Mercredi des Quatre-Temps de l’Avent

Mercredi des Quatre-Temps de l’Avent

Mercredi des Quatre-Temps de l’Avent

Le mot de Saint Bernard

Rougis donc, homme, ô cendre orgueilleuse ! Un Dieu s’abaisse et toi tu t’élèves ! Un Dieu se soumet aux hommes, et toi, non content de dominer tes semblables, tu vas jusqu’à te préférer à ton Créateur ?

L’Annonciation à Marie : Commentaire de l’Évangile (Lc 1, 26-38) par Dom Delatte
Après l’annonciation du Précurseur, saint Luc nous rapporte l’annonciation du Messie. Les cinq mois silencieux d’Élisabeth se sont écoulés. Nous sommes arrivés au sixième mois depuis la scène du temple. Maintenant, la scène est à Nazareth, dans la Galilée. Une humble maison, plus auguste que le temple. Un ménage humble et pauvre : un artisan, son épouse vierge. Regardons. Là nous pouvons tout apprendre. Nazareth est l’école par excellence. Nous voyons le milieu et l’atmosphère où s’accomplissent les œuvres de Dieu : l’humilité, la pauvreté, la solitude, la pureté, l’obéissance. — Ce même archange Gabriel, envoyé, dans l’Ancien Testament, pour renseigner Daniel sur le mystère des semaines d’années et la date de l’avènement du Messie, député à Zacharie pour lui apprendre que l’heure est proche, est envoyé maintenant de Dieu dans une ville de la Galilée, Nazareth, à une vierge du nom de Marie, épouse de Joseph, un rejeton de la famille de David.
« Et ayant pénétré près d’elle, il dit : “Je vous salue, pleine de grâce”… » Ce n’est pas avec des paroles qu’il faut commenter. Aussi bien, les termes sacrés sont pleins, riches de signification profonde. C’est vraiment la joie qui est annoncée au monde, et depuis cette heure-là, il n’y a plus que du bonheur pour ceux qui acceptent l’incarnation. Cette création surnaturelle qui s’éveille à la parole de l’ange suffit à l’allégresse du temps et à celle de l’éternité. — Le terme grec traduit par gratia plena signifie une plénitude de grâce reçue par Notre-Dame. Saint Thomas nous a dit en quoi consiste cette plénitude (S. Th., 3a, q. 27, art. 5). Et comme la grâce est la dot de l’âme et la condition de son union à Dieu, celle qui est pleine de grâce est pleinement à Dieu, pleinement avec Dieu ; elle est sainte non seulement par ses privilèges, mais par ses vertus. « Le Seigneur est avec vous ; vous êtes bénie entre les femmes. »
L’ange ne dit rien de plus. La salutation était plus large que toutes celles adressées dans l’Ancien Testament, l’attitude de l’ange infiniment respectueuse, la Vierge infiniment humble. Joignons ensemble tous ces éléments, et nous aurons la raison de la prudente réserve de Notre-Dame. Lorsqu’on remarque qu’elle fut troublée à ces paroles de l’ange, cela veut dire qu’elle demeura indécise sur ce qu’elle devait répondre. Et, gardant le silence, elle recherchait, à part elle, ce que pouvait signifier une telle salutation. Encore une fois, elle est humble, elle est prudente : l’ange l’a abordée comme une reine, mais il n’a encore rien dit de son message divin.
En face de ce silence, qui contenait une interrogation muette, Gabriel reprit la parole. Le ne timeas n’a pas pour dessein de bannir une crainte proprement dite, mais seulement d’exclure même le trouble et l’indécision que nous venons de décrire. Cette fois Notre-Dame est appelée par son nom : « Ne craignez point, Marie, car vous avez trouvé grâce devant Dieu. » La faveur de Dieu, la tendresse de Dieu, qui est souveraine, qui est gracieuse, qui est active, s’est reposée sur elle. La même expression a été employée au sujet de Noé, qui bâtit l’arche du salut : Noe vero invenit gratiam coram Domino (Gn 6, 8). Mais il s’agit aujourd’hui d’une faveur plus haute, d’une arche plus sainte, d’un salut plus complet. La Sainte Vierge connaissait les Écritures ; elle avait lu et médité, au chapitre 7 d’Isaïe, des expressions que l’ange emploie à son tour. « Voici que la Vierge concevra et enfantera un Fils, et on l’appellera Emmanuel. » — « Voici, dit l’ange, que vous concevrez dans votre sein et que vous enfanterez un Fils, et vous l’appellerez Jésus. » Le parallélisme était flagrant. Emmanuel, « Dieu avec nous », c’était l’équivalent de Jésus, « Dieu Sauveur ».
