Jeudi de la 1ère semaine de Carême

Note sur le jeûne et l’abstinence

La loi ecclésiastique du jeûne oblige tous les fidèles, non excusés ou dispensés, qui ont entre 21 et 60 ans. La loi de l’abstinence de viande oblige dès l’âge de 7 ans.
Le jeûne consiste à faire un seul repas par jour, mais deux petites collations, que les théologiens limitent à 60 grammes le matin et 250 grammes le soir, sont tolérées. Pendant le Carême, on doit jeûner tous les jours sauf les dimanches, et on doit s’abstenir de viande le mercredi des Cendres, le mercredi des Quatre-Temps, et tous les vendredis et samedis.

Le mot de Dom Delatte
Les lenteurs de Dieu peuvent être des tendresses et ses refus des encouragements.
Jésus et la chananéenne (Mt 15, 21-28) : commentaire de Dom Delatte

Le Seigneur s’éloigne de la Galilée, et remonte vers le nord-ouest, vers le territoire de Tyr et de Sidon, dans une région païenne où il aura le loisir de poursuivre l’éducation de ses apôtres à l’abri des indiscrètes curiosités de la hiérarchie juive. Son dessein n’est pas de prêcher lui-même l’évangile aux gentils : il cherche simplement le silence et la solitude. Il s’efforce de dissimuler sa présence ; mais la renommée de ses miracles l’avait précédé, il ne tarde pas à être reconnu. Dès qu’elle eut appris sa venue, une femme originaire du pays, Syrophénicienne par conséquent, — Chananéenne, dit saint Matthieu, — une païenne, dont la fille était possédée d’un esprit impur, accourut vers lui : « Ayez pitié de moi, criait-elle. Seigneur, fils de David ! Ma fille est durement tourmentée par le démon. » La prière est vraiment très complète ; sa foi et sa confiance sont achevées et confondent, comme celles du centurion de Capharnaüm (Mt 8, 5-13), l’incrédulité juive. Cette païenne connaît le cœur de Dieu ; elle connaît la puissance de Dieu. Elle donne à Jésus son nom messianique : le Seigneur, le Fils de David. Sans doute, elle avait entendu parler de lui ; on a cru quelquefois qu’elle était prosélyte, et, à ce titre, initiée aux croyances des Juifs. La seconde homélie Clémentine lui attribue le nom de Justa, et à sa fille celui de Bérénice.

Saint Matthieu a conservé avec soin tout le détail de ce petit drame. Le Seigneur ne répond rien à la prière de la Chananéenne et semble y être inattentif. Cette attitude pouvait paraître inspirée par le mépris des Israélites envers les Phéniciens. D’autres eussent été rebutés par un tel procédé et se seraient retirés, en maudissant le Juif. Mais Jésus, qui veut ici encore fournir un enseignement, soutient intérieurement la foi de la pauvre mère. Sa prière gémissante se poursuit : « Fils de David, ayez pitié de moi ! » Cependant, les disciples, fatigués de ses cris, s’impatientent ; ils s’approchent du Maître, et lui demandent avec instance d’accorder enfin la grâce sollicitée : « Renvoyez-la, qu’elle cesse enfin de nous poursuivre de ses cris. » On voit bien, à la réponse du Seigneur, qu’il s’agit de la congédier exaucée ; mais l’intercession des apôtres ne semble point provoquée par la seule pitié : « Accordez-lui ce qu’elle demande ; elle s’en ira, et cessera de nous importuner. » Le Seigneur répond enfin, mais à ses disciples, comme si eux seuls eussent été dignes d’une réponse ; il s’exprime cependant de manière à être entendu de la mère : « Je n’ai été envoyé que pour les seules brebis perdues de la maison d’Israël. » C’était exact : la prédication universelle ne devait venir que plus tard, occasionnée en quelque sorte par l’endurcissement des Juifs (Act 13, 46-47). La Chananéenne ne se laisse pas déconcerter. Elle vient tout près du Seigneur qui, sur ces entrefaites, est entré dans une maison ; elle tombe à ses pieds, disant : « Seigneur, secourez-moi ! »

