4ème dimanche de l’Avent

4ème dimanche de l’Avent

4ème dimanche de l’Avent

Le mot de Saint Grégoire le Grand

Tous ceux qui prêchent la foi droite et les bonnes œuvres, que font-ils d’autre que préparer le chemin au Seigneur qui vient dans les cœurs de ceux qui les écoutent ?

Sermon

Invoquer le Seigneur dans la vérité

La Prédication de Saint Jean-Baptiste : Com. de l’Évangile (Lc 3, 1-6) par Saint Grégoire le Grand

Le temps où le précurseur de notre Rédempteur reçut la parole de sa prédication est désigné par la mention du chef de l’État romain et des rois de Judée : « La quinzième année du règne de Tibère César, Ponce Pilate étant procurateur de la Judée, Hérode, tétrarque de Galilée, Philippe, son frère, tétrarque d’Iturée et de Trachonitide, Lysanias, tétrarque d’Abilène, sous les grands-prêtres Anne et Caïphe, la parole du Seigneur fut adressée à Jean, fils de Zacharie, dans le désert. »
Puisque Jean-Baptiste venait annoncer celui qui devait racheter quelques Juifs et beaucoup de païens, le temps de sa prédication est désigné par la mention de l’empereur des païens et des princes des Juifs. Mais parce que les païens devaient être réunis, et les Juifs dispersés à cause de leur incroyance, cette description du gouvernement du monde indique qu’un chef unique était à la tête de l’État romain, alors que le royaume de Judée, partagé en quatre, était gouverné par plusieurs princes. Notre Rédempteur n’a-t-il pas dit : « Tout royaume divisé contre lui-même court à sa ruine. » (Lc 11, 17). Il est donc clair que celui de Judée était arrivé au terme de son existence comme royaume, puisqu’il était divisé entre tant de rois.
C’est encore bien à propos que cet évangile ne nous dit pas seulement sous quels rois, mais aussi sous quels prêtres ces faits se produisirent. Jean-Baptiste annonçait celui qui devait être à la fois Roi et Prêtre ; c’est pourquoi l’évangéliste Luc situe le temps de la prédication de Jean en référence aux autorités royales et sacerdotales.
« Et il vint dans toute la région du Jourdain, prêchant un baptême de pénitence pour la rémission des péchés. » Il est évident pour tous les lecteurs que Jean n’a pas seulement prêché le baptême de pénitence, mais qu’il l’a aussi administré à certains, sans pouvoir toutefois conférer par ce baptême la rémission des péchés. En effet, la rémission des péchés nous est accordée par le seul baptême du Christ. Aussi faut-il remarquer qu’il est dit : « Prêchant un baptême de pénitence pour la rémission des péchés », car ne pouvant administrer le baptême qui remet les péchés, il l’annonçait. De même que la parole de sa prédication était l’avant-coureur de la Parole du Père faite chair, ainsi son baptême, par lequel les péchés ne pouvaient être remis, devait être l’avant-coureur du baptême de pénitence, par lequel les péchés sont remis ; et de même que sa parole était l’avant-coureur de la personne du Rédempteur, ainsi son baptême, précédant celui du Seigneur, devait être l’ombre de la vérité.
Le texte poursuit : « Comme il est écrit dans le livre des oracles du prophète Isaïe : “Voix de celui qui crie dans le désert : Préparez le chemin du Seigneur, rendez droits ses sentiers” (Is 40, 3). » Interrogé sur ce qu’il était, Jean-Baptiste répondit : « Je suis la voix de celui qui crie dans le désert. » (Io 1, 23). Comme nous venons de le dire, s’il fut appelé « la voix » par le prophète, c’est qu’il précédait la Parole.
La suite nous révèle ce qu’il criait : « Préparez le chemin du Seigneur, rendez droits ses sentiers. » Tous ceux qui prêchent la foi droite et les bonnes œuvres, que font-ils d’autre que préparer le chemin au Seigneur qui vient dans les cœurs de ceux qui les écoutent ? Leur dessein est que la force de la grâce pénètre ces cœurs, et que la lumière de la vérité les éclaire ; ils veulent rendre droits les sentiers du Seigneur, en suggérant aux âmes des pensées pures par leur bonne prédication.
« Toute vallée sera comblée, toute montagne ou colline sera abaissée. » Que désignent ici les vallées, sinon les humbles, et les montagnes ou les collines, sinon les orgueilleux ? À la venue du Rédempteur, les vallées ont donc été comblées, et les montagnes ou les collines abaissées, parce que, suivant sa parole, « tous ceux qui s’élèvent seront abaissés, et tous ceux qui s’abaissent seront élevés » (Lc 14, 11). Oui, la vallée est comblée et son niveau s’élève, tandis que la montagne ou la colline est abaissée et que son niveau descend : par leur foi au Médiateur entre Dieu et les hommes, Jésus-Christ fait homme (cf. 1 Tm 2, 5), les païens ont reçu la plénitude de la grâce, tandis que les Juifs, en s’écartant de la vérité par leur refus de croire, ont perdu cela même qui faisait leur orgueil. Toute vallée sera comblée, car les cœurs des humbles, recevant la doctrine sacrée de l’Écriture, seront remplis de la grâce des vertus, selon ce qui est écrit : « Il fait jaillir des sources dans les vallées » (Ps 104, 10), et aussi : « Les vallées regorgeront de froment. » (Ps 65, 14). L’eau s’écoule du haut des montagnes, c’est-à-dire que la doctrine de vérité abandonne les esprits orgueilleux ; mais les sources naissent dans les vallées, en ce sens que les esprits humbles reçoivent la parole de la prédication. Que les vallées regorgent de froment, nous le voyons et le constatons déjà, puisque tant d’hommes doux et simples, qui paraissaient méprisables à ce monde, ont été comblés à satiété de l’aliment de la vérité.
Ayant reconnu de quelle admirable sainteté Jean-Baptiste était investi, le peuple voyait en lui cette montagne d’une hauteur et d’une fermeté incomparables, dont il est écrit : « À la fin des jours, la montagne de la maison du Seigneur sera affermie au sommet des montagnes. » (Mi 4, 1). Car on pensait que Jean était le Christ, ainsi que le rapporte l’Évangile : « Comme le peuple était dans l’attente et que tous se demandaient dans leur cœur, au sujet de Jean, s’il n’était pas le Christ, ils l’interrogèrent : “Serais-tu le Christ ?” » (cf. Lc 3, 15). Mais si Jean ne s’était pas considéré comme une vallée, il n’aurait pas été rempli de l’esprit de grâce. Et pour bien montrer ce qu’il était, il déclara : « Un plus fort que moi vient après moi. Je ne suis pas digne de dénouer la courroie de sa sandale. » (Mc 1, 7). Il dit ailleurs : « Celui qui a l’épouse est l’époux, mais l’ami de l’époux, qui se tient là et l’écoute, se réjouit d’une grande joie à la voix de l’époux. Ainsi, ma joie est complète. Il faut qu’il croisse et que je diminue. » (Io 3, 29-30). Voyez : alors que Jean se montrait d’une vertu si extraordinaire dans ses œuvres qu’on le prenait pour le Christ, il répondit non seulement qu’il n’était pas le Christ, mais même qu’il n’était pas digne de délier la courroie de sa sandale, c’est-à-dire de sonder le mystère de son Incarnation. Ceux qui le prenaient pour le Christ croyaient aussi que l’Église était son épouse ; mais il affirma : « Celui qui a l’épouse est l’époux. » C’est comme s’il avait dit : « Je ne suis pas l’époux, mais l’ami de l’époux. » Et il déclarait se réjouir, non pas du fait de sa propre voix, mais à la voix de l’époux. En effet, ce qui réjouissait son cœur, ce n’était pas que le peuple écoute sa parole avec humilité, mais que lui-même entende au-dedans la voix de la Vérité qui le faisait parler au-dehors. C’est ce qu’il appelle justement une joie complète ; car celui qui se réjouit de sa propre voix n’a pas une joie parfaite.
Le Précurseur ajoute encore ceci : « Il faut qu’il croisse et que je diminue. » Ici, il faut se demander en quoi le Christ a crû, en quoi Jean a diminué. Ne serait-ce pas que le peuple, voyant l’austérité de Jean et le considérant éloigné des hommes, pensait qu’il était le Christ, alors qu’apercevant le Christ lui-même mangeant avec les publicains et circulant au milieu des pécheurs, il croyait qu’il n’était pas le Christ, mais un prophète ? Mais lorsqu’au bout d’un certain temps, le Christ, qu’on pensait être un prophète, fut reconnu comme étant le Christ, tandis que Jean, qu’on croyait être le Christ, se découvrit n’être qu’un prophète, ce que le Précurseur avait dit du Christ se réalisa : « Il faut qu’il croisse et que je diminue. » Dans l’opinion du peuple, en effet, le Christ a grandi en étant reconnu pour ce qu’il était, et Jean a baissé en cessant d’être dit ce qu’il n’était pas. Ainsi, puisque Jean a persévéré dans la sainteté pour être demeuré dans l’humilité du cœur, alors que beaucoup d’autres sont tombés pour s’être gonflés de pensées d’orgueil, c’est à bon droit qu’on dit : « Toute vallée sera comblée, toute montagne ou colline sera abaissée. » Car les humbles reçoivent le don que repoussent les cœurs orgueilleux.
Le texte poursuit : « Les chemins tortueux deviendront droits, et les raboteux seront aplanis. » Les chemins tortueux deviennent droits quand les cœurs des méchants, que l’injustice a tordus, sont ramenés à la rigueur d’une droite justice. Et les chemins raboteux sont aplanis lorsque les esprits violents et colériques redeviennent doux et bons par l’infusion de la grâce céleste. En effet, quand un esprit colérique n’accueille pas la parole de vérité, c’est comme si un chemin raboteux détournait les pas du marcheur. Mais lorsque cet esprit colérique, ayant reçu une grâce de bonté, accueille la parole de réprimande ou d’exhortation, le prédicateur trouve une route aplanie au lieu du chemin raboteux qui l’empêchait auparavant d’avancer, c’est-à-dire de poser le pied de sa prédication.
Le texte poursuit : « Et toute chair verra le salut de Dieu. » « Toute chair » signifie tout homme ; or il n’a pas été donné à tout homme de voir en cette vie le salut de Dieu, c’est-à-dire le Christ ; il est donc bien clair que dans cette sentence prophétique, le prophète a en vue le jour du jugement dernier, où, devant les cieux ouverts, le Christ apparaîtra sur son trône de majesté, au milieu des anges qui le serviront et des apôtres qui siégeront avec lui. Tous, élus et réprouvés, le verront pareillement, en sorte que les justes se réjouissent sans fin de leur récompense et que les pécheurs gémissent à jamais dans le supplice de leur châtiment. Et comme cette sentence vise ce que toute chair verra au jugement dernier, le texte ajoute bien à propos : « Il disait aux foules qui venaient se faire baptiser par lui : “Race de vipères, qui vous a appris à fuir la colère qui vient ?” » La colère qui vient, c’est la punition du châtiment final, auquel le pécheur ne saurait échapper s’il ne recourt dès maintenant aux larmes de la pénitence. Et remarquez que les mauvais rejetons qui imitent les actions de leurs mauvais parents sont appelés « race de vipères », parce que portant envie aux bons et les persécutant, rendant le mal à autrui et cherchant à nuire à leurs proches, ils suivent en tout cela les traces de leurs pères selon la chair, et sont, pour ainsi dire, des enfants venimeux nés de parents venimeux.
Mais puisque nous avons péché et que nous sommes devenus esclaves de nos mauvaises habitudes, que Jean nous dise ce qu’il nous faut faire pour fuir la colère qui vient. Le texte poursuit : « Faites donc de dignes fruits de pénitence. » En ces paroles, nous devons remarquer que l’ami de l’époux ne nous exhorte pas seulement à faire des fruits de pénitence, mais de dignes fruits de pénitence. En effet, une chose est de faire un fruit de pénitence, une autre de faire un digne fruit de pénitence. Et pour bien parler des dignes fruits de pénitence, il faut savoir que celui qui n’a rien fait de défendu peut de plein droit user des choses permises : il lui est ainsi possible de pratiquer les œuvres de charité sans pour autant se priver des biens de ce monde contre son gré. Mais si quelqu’un est tombé dans une faute de fornication, ou bien encore — ce qui est plus grave — dans l’adultère, il doit renoncer d’autant plus à ce qui est permis qu’il se rappelle avoir commis ce qui ne l’est pas. Car on n’est pas tenu d’accomplir le même fruit de bonne œuvre selon qu’on a plus ou moins péché : selon qu’on n’a commis aucun péché, qu’on en a commis quelques-uns, ou qu’on est tombé en beaucoup de fautes. Ces paroles : « Faites de dignes fruits de pénitence » prennent donc à partie la conscience de chacun, et l’invitent à se constituer par la pénitence un trésor de bonnes œuvres d’autant plus riche que ses fautes lui ont mérité de plus lourds châtiments.