Observons par quels traits l’ange dessine la mission du Fils de la Vierge. Il sera grand : il sera appelé, parce qu’il sera réellement, Fils du Très-Haut. L’ange ne dit pas : le Fils du Très-Haut. Ses paroles semblent calculées pour marquer une relation intime avec Dieu, sans exprimer encore nettement la filiation divine et la seconde personne de la très Sainte Trinité. — Le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David, son père. Il régnera pour les siècles sur la maison de Jacob, et son règne n’aura point de fin. Remarquons les termes et l’étendue de la prophétie. C’est chose extraordinaire que cet enfant, qui n’est pas né encore, soit promis à sa Mère comme un roi, et comme un roi éternel, en dépit de l’humiliation à laquelle était réduit, à cette époque, le peuple juif tout entier. Peut-être avons-nous le droit de remarquer aussi que cette prophétie s’est accomplie, qu’elle s’accomplit chaque jour encore, qu’elle est partiellement inachevée, et que le temps ne dure que pour lui donner le loisir de sa pleine réalisation.
Il semble que Notre-Dame, même avant la salutation angélique, aurait dû se reconnaître comme prédestinée à devenir la Mère de Dieu. Elle connaissait admirablement les Livres Saints ; elle était pleine de grâce ; elle savait que les temps étaient venus ; elle était de la famille de David ; le Messie devait naître d’une vierge : or il lui avait été inspiré de vouer, la première, sa virginité à Dieu. Tous les indices semblaient donc réunis. Comment ne s’est-elle pas demandé : « Mais n’est-ce pas de moi qu’il est question ? » Elle ne se l’est pas demandé. Les humbles s’ignorent. Peut-être avait-elle souhaité seulement d’être la servante de la Mère du Messie. Et la salutation de l’ange, si claire pour nous après l’événement, ne fit pas sortir la Vierge de cette divine ignorance d’elle-même. Après tout, il y avait moyen d’interpréter les paroles angéliques de manière à demeurer en deçà d’une grandeur à laquelle elle n’avait jamais songé. Aussi longtemps qu’il demeurait une imprécision, une part d’obscurité dans le message divin, ce serait une retraite, un abri où se réfugierait l’humilité de la Vierge. Y a-t-il au monde un spectacle plus beau que celui-là ? Dieu, qui y était attentif, dut s’y complaire. Nous aussi, perdons-nous dans cette splendeur. — Voici comment on pourrait traduire cet incomparable malentendu : « Dieu, par l’ange, me promet un fils. Il sera glorieux. Mais puisque l’ange n’a pas dit formellement qu’il est le Messie, qu’il est le Fils de Dieu, ce sera un roi comme les autres, un homme comme les autres. Il naîtra d’une femme, non d’une vierge. Or, j’ai voué à Dieu mon corps et mon âme ; mon mariage n’est qu’un voile, et mon époux le gardien prédestiné de ma virginité. Comment donc pourra s’accomplir la promesse angélique, puisque j’ai fait vœu de n’être à aucun homme ? » Quomodo fiet istud, quoniam virum non cognosco ?
Dans la réponse de l’ange, nous entendons la réponse de Dieu. Le Fils qui sera donné à Marie ne sera pas le fruit d’un commerce humain : le vœu de virginité demeurera donc sauf. « C’est l’Esprit de Dieu, l’Esprit-Saint, qui descendra sur vous ; c’est la force du Très-Haut qui vous couvrira de son ombre. » Le texte grec est susceptible de plusieurs interprétations. La Vertu de Dieu, c’est-à-dire le Fils de Dieu, vous demandera son voile, sa nature humaine, l’ombre dont il s’enveloppera pour se rendre visible aux regards humains ; la Vertu de Dieu, le Fils de Dieu, entrera en vous, comme on entre dans sa demeure ; il se reposera à l’ombre de votre sein ; il sera, par vous, Dieu avec nous, Emmanuel, beaucoup plus vraiment que dans le Saint des Saints et à l’ombre des grands chérubins qui étendent leurs ailes sur le propitiatoire ; une troisième interprétation, celle qui est commune, et préférable, semble-t-il, reconnaît qu’il est question encore du Saint-Esprit, comme dans la première partie du verset ; nous aurions affaire à un cas de parallélisme synthétique et d’équivalence entre Spiritus Sanctus superveniet in te et Virtus Altissimi obumbrabit tibi. Par deux fois, l’ange a voulu signifier la pureté virginale de la conception promise. Ce n’est point l’homme, c’est Dieu seul, c’est la sainteté et la pureté de Dieu qui interviendra. Esprit-Saint et Vertu du Très-Haut indiquent tous deux une même réalité : Dieu dans sa sainteté et son pouvoir infini, en un mot l’élément actif de cette création surnaturelle. Les paroles qui suivent marquent le résultat, le fruit béni de cette action : « C’est pourquoi l’enfant qui doit naître sera appelé Saint et Fils de Dieu. » Le Fils de Dieu prendra, grâce à Notre-Dame, sa place dans la création, sa place, la première et l’unique, dans la famille humaine : Ut sit ipse primogenitus in multis fratribus (Rm 8, 29).
