moi sa maison, ou ses frères, ou ses sœurs, père, ou sa mère, ou sa femme, ou ses enfants, ou ses terres, en recevra le centuple, et aura pour héritage la vie éternelle (Mt 19, 29).
Docile à la voix du Ciel, Imier, accompagné d’un serviteur fidèle, nommé Albert ou Elbert, se retira dans la vallée de Susingau, à quelque distance de Porrentruy, pour y vivre dans la solitude. Cette contrée sévère, où la Suze promène ses eaux vagabondes, n’était alors qu’un désert couvert de ronces et d’épines. Imier et son compagnon se mirent à défricher cette région sauvage, et à y préparer quelques portions de terrain pour la culture, afin d’en tirer les aliments nécessaires à leur subsistance. Mais la récolte ne répondit pas à leurs espérances, et le saint comprit que Dieu voulait l’éprouver, afin de rendre son sacrifice plus parfait. Il abandonna donc son désert, pour aller dresser sa tente dans quelque autre région. Il arriva bientôt à Lausanne, et pria l’évêque de cette ville de lui indiquer, dans le voisinage, quelque lieu où il pût habiter et s’exercer à la perfection chrétienne. Il ne séjourna que peu de temps dans cette contrée, qu’il ne trouva point conforme à ses desseins, et dès lors, tournant ses regards vers les régions lointaines qui avaient été sanctifiées par la présence du Sauveur, il résolut d’entreprendre le voyage de Jérusalem.
Toutes les légendes du saint nous parlent de ce voyage, et en racontent les détails. Imier espérait y trouver le martyre, en donnant sa vie pour Jésus-Christ aux lieux mêmes où il a sacrifié la sienne pour tous les hommes. Ayant donc traversé les mers, il arriva dans la ville sainte, avec son fidèle compagnon Elbert, et y resta trois ans, visitant les saints Lieux, et se livrant à la pratique assidue des veilles et des prières. La vie de saint Imier à Jérusalem ne fut pas seulement consacrée à la contemplation. Il s’appliqua aussi avec ardeur à la conversion des peuples. Isaac, patriarche de Jérusalem, l’entoura de vénération et d’estime, et l’envoya prêcher dans une île voisine, dont Imier convertit les habitants, qui étaient encore sous la domination de l’esprit de ténèbres.
Après trois ans de séjour en Palestine, saint Imier revint en Europe, rapportant de saintes reliques, et en particulier un bras du juste Siméon, qui avait eu le bonheur de porter Jésus enfant, lorsque sa Mère le présentait au temple. Imier s’arrêta d’abord dans un lieu nommé Cyriliacum. Mais, n’ayant pu obtenir la permission de s’y fixer, il revint dans la vallée de Susingau. Comme la nuit arrivait, dit la légende, le bienbeureux Imier, après avoir franchi la montagne, s’arrêta auprès d’une source limpide. Il passa la nuit sans dormir, chantant les louanges du Seigneur. À l’approche du jour, il entendit le son d’une clochette, et en avertit son compagnon Elbert. Quelques instants après, le même son se fit encore entendre plusieurs fois d’une façon plus distincte, et le saint homme, rendant grâces à Dieu, se dirigea vers le lieu d’où partait ce bruit. C’était là, pensait-il, que le Ciel voulait qu’il fixât sa demeure. Il y trouva une source abondante, et ayant coupé une branche d’arbre, il la planta sur le sol, comme pour en prendre possession.
C’est là qu’il érigea, en l’honneur de saint Martin, une chapelle qu’il enrichit des reliques apportées d’Orient, et où il venait, jour et nuit, offrir à Dieu le sacrifice de sa vie et de ses prières (vers l’an 606).
Peu à peu le nom du pieux solitaire fut connu dans le voisinage, et un grand nombre de disciples vinrent se réunir autour de lui. Imier n’avait à leur offrir en partage que les œuvres de la mortification et de la pénitence; car il jeûnait complétement trois fois par semaine, et les autres jours, il n’avait pour nourriture qu’un grossier pain d’orge, pour boisson que l’eau de la source voisine, et pour lit que le rocher ou la terre nue. Mais la pénitence même a des charmes pour les âmes que Dieu attire à lui, et ses disciples se montrèrent les dignes imitateurs de ses vertus. Ils s’appliquèrent, sous sa conduite, à féconder de leurs sueurs cette vallée déserte, à défricher et à cultiver les terres, unissant le travail des mains à la prière et aux devoirs de l’hospitalité.