Prières

Oratio

Excita, quæsumus, Dómine, poténtiam tuam, et veni : et magna nobis virtúte succúrre ; ut per auxílium grátiæ tuæ, quod nostra peccáta præpédiunt, indulgéntiæ tuæ propitiatiónis accéleret : Qui vivis et regnas.

Oraison

Excitez, Seigneur, votre puissance et venez : secourez-nous par votre grande votre force, afin que, avec l’aide de votre grâce, votre indulgente bonté nous accorde sans délai ce que retardent nos péchés.

Prière de Saint Bernard (1090-1153)

Attente des nations, Seigneur Jésus, venez ; que votre divine présence nous réjouisse. Nous avons besoin de conseils, de secours, de protection. Si nous voulons discerner entre le bien et le mal, nous sommes trop facilement trompés ou séduits. Si nous essayons de faire le bien, nous manquons de courage ; si nous nous efforçons de résister au mal, nous ne faisons que trop la triste expérience de notre fragilité. Nous sommes vaincus, nous succombons. Venez donc remédier à notre aveuglement, aider notre faiblesse, protéger notre fragilité. Venez, ô Splendeur de la Gloire de Dieu, ô Sagesse de Dieu, ô Force de Dieu. Changez nos ténèbres en lumière, préservez-nous des périls qui nous menacent, soulagez-nous dans les difficultés que nous traversons, affermissez notre courage dans les combats qui nous sont livrés, afin qu’après nous avoir tenus comme par la main et conduits, selon votre volonté, dans cette carrière que nous avons à parcourir ici-bas, vous nous receviez un jour dans la Cité permanente dont vous êtes le fondateur et l’architecte. Ainsi soit-il.

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Les Antiennes « O »

Les Antiennes « O »

Les Antiennes « O »

Article du Dr Ch. Coubard sur les Grandes Antiennes

Il y a, au cours de la sévère période de l’Avent, rompant quelque peu l’apparente monotonie de ces quatre semaines violettes, quelques étapes, éclairées, pour ainsi dire, de lueurs plus vives, annonçant déjà la grande lumière de Noël.

Ainsi du 3ème Dimanche : Gaudete — le Dimanche rose — et des trois Féries des Quatre-Temps d’hiver. Ainsi, et surtout peut-être, du septenaire précédant immédiatement la Vigile de Noël, du 17 au 23 décembre, où l’on retrouve, chaque année avec une joie nouvelle, les Grandes Antiennes, qu’on appelle aussi les « Ô » de l’Avent, parce qu’elles commencent toujours par la lettre exclamative : « Ô ».

À l’office des Vêpres de chacune de ces Féries majeures, l’antienne de Magnificat revêt une solennité particulière qui lui a valu ce qualificatif de « grande ». On la chante en entier, avant et après le Magnificat, comme aux Fêtes doubles. Dans certaines églises et, aujourd’hui encore, dans les monastères de l’Ordre bénédictin, elles sont accompagnées d’une pompe toute particulière. La première est entonnée solennellement au trône par l’Abbé revêtu de ses ornements pontificaux, cependant que l’on sonne la grosse cloche… C’est déjà la grande joie de Noël, désormais toute proche.
Ces Antiennes, d’une grande richesse de doctrine, renferment, suivant l’expression de Dom Guéranger, « toute la moëlle de la liturgie de l’Avent ». Elles résument en quelque sorte, les implorations ardentes des Patriarches et des Prophètes, les aspirations vers le Messie de tous les peuples et de tous les siècles.

Chantées sur une mélodie à la fois majestueuse et grave, reflétant l’admiration et la véhémence du désir, elles ont leur place aux Vêpres, à l’Office du soir, pour rappeler que c’est sur le soir du monde, « Vergente mundi vespere », que daigna s’incarner le Verbe de Dieu et elles encadrent le magnifique cantique du Magnificat, pour indiquer que la Rédemption nous est venue par Notre-Dame.

Les Grandes Antiennes sont, avons-nous dit, au nombre de sept. Ce chiffre ne fut pas toujours immuable. C’est ainsi qu’au Moyen Âge, certaines Églises en ajoutèrent plusieurs autres : à la Sainte Vierge, à l’ange Gabriel, à Saint Thomas, dont la fête arrive le 21 décembre, et même à Jérusalem. Mais on ne conserva que les sept principales apostrophes adressées. directement au Verbe incarné. Elles peuvent être considérées comme les prières de l’Avent par excellence et comptent parmi les plus belles pièces liturgiques de l’Église.

