3ème Dimanche après Pâques

Le mot du Père Garrigou-Lagrange, O. P.

Tandis que nous ne concevons guère l’éternité que par rapport au temps dans lequel nous vivons, Dieu voit toute la suite des temps dans la lumière de l’immobile éternité.

Sermon

Comme des étrangers et des pèlerins (1 Pt 2, 11)

Du chapitre 2 de la 1ère épître de Saint Pierre (épître de la Messe du jour)

Bien-aimés, je vous exhorte, comme des étrangers et des voyageurs, à vous garder des convoitises de la chair qui font la guerre à l’âme. Ayez une conduite honnête au milieu des Gentils, afin que, sur le point même où ils vous calomnient comme si vous étiez des malfaiteurs, ils arrivent, en y regardant bien, à glorifier Dieu pour vos bonnes œuvres au jour de sa visite.
Soyez donc soumis à toute institution humaine à cause du Seigneur, soit au roi, comme souverain, soit aux gouverneurs, comme délégués par lui pour faire justice des malfaiteurs et approuver les gens de bien. Car c’est la volonté de Dieu que, par votre bonne conduite, vous fermiez la bouche aux insensés qui vous méconnaissent.
Comportez-vous comme des hommes libres, non pas comme des hommes qui se font de la liberté un manteau pour couvrir leur malice, mais comme des serviteurs de Dieu.
Rendez honneur à tous; aimez tous les frères; craignez Dieu; honorez le roi. Vous, serviteurs, soyez soumis à vas maîtres avec toutes sortes de respects, non seulement à ceux qui sont bons et doux, mais encore à ceux qui sont difficiles. Car c’est une chose agréable à Dieu que ce soit en vue de lui que l’on endure des peines infligées injustement.
En effet, quel mérite y a-t-il si, après avoir fait une faute, vous supportez patiemment les coups? Mais si, après voir fait le bien, vous avez à souffrir et que vous le supportiez avec patience, voilà ce qui est agréable à Dieu.
C’est à quoi, en effet, vous avez été appelés, puisque le Christ aussi a souffert pour vous, vous laissant un modèle, afin que vous suiviez ses traces : lui qui “n’a point commis de péché, et dans la bouche duquel il ne s’est point trouvé de fausseté” ; lui qui, outragé, ne rendait point l’outrage ; qui, maltraité, ne faisait point de menaces, mais s’en remettait à celui qui juge avec justice ; qui a lui-même porté nos péchés en son corps sur le bois, afin que, morts au péché, nous vivions pour la justice; c’est “par ses meurtrissures que vous avez été guéris.” Car “vous étiez comme des brebis errantes”, mais maintenant vous êtes revenus à celui qui est le pasteur et l’évêque de vos âmes.

“Un peu de temps et vous ne me verrez plus” (Io 16, 16-22) : commentaire de Dom Delatte

Que le Seigneur dût s’éloigner, c’était une vérité bien connue des apôtres (Io 16, 5 et 6); mais voici qu’il ajoute à sa prophétie des précisions qui ne sont pas aussitôt comprises : « Un peu de temps, et vous ne me verrez plus ; et, de nouveau, un peu de temps, et vous me verrez… Car je m’en vais vers le Père. » Cette réflexion du Seigneur parut obscure aux apôtres ; elle leur sembla renfermer une contradiction. Que signifiait en effet ce peu de temps, cet intervalle, passé lequel reparaîtrait le Seigneur ? Comment serait- il tout à la fois avec son Père et avec eux ? La pensée des apôtres flottait indécise. Ils n’osaient interrompre leur Maître : la solennité de l’heure imposait le silence. Mais ils répétaient la phrase mystérieuse et s’interrogeaient les uns les autres, comme à la dérobée : Que veut-il dire par ce peu de temps ? Nous ne parvenons pas à nous l’expliquer.
Le Seigneur, qui lisait dans les âmes de ses disciples et pouvait apercevoir leurs questions secrètes, comprit qu’ils auraient désiré l’interroger. « Vous vous demandez, dit-il, quel est le sens de mes paroles : “Un peu de temps, et vous ne me verrez plus ; et, de nouveau, un peu de temps, et vous me verrez ?”… » Sans doute, en parlant ainsi, il songeait à l’éloignement momentané de la Passion et à la joie de la Résurrection. Mais cette disparition et ce retour étaient, à ses yeux, le symbole d’un autre départ et d’un autre retour : le départ vers son Père, à l’Ascension, et la réunion avec ses disciples, dans l’éternité. Jusque-là, les apôtres auront à travailler et à semer dans les larmes, en l’absence de leur Maître. En vérité, en vérité, vous pleurerez et vous gémirez, vous autres, tandis que le monde se divertira. Peut-être même ses joies se composeront-elles de vos douleurs ; vous aurez l’air d’être les dupes d’une chimère, pendant qu’il triomphera dans ses joies épaisses. Mais le deuil où vous serez plongés ne durera qu’un instant, et votre tristesse se changera en joie, en la joie éternelle.
« La femme gémit quand elle enfante, parce que son heure est venue. Mais lorsqu’elle a donné le jour à son enfant, elle ne se souvient plus de ses souffrances ; elle n’a que de la joie, car un homme est venu au monde. Et vous aussi, maintenant, vous êtes dans l’affliction, mais je vous verrai de nouveau, et votre cœur se réjouira, et votre joie, personne ne vous la ravira. » Au lieu de l’égoïsme naturel que produit en nous la souffrance, le Seigneur, à deux pas de la Passion et de la mort, semble n’être occupé et soucieux que de la peine de ses apôtres. La liberté de son âme est entière ; il ne songe qu’à les consoler. Il fait mieux. Bientôt, il va donner naissance à une humanité nouvelle, par un enfantement douloureux ; et au lieu de s’attribuer à lui-même cette divine fécondité, il en fait remonter l’honneur à la souffrance des siens. Qu’importe la tribulation du temps ? Nous n’y penserons plus lorsque l’homme nouveau aura été donné à Dieu, lorsque l’Église louera Dieu, lorsque le nouvel Adam paraîtra devant le Père avec la postérité qui aura germé dans son sang. Il n’est besoin, pour se donner du cœur, que de s’établir dans les perspectives qui nous sont ouvertes par le Sauveur. Un instant d’angoisse, puis la joie sans fin, dont la plénitude ne nous laissera rien à désirer, rien à apprendre. Nulle puissance créée n’est capable de nous la ravir. Alors tous les désirs seront comblés. Au grand jour de l’éternité et de la vision, lorsque les voiles seront déchirés, tous les secrets de Dieu révélés, les disciples n’auront plus à solliciter la lumière, ils n’auront plus rien à demander à leur Maître.
Dès maintenant, et au cours du temps, aujourd’hui que le prix de la Rédemption a été versé, que le chrétien appartient à la vie de Notre-Seigneur Jésus-Christ, qu’une région d’entente a été ménagée entre l’homme et Dieu, l’homme peut s’adresser au Père directement et en toute confiance. En vérité, en vérité, déclare le Seigneur, si vous demandez quelque chose au Père en mon nom, il vous le donnera. Jusqu’aujourd’hui, les conditions étaient autres : vous n’avez rien demandé en mon nom ; vous ne le pouviez pas. Il n’y avait pas entre nous cette unité de vie qui vous permet maintenant de parler au Père avec le même accent que moi, avec la même assurance. Mais, dorénavant, une ère nouvelle est ouverte. Demandez donc, et vous recevrez. Vous n’avez qu’à tendre la main, vous avez droit à Dieu, et votre joie sera entière.