Il y avait neuf ans que saint Imier vivait, avec ses compagnons, au milieu de ces austérités, lorsque, sentant sa dernière heure approcher, il se fit porter dans la chapelle qu’il avait élevée à la gloire de saint Martin. Ses disciples, réunis autour de lui, récitaient des hymnes et des psaumes auxquels le saint prenait part, et c’est au milieu de ces pieux exercices qu’il rendit son âme à Dieu, le 12 novembre de l’an 615, selon l’opinion commune.
Ses disciples déposèrent son corps dans un tombeau auprès duquel Dieu fit, dans la suite, éclater la gloire de son serviteur par de nombreux miracles. La vallée qu’il avait défrichée prit son nom et s’appelle encore aujourd’hui le Val-Saint-Imier. La communauté qu’il avait formée en ces lieux se soutint dans la suite, et fut le commencement d’un monastère dont il est fait mention dans les monuments des siècles suivants. Nous voyons, en effet, cet établissement désigné sous le nom de Celle de Saint-Imier, dans un diplôme de Charles le Gros, de l’an 884, qui en fait don à l’abbaye de Moutier-Grandval (fondée au 7ème siècle par l’abbaye de Luxeuil).
En 933, la pieuse Berthe, reine de Bourgogne, qui établit une collégiale à Soleure, en l’honneur des saints Ours, Victor et leurs compagnons, martyrs, en fonda aussi une à Saint-Imier, en l’honneur de notre saint. Ce chapitre collégial se composait de douze chanoines, ayant un prévôt à leur tête. Il subsista jusqu’à la réforme, en 1550. C’est alors que les Biennois, fanatisés par les nouvelles doctrines, introduisirent le protestantisme à main armée dans le Val-Saint-Imier. Ils signalèrent surtout leur fureur en livrant aux flammes les images des saints, et le corps même de saint Imier, qui avait été le premier habitant et le bienfaiteur de cette contrée, et qui, depuis plus de neuf cents ans, était l’objet de la vénération des fidèles.
Le culte rendu à saint Imier semble remonter jusqu’aux temps qui suivirent immédiatement sa mort. Sa fête est marquée au 12 novembre dans quelques Martyrologes, et en particulier dans celui de Besançon. Il était invoqué dans les anciennes litanies de ce diocèse, et son office se trouvait dans l’ancien Bréviaire bisontin. Les diocèses de Bâle et de Lausanne l’honoraient aussi bien que celui de Besançon, et, dans le Jura catholique, les paroisses de Damphreux, de Develier, de Courchapoix, l’invoquent encore aujourd’hui comme patron. La chapelle de Lugnez et celle du Forbourg, dans la petite ville de Delémont, sont placées sous son invocation, ainsi qu’une église paroissiale de Normandie, qui porte le nom de Saint-Imier. Le diocèse de Besançon honorait autrefois saint Imier, et on en faisait commémoraison le 12 novembre, sous le titre de confesseur.
Vie des Saints de Franche-Comté, tome 4.
Prières
Oratio
Sancti Himerii confessoris tui, Domine, quæsumus, veneranda festivitas, salutaris auxilii nobis præstet effectum. Per Dóminum nostrum.
Oraison
Nous vous en prions, Seigneur : que la fête solennelle de Saint Imier votre confesseur, nous procure des grâces efficaces de salut. Par Jésus-Christ, notre Seigneur.
Prière de Saint Albert le Grand (1200-1280)
Seigneur Jésus-Christ, je crains de pécher contre vous ou contre le prochain en simulant faussement une vie parfaite, ou en m’élevant au-dessus des autres avec singularité, en jugeant témérairement ou encore par jactance ou par mensonge. Apprenez-moi donc le mépris de moi-même, la révérence que je dois à Dieu, la peine qui est réservée au péché et la parfaite expression de la pénitence ; apprenez-moi à pleurer et à m’accuser. Dieu, soyez-moi propice, moi qui suis un pécheur : qu’une sincère humilité, tant de cœur qu’en paroles et en actes, m’obtienne de redescendre justifié dans la demeure de ma conscience, en attendant d’être exalté dans la demeure de gloire. Ainsi soit-il.
Antienne
Ã. In sanctitate serviamus Domino et liberabit nos ab inimicis nostris.
Ã. Dans la sainteté servons le Seigneur, et il nous libérera de nos ennemis.