Chacune salue le Christ d’un titre chaque jour différent et comporte l’adjuration solennelle « Veni », Venez ne tardez plus. Nous ne saurions mieux faire que de reproduire ici ces sept admirables Oraisons dans l’ordre où elles se succèdent :

Le 17 Décembre : O Sapientia. « Ô Sagesse, qui êtes sortie de la bouche du Très-Haut, qui atteignez d’une extrémité du monde à l’autre et disposez toutes choses avec force et suavité, venez nous enseigner les voies de la prudence ! »
Le 18 Décembre : O Adonaï, « Ô Adonaï, chef de la Maison d’Israël, qui, dans la flamme du buisson ardent, êtes apparu à Moïse et lui avez donné la Loi sur le Sinaï, venez nous racheter dans la force de votre bras ! »
Le 19 Décembre : O Radix Jesse, « Ô Rejeton de Jesse, qui êtes dressé comme un étendard à la face des peuples, devant qui les rois se tiendront dans le silence et que les nations invoqueront, venez nous délivrer ; ne tardez plus ! »
Le 20 Décembre : O Clavis David, « Ô Clef de David et sceptre de la Maison d’Israël, vous qui ouvrez et nul ne peut fermer, qui fermez et nul ne peut ouvrir, venez et tirez de prison le captif assis dans les ténèbres et dans l’ombre de la mort ! »
Le 21 Décembre : O Oriens, « Ô Orient, splendeur de la lumière éternelle et Soleil de justice, venez et éclairez ceux qui sont assis dans les ténèbres et dans l’ombre de la mort ! »
Le 22 Décembre : O Rex Gentium, « Ô Roi des Nations et objet de leurs désirs, Pierre angulaire qui unissez en Vous les deux peuples, venez et sauvez l’homme que vous avez formé du limon de la terre ! »
Le 23 Décembre : O Emmanuel, « Ô Emmanuel, notre Roi et notre Législateur, l’attente des nations et leur Sauveur, venez et sauvez-nous, Seigneur notre Dieu ! »

Lorsqu’on étudie dans leur ensemble ces sept Antiennes et chacune d’elles en particulier, on peut constater tout d’abord qu’il y a, de l’une à l’autre, une progression dans la pensée et dans l’expression. Pour parvenir au lever du Soleil de justice, l’on traverse les phases successives de l’aube et de l’aurore… L’on y trouve de plus une incomparable richesse d’images. Chacun de ces chants est un magnifique tableau, un saisissant aperçu ouvert sur le lointain des âges et sur l’éternité.

Le premier vocable dont l’Église salue le Verbe incarné est son titre de Sapientia, la Sagesse incréée, éternellement engendrée avant tous les siècles et organisant avec force et douceur l’immensité des mondes. Ce « suaviter et fortiter » ne résument-il pas merveilleusement le grand poème de la Création ?

Les trois Antiennes suivantes sont sous le signe de l’Ancienne Alliance :
O Adonaï. Adonaï est le nom que les Juifs donnaient à Dieu. Ce chant rappelle les épisodes bibliques du Buisson ardent et de la Loi promulguée sur le Sinaï. Deux figures de la lumière de Noël.
O Radix Jesse. L’Antienne reprend l’image magnifique d’Isaïe : la Racine de Jesse avec sa Tige qui est Marie et sa Fleur, le Christ. Débordant le cadre de l’Ancienne Loi, ce Rejeton de Jesse est devenu un étendard dressé devant les rois et les peuples de tous les temps. Et cet étendard n’est autre que la Croix — « Vexilla Regis,prodeunt » — qui profile déjà sur l’aube de Noël son ombre sévère.
O Clavis David. Les Juifs, avec leur goût du symbolisme, désignaient souvent Dieu et son Saint Nom par un hexagone qu’ils appelaient la Clef de David. Cette clef qui, seule, donne un sens à toutes les figures et à tous les mystères de l’Ancien Testament, s’appelle aussi l’Etoile de David, emblème conservé par les Israélites jusqu’à nos jours. Et cette étoile (Étoile de Balaam, Etoile des Mages) est aussi un signe du Messie qui vient.

O Oriens. Voici encore une gracieuse et parlante image du Sauveur, image qui nous est donnée par les deux prophètes Zacharie. Orient, Soleil qui se lève, non plus seulement sur le peuple élu, mais sur le monde païen tout entier, assis jusqu’alors dans les ténèbres et dans l’ombre de la mort.
O Rex Gentium. Nous avons ici comme une vue d’ensemble sur les siècles. La Bonne Nouvelle a été annoncée à toutes les nations et le Christ, Pierre angulaire, unit en un seul édifice — l’Eglise — Israël et la Gentilité.
O Emmanuel. « Dieu avec nous ». Avec ce vocable qui a la douceur du miel, la dernière des Grandes Antiennes nous ramène aux abords de la Crèche qui, dans deux jours, recevra « Celui que les cieux ne peuvent contenir ». Il ne nous reste plus qu’à y adorer, avec toutes les nations, « le Roi et le Législateur, l’attente des peuples, le Seigneur notre Dieu ».

Lettre de Bossuet à Madame Cornuau (16 décembre 1695)

Loin de trouver mauvais, ma Fille, que vous continuiez à m’écrire, je trouverais fort mauvais que vous ne le fissiez pas.

Je vous l’ai dit tant de fois, et je vous le dis une fois pour toutes, que je le trouve très bon, et qu’il n’y a rien que je trouve mauvais que de douter de moi après tant d’assurances données. Je ne puis vous voir avant les fêtes ; mais ce sera tôt après, s’il plaît à Dieu. Je vous donnerai tout le temps que je pourrai.

Continuez votre retraite, puisque Madame [l’Abbesse de Jouarre] l’approuve; et dites : Ô en silence, n’y ajoutant rien. Ô loue, ô désire, ô attend, ô gémit, ô admire, ô regrette, ô entre dans son néant, ô renaît avec le Sauveur, ô l’attire du ciel, ô s’unit à lui, ô s’étonne de son bonheur dans une chaste jouissance, ô est humble, ô est ardent. Qu’y a-t-il de moins qu’un ô ; mais qu’y a-t-il de plus grand que ce simple cri du cœur ? Toute l’éloquence du monde est dans cet ô; et je ne sais plus qu’en dire, tant je m’y perds.

Qu’on serait heureux d’être à la crèche de Jésus-Christ, quand ce ne serait que comme ces animaux puisque l’un connaît son maître, et l’autre la crèche de son Seigneur (Is 1, 3)! C’est alors qu’il faudrait dire avec David : J’ai été devant vous comme un animal. Vous pouvez aspirer à tout, même aux saintes dispositions de la sainte Vierge, même à celles de Jésus-Christ, qui est notre vrai modèle. Dieu distribue ses dons dans le degré et dans la manière qu’il veut. Je le prie, ma Fille, qu’il soit avec vous.

J. Bénigne, é. de Meaux.

O Sapientia (17 décembre)

O Sapientia, quae ex ore Altissimi prodisti,
attingens a fine usque ad finem fortiter,
suaviter disponensque omnia:
veni ad docendum nos viam prudentiae.

Ô Sagesse, qui êtes sortie de la bouche du Très-Haut,
qui atteignez d’une extrémité du monde à l’autre avec force,
et qui, avec suavité, disposez toutes choses,
venez nous enseigner la voie de la prudence !

Prière de Dom Prosper Guéranger (1805-1875)

Ô Sagesse incréée qui bientôt allez vous rendre visible au monde, qu’il apparaît bien en ce moment que vous disposez toutes choses ! Voici que, par votre divine permission, vient d’émaner un Édit de l’empereur Auguste pour opérer le dénombrement de l’univers. Chacun des citoyens de l’Empire doit se faire enregistrer dans sa ville d’origine. Le prince croit dans son orgueil avoir ébranlé à son profit l’espèce humaine tout entière. Les hommes s’agitent par millions sur le globe, et traversent en tous sens l’immense monde romain ; ils pensent obéir à un homme, et c’est à Dieu qu’ils obéissent. Toute cette grande agitation n’a qu’un but : c’est d’amener à Bethléem un homme et une femme qui ont leur humble demeure dans Nazareth de Galilée ; afin que cette femme inconnue des hommes et chérie du ciel, étant arrivée au terme du neuvième mois depuis la conception de son fils, enfante à Bethléem ce fils dont le Prophète a dit : « Sa sortie est dès les jours de l’éternité ; ô Bethléem, tu n’es pas pas la moindre entre les mille cités de Jacob ; car il sortira aussi de toi. »

Ô Sagesse divine, que vous êtes forte, pour arriver ainsi à vos fins d’une manière invincible quoique cachée aux hommes ! Que vous êtes douce, pour ne faire néanmoins aucune violence à leur liberté ! Mais aussi, que vous êtes paternelle dans votre prévoyance pour nos besoins ! Vous choisissez Bethléem pour y naître, parce que Bethléem signifie la Maison du Pain. Vous nous montrez par là que vous voulez être notre Pain, notre nourriture, notre aliment de vie. Nourris d’un Dieu, nous ne mourrons plus désormais. Ô Sagesse du Père, Pain vivant descendu du ciel, venez bientôt en nous, afin que nous approchions de vous, et que nous soyons illuminés de votre éclat ; et donnez-nous cette prudence qui conduit au salut. Ainsi soit-il.