Prières

Oratio

Deus, qui errántibus, ut in viam possint redíre iustítiæ, veritátis tuæ lumen osténdis : da cunctis, qui christiána professióne censéntur, et illa respúere, quæ huic inimíca sunt nómini ; et ea, quæ sunt apta, sectári. Per Dóminum nostrum.

Oraison

Ô Dieu, qui montrez à ceux qui errent la lumière de votre vérité, afin qu’ils puissent rentrer dans la voie de la justice : donnez à tous ceux qui sont placés dans les rangs de la profession chrétienne, la grâce de rejeter tout ce qui est contraire à ce nom, et d’embrasser tout ce qui lui convient.

Prière de Saint Jean Eudes (1601-1680) à la Très Sainte Vierge

Ô très beau et très bénin soleil ! Quel est ce soleil ? C’est notre glorieuse Marie, Electa ut sol, chante la Sainte Église, choisie comme le soleil. Que ferions-nous, misérables que nous sommes ! dit Saint Bonaventure, au milieu de la nuit et des ténèbres de ce siècle, si nous n’étions éclairés de ce divin flambeau ? Que serait-ce du monde s’il n’avait point de soleil, sinon une horrible et éternelle nuit ? Que serait-ce de cette vie si nous n’avions point la divine Marie, cette belle étoile de la mer, qui nous a enfanté le Soleil éternel, sinon un chaos de ténèbres et d’horreur ? Pauvres aveugles ! Vous ne prenez pas garde que le soleil est toujours soleil, mais qu’il n’éclaire que ceux qui ont des yeux, et non pas les aveugles. Si vous ne voyez pas les célestes clartés, les ravissantes beautés, les excellences ineffables et les merveilles inconcevables que tous les bons yeux de l’Église, qui sont les saints docteurs, ont toujours vues dans cet admirable soleil ne vous en prenez pas à lui, mais à votre aveuglement. Ô très beau et très bénin soleil ! donnez des yeux à ces aveugles, afin qu’ ils cessent de vous persécuter, et faites aussi qu’à votre imitation nous mettions tout notre contentement, notre joie et nos délices à glorifier et aimer Dieu de tout notre cœur, de toute notre âme et de toutes nos forces ; à vous servir et honorer autant que nous le devons ; à aimer notre prochain comme nous-mêmes, et spécialement à aimer ceux qui nous haïssent ; à bénir ceux qui nous maudissent ; à faire du bien à ceux qui nous font du mal, et à prier Dieu pour ceux qui nous persécutent. Ainsi soit-il.

Antiennes

Ã. Módicum, et non vidébitis me, dicit Dóminus : íterum módicum, et vidébitis me, quia vado ad Patrem, allelúia, allelúia.

Ã. Encore un peu de temps et vous ne me verrez plus, dit le Seigneur, et encore un peu de temps et vous me verrez, parce que je vais à mon Père, alleluia, alleluia.

Antienne grégorienne “Modicum”

Antienne Modicum

Ã. Tristítia vestra vertétur in gáudium, et gáudium vestrum nemo tollet a vobis, allelúia, allelúia.​

Ã. Votre tristesse se changera en joie, et votre joie, personne ne vous l’enlèvera, alleluia, alleluia.

Antienne grégorienne “Tristitia vestra vertetur”

Antienne Tristitia vestra vertetur

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