En face d’une telle douleur, en face d’une telle confiance, le Seigneur répond à la Chananéenne, mais en des termes dont l’apparente dureté nous étonne, venant de ces lèvres qui ne s’ouvraient que pour la miséricorde et la consolation. Ce qui nous fait attribuer de prime abord un caractère mortifiant à la parole du Seigneur, c’est qu’elle évoque en notre mémoire la formule méprisante usitée chez les Orientaux pour désigner les tenants d’une autre religion. Mais la pensée du Sauveur est tout autre. Elle est adoucie par un diminutif : canuli. De plus, saint Marc contient une formule explicative : « Laissez d’abord les enfants se rassasier ; car il n’est pas bien de prendre le pain des enfants et de le jeter aux petits chiens. » C’est une allusion à ce qui se passe dans une famille : les enfants d’abord, les serviteurs après. Il y a, pour Dieu aussi, un ordre et une hiérarchie dans la distribution de ses bienfaits à la grande famille humaine : les Juifs ont titre à être servis les premiers. On a dit aux apôtres : In viam gentium ne abieritis. La Chananéenne l’entend bien de la sorte, et, avec un à-propos admirable et une foi que rien ne décourage, elle fait observer humblement au Seigneur que sa prière est autorisée par la réponse même qui vient de lui être faite. Jésus a dit : « Laissez d’abord… » ; elle reprend : « En effet, Seigneur, vous dites bien. Mais les petits chiens, eux aussi, trouvent à manger ; ils ont les miettes qui tombent de la table des enfants, de la table de leurs maîtres ! » Après que les enfants sont rassasiés, les membres plus humbles de la famille n’ont-ils pas le droit de recueillir un superflu dont nul n’a souci ?

La prière triomphe de tout et semble désarmer Dieu lui-même : « Ô femme ! dit le Seigneur avec admiration, votre foi est grande. À cause de la parole que vous venez de dire, qu’il soit fait comme vous voulez. Allez ! le démon est sorti de votre fille. » Elle retourne dans sa maison, et trouve l’enfant étendue sur son lit, délivrée du démon. Reconnaissons, nous autres, que les lenteurs de Dieu peuvent être des tendresses et ses refus des encouragements. Souvent, et pour les meilleurs, pour ceux dont il veut élargir l’âme, il feint de se dérober à leurs supplications : il a confiance et sait qu’ils persévéreront quand même, fallût-il attendre des siècles.

Prières

Oratio

Devotiónem pópuli tui, quǽsumus, Dómine, benígnus inténde : ut, qui per abstinéntiam macerántur in córpore, per fructum boni óperis reficiántur in mente. Per Dóminum.

Oraison

Regardez, dans votre bienveillance, nous vous en supplions, Seigneur, la dévotion de votre peuple, afin que le fruit des bonnes œuvres fortifie et renouvelle selon l’esprit ceux qui mortifient leur corps par l’abstinence.

Oratio

Da, quæsumus, Dómine, pópulis christiánis : et, quæ profiténtur, agnóscere, et cæléste munus dilígere, quod frequéntant. Per Dóminum nostrum.

Oraison

Donnez, s’il vous plaît, Seigneur, aux peuples chrétiens de bien connaître les vérités qu’ils font profession de croire, et d’aimer le céleste don auquel ils participent fréquemment.

Prière pour demander la Foi (10ème siècle)

Dieu très-haut, Dieu éternel, Dieu qui êtes la plénitude de tous biens, Dieu qui êtes le souverain bien, vrai Dieu et vrai homme, infini et tout-puissant : « Tout ce que vous demanderez avec foi dans la prière, vous l’obtiendrez de moi » : voilà ce que vous avez dit de votre propre bouche. Eh bien ! je viens vous supplier, en toute diligence, de remplir votre promesse à mon égard. Donnez-moi, Seigneur, la perfection de cette foi par laquelle et dans laquelle ont été justifiés tous les saints ; par laquelle a été justifié Abraham ; par laquelle les fils des Hébreux ont été arrachés aux mains de la tyrannie égyptienne ; par laquelle la mer Rouge a été mise à sec ; par laquelle sont tombés les murs de Jéricho ; par laquelle les trois enfants ont été délivrés de la fournaise ardente ; par laquelle tous les Saints ont vaincu les royautés terrestres, fermé la gueule des lions et éteint la flamme des bûchers ; par laquelle ils ont miraculeusement recouvré la santé de l’âme et sont devenus des vaillants en toutes les guerres spirituelles. Je vous demande cette foi par l’intercession de vos saints ; je les prie ardemment de s’unir à moi pour vous louer, pour vous bénir, pour vous rendre grâces de tous vos bienfaits ; et je leur demande en même temps d’intercéder pour ma fragilité, auprès de vous, mon Seigneur, mon Dieu, mon Jésus. Ainsi soit-il.

Antienne
Ã. O múlier, magna est fides tua : fiat tibi sicut petísti.
Ã. Ô femme, grande est ta foi, qu’il te soit fait comme tu l’as demandé.

Antienne grégorienne “O mulier"

Antienne O mulier

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