O Adonaï (18 décembre)

O Adonay, et Dux domus Israhel,
qui Moysi in igne flammae rubi apparuisti,
et ei in Sina legem dedisti:
veni ad redimendum nos in brachio extento.

Ô Adonaï, chef de la Maison d’Israël,
qui, dans la flamme du buisson ardent, êtes apparu à Moïse
et lui avez donné la Loi sur le Sinaï,
venez nous racheter dans la force de votre bras!

Prière de Dom Prosper Guéranger (1805-1875)

Ô Seigneur suprême ! Adonaï ! venez nous racheter, non plus dans votre puissance, mais dans votre humilité. Autrefois vous vous manifestâtes à Moïse, votre serviteur, au milieu d’une flamme divine ; vous donnâtes la Loi à votre peuple du sein des foudres et des éclairs : maintenant il ne s’agit plus d’effrayer, mais de sauver. C’est pourquoi votre très pure Mère Marie ayant connu, ainsi que son époux Joseph, l’Édit de l’Empereur qui va les obliger d’entreprendre le voyage de Bethléem, s’occupe des préparatifs de votre heureuse naissance. Elle apprête pour vous, divin Soleil, les humbles langes qui couvriront votre nudité, et vous garantiront de la froidure dans ce monde que vous avez fait, à l’heure où vous paraîtrez, au sein de la nuit et du silence. C’est ainsi que vous nous délivrerez de la servitude de notre orgueil, et que votre bras se fera sentir plus puissant, alors qu’il semblera plus faible et plus immobile aux yeux des hommes. Tout est prêt, ô Jésus, vos langes vous attendent : partez donc bientôt et venez en Bethléem, nous racheter des mains de notre ennemi. Ainsi soit-il.

O Radix Iesse (19 décembre)

O Radix Iesse, qui stas in signum populorum,
super quem continebunt reges os suum,
quem Gentes deprecabuntur:
veni ad liberandum nos, jam noli tardare.

Ô Rejeton de Jesse, qui êtes dressé comme un étendard à la face des peuples,
devant qui les rois se tiendront dans le silence
et que les nations invoqueront,
venez nous délivrer ; ne tardez plus !

Prière de Dom Prosper Guéranger (1805-1875)

Vous voici donc en marche, ô Fils de Jessé, vers la ville de vos aïeux. L’Arche du Seigneur s’est levée et s’avance, avec le Seigneur qui est en elle, vers le lieu de son repos. « Qu’ils sont beaux vos pas, ô Fille du Roi, dans l’éclat de votre chaussure » (Ct 7, 1), lorsque vous venez apporter leur salut aux villes de Juda ! Les Anges vous escortent, votre fidèle Époux vous environne de toute sa tendresse, le ciel se complaît en vous, et la terre tressaille sous l’heureux poids de son Créateur et de son auguste Reine. Avancez, ô Mère de Dieu et des hommes, Propitiatoire tout-puissant où est contenue la divine Manne qui garde l’homme de la mort ! Nos cœurs vous suivent, vous accompagnent, et, comme votre Royal ancêtre, nous jurons « de ne point entrer dans notre maison, de ne point monter sur notre couche, de ne point clore nos paupières, de ne point donner le repos à nos tempes, jusqu’à ce que nous ayons trouvé dans nos cœurs une demeure pour le Seigneur que vous portez, une tente pour le Dieu de Jacob. » Venez donc, ainsi voilé sous les flancs très purs de l’Arche sacrée, ô rejeton de Jessé, jusqu’à ce que vous en sortiez pour briller aux yeux des peuples, comme un étendard de victoire. Alors les rois vaincus se tairont devant vous, et les nations vous adresseront leurs vœux. Hâtez-vous, ô Messie ! venez vaincre tous nos ennemis, et délivrez-nous. Ainsi soit-il.

O Clavis David (20 décembre)

O Clavis David, et sceptrum domus Israhel;
qui aperis, et nemo claudit;
claudis, et nemo aperit:
veni, et educ vinctos de domo carceris,
sedentes in tenebris, et umbra mortis.

Ô Clef de David et sceptre de la Maison d’Israël,
vous qui ouvrez et nul ne peut fermer,
qui fermez et nul ne peut ouvrir,
venez et tirez de prison les captifs
assis dans les ténèbres et dans l’ombre de la mort !

Prière de Dom Prosper Guéranger (1805-1875)

Ô Fils de David, héritier de son trône et de sa puissance, vous parcourez, dans votre marche triomphale, une terre soumise autrefois à votre aïeul, aujourd’hui asservie par les Gentils. Vous reconnaissez de toutes parts, sur la route, tant de lieux témoins des merveilles de la justice et de la miséricorde de Yahweh votre Père envers son peuple, au temps de cette ancienne Alliance qui tire à sa fin. Bientôt, le nuage virginal qui vous couvre étant ôté, vous entreprendrez de nouveaux voyages sur cette même terre ; vous y passerez en faisant le bien, et guérissant toute langueur et toute infirmité, et cependant n’ayant pas où reposer votre tête. Du moins, aujourd’hui, le sein maternel vous offre encore un asile doux et tranquille, où vous ne recevez que les témoignages de l’amour le plus tendre et le plus respectueux. Mais, ô Seigneur! il vous faut sortir de cette heureuse retraite ; il vous faut, Lumière éternelle, luire au milieu des ténèbres ; car le captif que vous êtes venu délivrer languit dans sa prison. Il s’est assis dans l’ombre de la mort, et il y va périr, si vous ne venez promptement en ouvrir les portes avec votre Clef toute-puissante ! Ce captif, ô Jésus, c’est le genre humain, esclave de ses erreurs et de ses vices : venez briser le joug qui l’accable et le dégrade ; ce captif, c’est notre cœur trop souvent asservi à des penchants qu’il désavoue : venez, ô divin Libérateur, affranchir tout ce que vous avez daigné faire libre par votre grâce, et relever en nous la dignité de vos frères. Ainsi soit-il.

O Oriens (21 décembre)

O Oriens, splendor lucis æternæ,
et sol iustitiæ:
veni, et illumina
sedentes in tenebris, et umbra mortis.

Ô Soleil levant, Splendeur de la Lumière éternelle
et Soleil de justice,
venez et éclairez
ceux qui sont assis dans les ténèbres et dans l’ombre de la mort !

Prière de Dom Prosper Guéranger (1805-1875)

Divin Soleil, ô Jésus ! vous venez nous arracher à la nuit éternelle : soyez à jamais béni ! Mais combien vous exercez notre foi, avant de luire à nos yeux dans toute votre splendeur ! Combien vous aimez à voiler vos rayons, jusqu’à l’instant marqué par votre Père céleste, où vous devez épanouir tous vos feux ! Voici que vous traversez la Judée ; vous approchez de Jérusalem ; le voyage de Marie et de Joseph tire à son terme. Sur le chemin, vous rencontrez une multitude d’hommes qui marchent en toutes les directions, et qui se rendent chacun dans sa ville d’origine, pour satisfaire à l’Édit du dénombrement. De tous ces hommes, aucun ne vous a soupçonné si près de lui, ô divin Orient ! Marie, votre Mère, est estimée par eux une femme vulgaire ; tout au plus, s’ils remarquent la majesté et l’incomparable modestie de cette auguste Reine, sentiront-ils vaguement le contraste frappant entre une si souveraine dignité et une condition si humble ; encore ont-ils bientôt oublié cette heureuse rencontre. S’ils voient avec tant d’indifférence la mère, le fils non encore enfanté à la lumière visible, lui donneront-ils une pensée ? Et cependant ce fils, c’est vous-même, ô Soleil de justice !

Augmentez en nous la Foi, mais accroissez aussi l’amour. Si ces hommes vous aimaient, ô libérateur du genre humain, vous vous feriez sentir à eux ; leurs yeux ne vous verraient pas encore, mais du moins leur cœur serait ardent dans leur poitrine, ils vous désireraient, et ils hâteraient votre arrivée par leurs vœux et leurs soupirs.

Ô Jésus qui traversez ainsi ce monde que vous avez fait, et qui ne forcez point l’hommage de vos créatures, nous voulons vous accompagner dans le reste de votre voyage; nous baisons sur la terre les traces bénies des pas de celle qui vous porte en son sein; nous ne voulons point vous quitter jusqu’à ce que nous soyons arrivés avec vous à l’heureuse Bethléem, à cette Maison du Pain, où enfin nos yeux vous verront, ô Splendeur éternelle, notre Seigneur et notre Dieu ! Ainsi soit-il.

O Rex Gentium (22 décembre)

O Rex Gentium, et desideratus earum,
lapisque angularis,
qui facis utraque unum:
veni, et salva hominem,
quem de limo formasti.

Ô Roi des Nations et objet de leurs désirs,
Pierre angulaire
qui unissez en Vous les deux peuples,
venez et sauvez l’homme
que vous avez formé du limon de la terre !

Prière de Dom Prosper Guéranger (1805-1875)

Ô Roi des nations, vous approchez toujours plus de cette Bethléem où vous devez naître. Le voyage tire à son terme, et votre auguste Mère, qu’un si doux fardeau console et fortifie, va sans cesse conversant avec vous par le chemin. Elle adore votre divine majesté, elle remercie votre miséricorde ; elle se réjouit d’avoir été choisie pour le sublime ministère de servir de Mère à un Dieu. Elle désire et elle appréhende tout à la fois le moment où enfin ses yeux vous contempleront. Comment pourra-t-elle vous rendre les services dignes de votre souveraine grandeur, elle qui s’estime la dernière des créatures ? Comment osera-t-elle vous élever dans ses bras, vous presser contre son cœur, vous allaiter à son sein mortel ? Et pourtant, quand elle vient à songer que l’heure approche où, sans cesser d’être son fils, vous sortirez d’elle et réclamerez tous les soins de sa tendresse, son cœur défaille et l’amour maternel se confondant avec l’amour qu’elle a pour son Dieu, elle est au moment d’expirer dans cette lutte trop inégale de la faible nature humaine contre les plus fortes et les plus puissantes de toutes les affections réunies dans un même cœur. Mais vous la soutenez, ô Désiré des nations ! car vous voulez qu’elle arrive à ce terme bienheureux qui doit donner à la terre son Sauveur, et aux hommes la Pierre angulaire qui les réunira dans une seule famille. Soyez béni dans les merveilles de votre puissance et de votre bonté, ô divin Roi, et venez bientôt nous sauver, vous souvenant que l’homme vous est cher, puisque vous l’avez pétri de vos mains. Oh ! venez, car votre œuvre est dégénérée; elle est tombée dans la perdition ; la mort l’a envahie : reprenez-la dans vos mains puissantes, refaites-la; sauvez-la; car vous l’aimez toujours, et vous ne rougissez pas de votre ouvrage. Ainsi soit-il.

O Emmanuel (23 décembre)

O Emmanuhel, Rex et legifer noster,
exspectatio Gentium, et Salvator earum:
veni ad salvandum nos,
Domine, Deus noster.

Ô Emmanuel, notre Roi et notre Législateur,
l’attente des nations
et leur Sauveur,
venez et sauvez-nous,
Seigneur notre Dieu !

Prière de Dom Prosper Guéranger (1805-1875)

Ô Emmanuel, Roi de Paix, vous entrez aujourd’hui dans Jérusalem, la ville de votre choix; car c’est là que vous avez votre Temple. Bientôt vous y aurez votre Croix et votre Sépulcre ; et le jour viendra où vous établirez auprès d’elle votre redoutable tribunal. Maintenant, vous pénétrez sans bruit et sans éclat dans cette ville de David et de Salomon. Elle n’est que le lieu de votre passage, pour vous rendre à Bethléem. Toutefois, Marie votre mère, et Joseph son époux, ne la traversent pas sans monter au Temple, pour y rendre au Seigneur leurs vœux et leurs hommages : et alors s’accomplit, pour la première fois, l’oracle du Prophète Aggée qui avait annoncé que la gloire du second Temple serait plus grande que celle du premier. Ce Temple, en effet, se trouve en ce moment posséder une Arche d’Alliance bien autrement précieuse que celle de Moïse, mais surtout incomparable à tout autre sanctuaire qu’au ciel même, par la dignité de Celui qu’elle contient. C’est le Législateur lui-même qui est ici, et non plus simplement la table de pierre sur laquelle la Loi est gravée. Mais bientôt l’Arche vivante du Seigneur descend les degrés du Temple, et se dispose à partir pour Bethléem, où l’appellent d’autres oracles. Nous adorons, ô Emmanuel, tous vos pas à travers ce monde, et nous admirons avec quelle fidélité vous observez ce qui a été écrit de vous, afin que rien ne manque aux caractères dont vous devez être doué, ô Messie, pour être reconnu par votre peuple. Mais souvenez-vous que l’heure est près de sonner, que toutes choses se préparent pour votre Nativité, et venez nous sauver; venez, afin d’être appelé non plus seulement Emmanuel, mais Jésus, c’est-à-dire Sauveur. Ainsi soit-il.

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Samedi des Quatre-Temps de l’Avent

Samedi des Quatre-Temps de l’Avent

Samedi des Quatre-Temps de l’Avent

Le mot de Dom Delatte

Le règne de Dieu ne s’établira dans l’âme qu’à la condition d’une droiture et d’une pureté parfaites ; toute aspérité, toute tortuosité ne peuvent que ralentir ou compromettre la venue du Seigneur.

La Prédication de Saint Jean-Baptiste : Commentaire de l’Évangile (Lc 3, 1-6) par Dom Delatte
C’est avec la prédication de saint Jean que commence le récit des faits sur lesquels devait porter l’enseignement apostolique (Act 1, 21-22) ; et c’est par là que débute l’évangile de saint Marc. La date est mémorable. Depuis Moïse jusqu’à Samuel, et depuis Samuel jusqu’à Malachie (430 avant J.-C.), le peuple juif n’avait cessé de jouir de la prophétie. Mais, avec Malachie, la voix de Dieu avait retenti pour la dernière fois. Il régnait une sorte d’anxiété chez le peuple. Lorsque s’élevaient des problèmes auxquels la science ordinaire ne pouvait trouver de solution, on les mettait en réserve jusqu’à ce que vînt un prophète qui donnât la réponse divine (1 Mcc 4, 46). On conçoit dès lors quel dut être le frémissement de tout l’Israël religieux lorsqu’il apprit qu’un envoyé de Dieu était venu rompre enfin ce long silence. C’était une époque nouvelle qui commençait, une date qu’il convenait de fixer en la coordonnant avec tous les synchronismes politiques et religieux de la Judée et du monde. Saint Luc, avec son sens d’historien, emploie le même procédé que Thucydide dans son histoire de la guerre du Péloponnèse ; et alors que saint Matthieu se borne à dire : in diebus illis, pour introduire la prédication de saint Jean-Baptiste, saint Luc multiplie les références chronologiques et marque six points d’attache.
Dans la quinzième année du règne de Tibère César. C’est le 19 août 767 de Rome que mourut Auguste ; nous serions donc en 781-782. Mais nous savons d’ailleurs que Tibère avait été associé à l’empire, avec Auguste, dès 761 ; et des auteurs estiment que saint Luc reporte à cette date le début du gouvernement de Tibère ; les termes qu’il emploie ne signifient point nécessairement l’exercice exclusif de l’autorité. — Après l’indication du pouvoir civil, lointain et universel, vient celle du pouvoir local et prochain : Ponce Pilate étant procurateur de la Judée. Il était le sixième gouverneur romain, depuis la déposition de l’ethnarque Archélaüs, fils d’Hérode le Grand. Bien que jouissant du droit de glaive, Pilate dépendait en partie du légat de Syrie. — Archélaüs avait hérité, à lui seul, de la moitié des États d’Hérode ; ses deux frères, Hérode Antipas et Philippe, s’étant partagé ce qui restait, chacun d’eux possédait un quart du royaume paternel ; et le titre de tétrarque qui leur était donné, comme en général à certains petits princes tributaires, retrouvait ainsi sa signification originelle. C’est avec Hérode Antipas que saint Jean-Baptiste et le Seigneur lui-même se rencontreront dans la suite. Il gouvernait non seulement la Galilée, mais aussi la Pérée, sur la rive gauche du Jourdain. On lui donnait parfois par flatterie le titre de roi, et il s’efforça de l’obtenir de Caligula, qui l’envoya en exil. Philippe était alors tétrarque de l’Iturée et de la Trachonitide, un vaste croissant au nord et à l’est du lac de Tibériade. Césarée “de Philippe” avait été créée par lui, ainsi que Bethsaïde-Julias, bâtie en l’honneur de Julia, femme de Tibère et fille d’Auguste. Il ne faut pas le confondre avec un autre fils d’Hérode, du même nom, à qui Antipas ravit sa femme Hérodias. Saint Luc mentionne encore Lysanias, tétrarque de l’Abylène, c’est-à-dire de la région qui est autour d’Abila, dans l’Anti-Liban et le voisinage de Damas.
Vient ensuite l’indication des autorités religieuses : « sous le grand-prêtre Anne et Caïphe », dit saint Luc : car dans le texte original ces deux noms sont désignés par l’appellatif au singulier, ce qui veut marquer sans doute une situation spéciale ; elle était encore existante à l’époque des Actes (4, 6). Le grand-prêtre Anne avait été déposé par Valerius Gratus, le prédécesseur de Ponce Pilate. Mais il conserva parmi les Juifs une influence considérable sous les pontifes que l’autorité romaine lui substitua tour à tour. Joseph ou Caïphe (Caiaphas), son beau-fils (Io 18, 13), qui était alors titulaire du souverain pontificat, le demeura jusqu’à l’an 36, où il fut déposé par Vitellius.
Un prophète s’est levé enfin, avec l’esprit et la vocation d’Élie : c’est Jean, fils de Zacharie, que saint Matthieu appelle, par anticipation, le Baptiste. L’heure de sa manifestation à Israël (Lc 1, 80) est arrivée. Depuis son enfance, il a vécu « dans les lieux déserts », peut-être vers le sud des solitudes de Juda, auprès de la mer Morte. C’est là que lui vint l’ordre de Dieu, et que lui fut précisée sa mission ; il y eut pour lui, comme pour Isaïe, Jérémie, Ézéchiel, une divine investiture. Et il remonta dans la partie nord du désert, plus accessible, vers l’endroit où le Jourdain se jette dans le mer Morte. Mais il allait et venait dans toute la vallée du Jourdain, les conditions mêmes de sa prédication et de sa mission l’obligeant de ne point s’éloigner du fleuve.
Non seulement le Seigneur a été annoncé par son Précurseur, mais l’office du Précurseur lui-même était prophétiquement dessiné. « Voici, dit le Père à son Fils, que j’envoie mon messager devant vous ; il fraiera le chemin où vous devez passer. » Saint Marc est le seul qui rapporte ici les paroles de Malachie (3, 1), et il les réunit à une citation d’Isaïe (40, 3-5), commune aux trois synoptiques, mais plus étendue chez saint Luc. S’il attribue le tout à Isaïe, c’est peut-être pour abréger et parce qu’Isaïe était le plus illustre des prophètes, leur maître à tous. Des critiques ont supposé qu’un glossateur ancien avait ajouté au texte de saint Marc la citation de Malachie qui se lit, et sans nom de prophète, en saint Matthieu (11, 10), et en saint Luc (7, 27). Quand Isaïe avait voulu annoncer à Jérusalem le retour de la captivité de Babylone, son message avait pris une forme dramatique et saisissante. Dieu se mettait à la tête de son peuple, comme un généralissime, et envoyait devant lui, vers la ville désolée, un héraut à la voix puissante qui devait annoncer à tous les échos de la Judée le retour du peuple de Dieu. Or, les œuvres divines se répètent, les faits de l’histoire sont symétriques : ce qui s’est accompli autrefois trouve maintenant encore sa réalisation, plus large et plus étendue. Ici, c’est vraiment le Seigneur en personne, Emmanuel, qui vient arracher son peuple à la captivité et l’introduire dans une patrie définitive. La proclamation du messager royal retentit soudain : « Préparez le chemin du Seigneur, rendez droits ses sentiers ! Toute vallée sera comblée, toute montagne et toute colline seront aplanies ; les voies tortueuses seront rectifiées et les chemins raboteux adoucis ; et toute chair verra le salut de Dieu. » C’est donc bien un salut offert à tous et dont la préparation est spirituelle. Les sentiers et les voies de Dieu, ce sont les dispositions morales : le règne de Dieu ne s’établira dans l’âme qu’à la condition d’une droiture et d’une pureté parfaites ; toute aspérité, toute tortuosité ne peuvent que ralentir ou compromettre la venue du Seigneur.
La prédication de Jean et le baptême qu’il administrait avaient pour dessein de frayer un chemin au Messie tout proche. Héraut de Dieu, « il proclamait le baptême de pénitence pour la rémission des péchés », il en affirmait la nécessité et la valeur. Trop souvent, chez les Juifs, la pénitence était œuvre extérieure et d’ostentation. Ce que saint Jean réclame, c’est un changement intérieur de vie, une orientation nouvelle de la pensée, une sincère conversion des mœurs. Se soumettre à ce baptême, c’était se reconnaître pécheur, puisque le texte sacré mentionne même une accusation, une déclaration sans doute générale et globale des fautes commises ; c’était aussi s’engager à une vie nouvelle par le symbole d’une purification et d’une seconde naissance : l’idée de baptême appelant l’idée d’une régénération (Io 3, 5). Les ablutions étaient cérémonies très familières aux Juifs ; et pour faire un prosélyte, il fallait un bain rituel, avec l’engagement de se soumettre à la Loi. Mais on voit bien que le baptême de Jean était distinct de tout ce qui avait été pratiqué jusque-là. Il était d’efficacité supérieure et donné une fois pour toutes. Il inaugurait une économie plus parfaite, où la justice serait vraiment chose d’âme. À lui seul néanmoins il ne suffisait pas (Io 1, 26 sq. ; Act 19, 1-5). Le baptême de Jean était, comme Jean lui-même, préparatoire et précurseur : il disposait à cette rémission des péchés qui ne pouvait venir que du Seigneur ; et s’il remettait les fautes, ce n’était que moyennant les dispositions des pénitents, ex opere operantis, à la manière des sacrements de l’Ancienne Loi.
Le motif qui exige ce changement intérieur est assigné par saint Jean-Baptiste : Convertissez-vous, dit-il, car le Royaume des cieux est proche. Ce n’est pas le lieu d’exposer l’ensemble de la doctrine scripturaire sur « le Royaume des cieux » ou « le Royaume de Dieu » : deux expressions synonymes, la première étant propre à saint Matthieu. Toute l’histoire providentielle est ordonnée à la constitution de la royauté de Dieu. Le but des choses est le règne de Dieu, tel qu’il existera dans l’éternité, le Fils de Dieu s’est incarné pour aller recruter des sujets à son Père : il les lui présentera au dernier jour du monde (1 Cor 15, 24-28). De cette théocratie, l’Ancien Testament a offert l’esquisse. Dieu est le roi d’Israël, et il témoigne peu de joie lorsque le peuple lui demande de mettre à sa tête, comme chez les autres nations, un roi visible, qui le conduise au combat (1 Sm 8 ; 10, 19). Surtout Dieu s’irrite lorsqu’il voit Israël chercher dans les peuples voisins un appui qu’il ne devait demander qu’à son roi invisible mais attentif et tout-puissant. Cependant, Dieu a voulu faire mieux dans la nouvelle alliance, et constituer, par l’Église, une théocratie universelle et permanente, vraiment céleste, spirituelle et intérieure, extérieure aussi et visible. Que de fois les prophètes l’ont annoncée ! Il y aura désormais sur terre un avant-goût de l’éternité et comme une réalisation anticipée de ces conditions futures dont parle l’Apocalypse : « Voici la tente où Dieu habitera avec les hommes, et il demeurera avec eux, et ils seront son peuple, et lui, Dieu avec eux, sera leur Dieu » (Apc 21, 3). Jean, le héraut du Fils de Dieu incarné, annonçait que ce royaume ou ce règne était là, tout proche, à portée de la main.
Il ne faisait pas de miracles, mais sa vie était sainte ; et sa mortification héroïque explique en partie la popularité dont il jouit aussitôt. Il avait été dit à Zacharie que son fils marcherait devant le Messie selon l’esprit et la vertu d’Élie. Jusque dans son vêtement, Jean rappelait l’illustre prophète : vir pilosus, et zona pellicea accinctus renibus (4 Rg 1, 8). Lui aussi portait un manteau grossier, tissé de poils de chameau, et, autour des reins, une ceinture de cuir. Sa nourriture était des plus frugales et telle que la pouvait offrir la région sauvage et pierreuse qu’on appelait le désert de Judée : des sauterelles et du miel sauvage. Les sauterelles de Palestine sont longues et fortes, grosses à peu près comme des crevettes, et, assaisonnées de certaine manière, elles en ont le goût, paraît-il ; elles constituaient souvent en Orient l’aliment des pauvres. Il y avait aussi des abeilles à foison ; elles construisaient leurs rayons dans le creux des arbres et des rochers, et la chaleur du soleil en faisait parfois ruisseler le miel : terra fluens lac et mel. On pouvait donc vivre au désert, on pouvait même s’adjoindre des disciples. De tous côtés, les pénitents et les curieux affluaient autour de Jean : avec Jérusalem, toute la Judée, tout le pays qui avoisinait le Jourdain, Juifs de la Pérée, de la Samarie, de la Décapole. Et Jean baptisait dans le fleuve tous ceux qui consentaient à avouer leurs péchés.

Prières

Oratio

Deus, qui cónspicis, quia ex nostra pravitáte afflígimur : concéde propítius ; ut ex tua visitatióne consolémur : Qui vivis.

Oraison

Seigneur Dieu, vous voyez les épreuves que nous subissons à cause du péché qui est en nous : accordez-nous de trouver le réconfort dans votre venue.

Oratio

Concéde, quæsumus, omnípotens Deus : ut, qui sub peccáti iugo et vetústa servitúte deprímimur ; exspectáta unigéniti Fílii tui nova nativitáte liberémur : Qui tecum vivit.

Oraison

Dieu tout puissant, par un vieil esclavage, nous sommes écrasés sous le joug du péché ; faites que la naissance nouvelle de votre Fils unique que nous attendons nous rende la liberté.

Oratio

Indignos nos, quæsumus, Dómine, fámulos tuos, quos actiónis própriæ culpa contrístat, unigéniti Fílii tui advéntu lætífica : Qui tecum vivit et regnat.

Oraison

Nous sommes, Seigneur, des serviteurs indignes, et c’est notre vie coupable qui nous attriste. Cependant, rendez-nous la joie par l’avènement de votre Fils Unique.

Oratio

Præsta, quæsumus, omnípotens Deus : ut Fílii tui ventúra sollémnitas et præséntis nobis vitæ remédia cónferat, et præmia ætérna concédat. Per eúndem Dóminum nostrum.

Oraison

Nous vous en prions, Dieu tout puissant, permettez que la fête toute proche de votre Fils nous apporte les remèdes nécessaires à la vie présente et nous mérite la récompense éternelle.

Oratio

Preces pópuli tui, quæsumus, Dómine, cleménter exáudi : ut, qui iuste pro peccátis nostris afflígimur, pietátis tuæ visitatióne consolémur : Qui vivis.

Oraison

Écoutez avec bienveillance, nous vous en supplions, Seigneur, les prières de votre peuple ; afin que, justement affligés à cause de nos péchés, nous soyons consolés par la visite de votre bonté.

Méditation de Saint Augustin (354-430)

Dieu ne rejette pas un cœur contrit : « Quand bien même vos péchés seraient semblables à la pourpre, je saurai les rendre blancs comme la neige », dit le Seigneur. Elle a une grande vertu cette componction qui peut nous rendre semblable à la neige et en donner à notre âme toute la blancheur, après que le péché l’avait longtemps défigurée en lui enlevant sa première beauté. Oui, celui qui s’humilie se trouve sauvé, non pas toujours pour avoir pratiqué les vertus ni fidèlement accompli les préceptes divins, mais par la pure Miséricorde de Dieu, lorsque ce pécheur, devenu pénitent, fait l’aveu de ses fautes avec un abaissement profond et une contrition sincère. Oui, si cette pauvre âme, embarrassée dans les filets du démon, peut néanmoins faire un retour sur elle-même, déplorer son état, montrer à Dieu qu’une douleur intime et profonde habite dans son cœur, s’attacher à Lui par la prière, et baiser en quelque sorte, par toutes ces bonnes œuvres, les pieds invisibles du Sauveur ; alors le Seigneur dit à ses anges ce qu’Élisée disait de la femme sunamite : « Laissez-la venir à moi, et ne la repoussez pas ». Quoiqu’elle ne se sente encore appuyée d’aucune vertu qui puisse lui préparer un accès auprès de moi et lui donner confiance en ma Miséricorde, néanmoins, puisque je suis témoin de la tristesse dont son cœur est pénétré, parce que je la vois prosternée sans cesse en ma présence et y verser des torrents de larmes, son attitude humble et pénitente m’émeut de compassion ; je cède à ce sentiment, je la reçois et je la sauve.

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Neuvaine de Noël

Neuvaine de Noël

Neuvaine de Noël

Nous vous proposons la prière suivante comme neuvaine de préparation à la fête de Noël du 16 au 24 décembre. Cette année nous ferons cette Neuvaine aux intentions suivantes : en action de grâces pour les biens spirituels reçus, et pour les besoins temporels du Prieuré.

Enfant-Jésus, notre Roi, nous vous en conjurons, prosternés devant votre sainte image, jetez un regard de clémence sur nos cœurs suppliants et pleins d’angoisse. Que votre Cœur si bon, si incliné à la pitié, se tourne vers nous et nous accorde les grâces que nous lui demandons avec instance. Délivrez-nous de la tristesse et du découragement, de tous les maux et difficultés qui nous accablent. Par les mérites de votre Sainte Enfance, daignez nous exaucer et nous accorder la consolation et le secours dont nous avons besoin, afin que nous vous louions avec le Père et le Saint-Esprit, dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.

Saint Enfant-Jésus, écoutez-nous.
Saint Enfant-Jésus, bénissez-nous.
Saint Enfant-Jésus, exaucez-nous.

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Vendredi des Quatre-Temps de l’Avent

Vendredi des Quatre-Temps de l’Avent

Vendredi des Quatre-Temps de l’Avent

Le mot de Saint Ambroise

Vous êtes aussi bienheureux, vous qui avez entendu et cru ! Car toute âme qui croit, conçoit et engendre la parole de Dieu et reconnaît ses œuvres. Qu’en tous réside l’âme de Marie pour glorifier le Seigneur ; qu’en tous réside l’esprit de Marie pour exulter en Dieu. S’il n’y a corporellement qu’une Mère du Christ ; par la foi, le Christ est le fruit de tous.

La Visitation de Marie à Élisabeth : Commentaire de l’Évangile (Lc 1, 39-56) par Dom Delatte
La Sainte Vierge, avertie du bonheur de sa cousine, désire la féliciter aussitôt. Nous ne saurions préciser l’origine et le degré de la parenté qui unissait Notre-Dame et Élisabeth. Au souvenir de la Visitation, les paroles de saint Ambroise se présentent d’elles-mêmes à notre mémoire : « Ce n’est pas qu’elle fût incrédule à l’oracle de l’Ange, ou qu’elle doutât de la réalité de la mission du messager qui lui était envoyé, ni même qu’elle hésitât sur l’exemple qui lui avait été donné ; mais Marie était heureuse de voir les désirs de sa cousine réalisés ; elle voulut remplir, en la visitant, un pieux devoir, et partit en toute hâte vers les montagnes, car la joie la transportait. » Depuis l’Incarnation, les œuvres et les démarches de Notre-Dame sont les œuvres et les démarches communes d’elle et de son Fils. C’est une communion douce et continue. Elle appartient toute à ce sacrement de pureté, de beauté, de tendresse, qui repose dans son sein. Elle se lève, elle va sans retard, cum festinatione, dans la région montagneuse d’Hébron ou de Juttah, pour féliciter sa cousine ; mais elle accomplit toutes choses, répétons-le, sous la pression intérieure de son Fils.
Notre-Dame était venue seule, semble-t-il. Elle entra dans la demeure de Zacharie, et salua Élisabeth. Ce n’était pas seulement une mère vierge qui venait féliciter une mère jadis stérile ; c’était le Sauveur encore voilé qui venait sanctifier son Précurseur. Élisabeth fut avertie de cette œuvre de sanctification par le tressaillement et l’exultation de son enfant. Zacharie avait pu lui faire connaître les promesses angéliques concernant le fils qu’elle avait miraculeusement conçu. Il devait être un précurseur : mais le précurseur de qui, exactement ? Avant même que la Sainte Vierge eût prononcé d’autre parole que celles de la salutation, la mission de l’enfant, le mystère dès lors réalisé du Messie, la maternité virginale de Marie, tout cela fut montré à Élisabeth. L’Esprit de Dieu, qui sanctifiait son fils par le sacrement du Seigneur et de sa Mère, éclaira son âme et sa pensée. Un transport de joie surnaturelle la saisit, lui fit poursuivre la salutation angélique et chanter un cantique ; car c’est un vrai cantique, au même titre que le Magnificat et le Benedictus ; c’est à peine s’il leur cède en beauté :
« Vous êtes bénie entre les femmes, et le fruit de vos entrailles est béni.
Et d’où m’est-il donné que la mère de mon Seigneur vienne à moi ?
Car votre voix, lorsque vous m’avez saluée, n’a pas plus tôt frappé mes oreilles, que l’enfant a tressailli de joie dans mon sein.
Bienheureuse êtes vous, qui avez cru ! Car elles seront accomplies les choses qui vous ont été dites de la part du Seigneur ! »
À la salutation de l’ange : « pleine de grâce », se joint le salut d’Élisabeth : « bénie entre les femmes ». Une malédiction a été portée à l’origine, prononcée contre le diable et contre la terre : maledicta terra in opere tuo. Mais une bénédiction universelle a été promise aux patriarches ; et la voici venue ; Notre-Dame la porte en elle. Elle est bénie elle-même, parce qu’elle a été, en vue des mérites de son Fils, éminemment rachetée au jour de l’Immaculée-Conception. Bénie entre toutes les femmes, cela veut dire au-dessus de toutes, et aussi bénie parmi elles : car les femmes, qui s’attristaient autrefois du châtiment attiré par Ève sur leur sexe, chantent maintenant la bénédiction apportée par Marie. Élisabeth fait d’ailleurs remonter jusqu’au Fils de la Vierge cette bénédiction dont il est le principe : « Et le fruit de votre sein est béni. » — « Et comment m’est-il donné que la Mère de mon Seigneur vienne jusqu’à moi ? » On peut comparer l’attitude de sainte Élisabeth devant Notre-Dame à celle de saint Jean-Baptiste en face du Seigneur ; elles sont absolument identiques : « C’est moi, s’écriera saint Jean, qui dois être baptisé par vous, et vous venez à moi ! » Élisabeth dit : « la Mère de mon Seigneur », c’est-à-dire de mon Dieu ; elle est donc bien renseignée ; elle confesse d’un mot toute l’Incarnation. Même, elle ajoute les indices qui ont formé sa conviction et ouvert son âme à la lumière divine. Dieu est l’auteur de nos certitudes, il peut créer en nous une conviction que rien ne puisse ébranler. « Car voici qu’au moment où le son de votre voix parvenait à mes oreilles, le petit enfant a tressailli d’allégresse dans mon sein. Et bienheureuse celle qui a eu foi, car elles s’accompliront, les choses qui lui ont été dites de la part du Seigneur. » Peut-être la pensée d’Élisabeth se replie-t-elle sur la peine infligée à l’incrédulité de son mari ; au moins, du côté de Notre-Dame, il n’y a eu ni hésitation ni défiance ; et si splendide qu’ait été la promesse angélique, toute la parole de Dieu se réalisera.
Les trois cantiques de saint Luc sont singulièrement expressifs des personnages qui les prononcent, et l’Esprit de Dieu qui les inspire laisse à chacun d’eux son entière physionomie. Élisabeth est surtout Une mère, une mère pieuse. Elle croit, elle croit tout le mystère ; elle s’étonne que la grandeur de la Mère de Dieu s’incline vers elle ; mais elle ne songe qu’incidemment à la « consolation » du peuple juif. Elle ne dit rien non plus de l’universalité de la Rédemption : ce sera le thème réservé à Notre- Dame. Elle songe, elle, à son fils, à la relation de son fils avec le fruit béni que Notre-Dame porte en son sein. Le cantique de la Sainte Vierge, en réponse à celui d’Élisabeth, n’est pas original dans son expression, mais dans son acception seulement. Il rappelle divers passages des Psaumes, des Prophètes, et surtout le cantique d’Anne, mère de Samuel (1 Sm 2, 1-10). Notre-Dame ne loue Dieu qu’avec les propres paroles de Dieu, et les formules inspirées lui sont tellement familières qu’elles se placent d’elles-mêmes sur ses lèvres. On peut diviser le Magnificat en quatre strophes.
« Mon âme glorifie le Seigneur, et mon esprit tressaille de joie en Dieu, mon salut. » C’est une louange qui naît de l’âme et de l’esprit de Notre-Dame : tout son être intérieur, âme, esprit, se traduit dans cette louange, comme si la personne entière était un cantique vivant et s’employait à exalter Dieu. Elle appelle Dieu son salut : et en effet, nous l’avons remarqué déjà, la Sainte Vierge a été sauvée d’une façon éminente, puisque la mort de son Fils lui a donné, par anticipation, d’être conçue sans tache. Son allégresse sainte n’efface pas l’humilité. Elle reconnaît que le premier amour de Dieu envers elle est, comme Dieu même, sans motif et sans cause. Tout ce qui n’est pas Dieu est si petit ! Notre-Dame s’est déclarée naguère la servante du Seigneur : elle le rappelle aujourd’hui. Qu’avait-elle qui la recommandât aux préférences divines ? Tout est venu de Dieu, qui s’est incliné, dit-elle, non vers des mérites personnels, mais vers l’obscurité, la petitesse, la simplicité de sa servante ; et voici que désormais toutes les générations diront bienheureuse cette humble Vierge de Juda. N’est-il pas vrai que la prophétie est extraordinaire, sur les lèvres de Marie ? N’est-il pas vrai qu’elle s’est bien réalisée ? Depuis vingt siècles, et de plus en plus, toutes les nations, bénies dans le Fils, ont béni la Mère, l’ont acclamée, l’ont enveloppée d’une vénération et d’une tendresse incomparables. À elle seule, cette gloire de Notre-Dame pourrait prouver la vérité de l’Incarnation et la divinité du christianisme.
La deuxième strophe commence à célébrer l’œuvre de Dieu en Notre-Dame et par elle. Ce que le Tout-Puissant a réalisé en elle, Notre-Dame ne le précise point : « Il a réalisé de grandes choses, il a fait grand pour moi, celui qui est puissant ; et son nom est saint. Et sa miséricorde s’étend, de génération en génération, sur ceux qui le craignent, » c’est-à-dire, en langage biblique, qui le regardent, qui l’aiment et qui lui sont fidèles. Notons le caractère large, volontairement imprécis, de toutes ces paroles, qui rappellent le style des Psaumes. Même en remerciant Dieu d’un bienfait très déterminé, Notre-Dame et les auteurs inspirés dirigent leur parole comme si elle devait servir toujours et devenir l’expression éternelle de la reconnaissance chrétienne. Observons aussi que la Sainte Vierge, comme son Fils, comme l’apôtre saint Paul, aperçoit la miséricorde de Dieu s’étendant universellement sur tous les hommes. C’est l’annonce de l’Église et de sa catholicité.
Même, dans la troisième strophe, Notre-Dame, voyant réalisées déjà les dernières conséquences de ce qui s’est accompli en elle, annonce, en style prophétique, que la force du bras divin a désormais déplacé l’axe des choses, dissipé la vanité des sages remplis d’eux-mêmes, fait descendre les potentats de leur trône et exalté les humbles, appelé au festin les pauvres affamés et écarté les opulents. C’est, à grands traits, la description d’une révolution qui a déçu les Juifs charnels, recueilli les gentils, déconcerté la pensée purement humaine. Nous retrouverons le développement de cette idée au cours de tout le récit évangélique.
Enfin, la Sainte Vierge termine par la louange un cantique commencé par la louange. Elle rend hommage à la fidélité de Dieu. Dieu est venu au secours d’Israël, son serviteur, en envoyant le Messie dont le monde avait besoin, mais non le Messie conquérant et guerrier que rêvait la Judée. Après une longue attente, durant laquelle l’humanité a eu le loisir d’éprouver sa faiblesse. Dieu s’est souvenu enfin de sa miséricorde, selon qu’il l’avait promis à nos pères, à Abraham surtout, et à sa postérité, pour jamais. Mais cette postérité éternelle, c’est le Christ et tous ceux qui sont nés de lui (Gal 3, 16). Notre-Dame a bien retenu et compris la parole de l’ange ; c’est la même chose de parler, comme Gabriel, du roi « dont le règne n’aura point de fin », et de « la postérité d’Abraham, pour l’éternité ».
Il nous paraît très probable que la Sainte Vierge est demeurée près de sa cousine jusqu’après la naissance de saint Jean-Baptiste ; mais pour achever aussitôt ce qui concerne Notre-Dame, saint Luc fait ici une interversion (nous aurons dans la suite d’autres exemples de ce procédé) ; il nous dit que la Mère de Dieu retourna chez elle après trois mois environ. L’Annonciation ayant eu lieu au sixième mois de la maternité d’Élisabeth et Notre-Dame étant partie presque aussitôt pour Hébron ou Juttah, la nativité du Précurseur dut coïncider avec la fin du séjour de Notre-Dame en cette région.

Prières

Oratio

Excita, quæsumus, Dómine, poténtiam tuam, et veni : ut hi, qui in tua pietáte confídunt, ab omni cítius adversitáte liberéntur : Qui vivis.

Oraison

Excitez votre puissance, Seigneur, et venez, pour que vos fidèles, confiants en votre bonté, soient très vite délivrés de tout ce qui leur fait obstacle.

Exhortation de Thomas a Kempis (1380-1471)

Invoquez Marie, et vous obtiendrez la victoire ; honorez Marie, et vous mériterez la récompense éternelle. Rappelée souvent à la mémoire, la vie sainte de Marie vous offre deux avantages principaux : elle vous apprend, dans le bonheur et la prospérité, à louer Dieu du fond du cœur ; et dans les revers, à conserver persévéramment la patience. Comme elle n’a cessé de rendre à Dieu de sublimes louanges pour les bienfaits excellents par lesquels il avait daigné l’élever au-dessus des autres créatures, ainsi a-t-elle su montrer une douceur inaltérable, au milieu des dures épreuves de ce siècle, et choisir l’abjection de préférence à la prospérité. Invoquez Marie, honorez-la, glorifiez-la. Dans la joie, dans les larmes, soyez avec Marie ; travaillez avec Marie, veillez avec Marie, priez avec Marie, récréez-vous avec Marie, reposez-vous dans Marie, surtout cherchez Jésus avec Marie, enfin désirez vivre et mourir avec Jésus et avec Marie.

Antienne

Ã. Ex quo facta est vox salutationis tuæ in auribus meis, exsultavit in gaudio infans in utero meo, alleluia.

Ã. Dès que la voix de votre salutation est venue à mes oreilles, l’enfant a tressailli de joie dans mon sein, alleluia.

Antienne grégorienne “Ex quo facta est”

Antienne Ex quo facta est

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