Il y a une grande différence entre l’accueil fait par Zacharie au message angélique : « Comment saurai-je qu’il en sera ainsi ? » et celui de la Sainte Vierge : « Comment cela se fera-t-il ? » Aucun doute n’effleure l’âme de Notre-Dame ; elle demande seulement à l’ange comment, dans sa vie, se pourront concilier deux devoirs : celui de l’obéissance et celui de son vœu. Néanmoins, nous remarquerons que Dieu use, dans l’un et l’autre cas, du même procédé. Il traite sa créature avec respect ; il lui donne un signe, c’est-à-dire une preuve de ses dires et une garantie de la foi qu’il réclame. Ainsi, ses témoignages sont croyables à l’infini : Testimonia tua credibilia facta sunt nimis. Ce signe, la Sainte Vierge ne le sollicitait pas : il lui fut gracieusement accordé. Pour obtenir son consentement, l’ange en appelle à une autre conception miraculeuse : Votre parente Élisabeth, elle aussi, a conçu un fils dans sa vieillesse ; depuis six mois déjà elle le porte en son sein, elle, la stérile. Car nulle parole prononcée par Dieu, nulle promesse sortie de ses lèvres ne sera jamais trahie, ni démentie, ni inexécutée.
II y avait un intérêt extrême, pour l’humanité et pour Dieu même, à ce que la Sainte Vierge donnât son adhésion au mystère. Lorsqu’il s’agit d’union et de mariage, il doit y avoir un consentement libre des deux parties. L’union hypostatique n’échappe pas à cette loi. C’est une union : ce n’est pas une conquête, ni une contrainte, une sorte de mainmise violente, où ne seraient point respectés les droits et la dignité d’un des contractants. Dieu, nous l’avons dit, traite sa créature avec égards. Or, ce consentement indispensable à l’Incarnation, Dieu ne pouvait le demander ni à la portion de l’humanité qui avait précédé et qui n’existait plus ; ni à la portion qui existait alors et qu’on ne pouvait plébisciter pour savoir si elle consentait à l’union divine ; ni à la portion future de l’humanité. On ne pouvait non plus consulter la nature humaine individuelle que devait revêtir le Verbe : elle n’existait pas encore, et c’était précisément en vue de son existence que le consentement était sollicité. Voilà donc les destinées du monde suspendues aux lèvres et au cœur de Notre-Dame. Entendons l’Église, dans sa liturgie, la supplier de consentir à Dieu : Suscipe verbum, Virgo Maria, quod tibi a Domino per angelum transmissum est… Monde créé et monde incréé, tous les deux sont anxieux, attentifs, épiant la réponse de la Vierge, qui, pour tous deux, sera décisive. Ce n’est pas un rêve arbitraire, mais la doctrine de saint Thomas d’Aquin : l’Annonciation, dit-il, était convenable : « Pour montrer ainsi un certain mariage spirituel entre le Fils de Dieu et la nature humaine. Et voilà pourquoi l’annonciation demandait le consentement de la Vierge représentant toute la nature humaine » (S. Th., IIIa, q. 30, art. 1). La Sainte Vierge n’ignorait pas ce que devait impliquer pour elle la maternité divine. Dieu n’a pas surpris sa Mère. Elle savait, par l’Écriture, sur quelles épines nues son cœur serait traîné. C’est, non les yeux fermés, mais les yeux ouverts, l’âme avertie et pleinement consciente, qu’elle adhère au vouloir du Seigneur.
La condition faite à Notre-Dame par l’Incarnation entraîne deux conséquences, qu’il nous suffira ici d’indiquer. La première, c’est que jamais fils n’a été le bien de sa mère autant que le Seigneur l’a été de Marie. La virginité de Notre-Dame attache son Fils à elle toute seule, à elle exclusivement, comme le fruit de sa pureté ; il est le Fils de sa chair et de sa volonté ; à lui elle a vraiment tout donné. Mais comment osons-nous parler de tels mystères ? Il nous faudrait pourtant ajouter encore qu’à l’heure même de l’Incarnation, Notre-Dame a concentré et ramassé en elle l’humanité entière ; que son âme a comme embrassé et enveloppé tout ce que nous sommes ; et qu’à l’exemple de son Fils, à raison du même acquiescement qui lui a été demandé par Dieu, nous sommes à elle comme nous ne sommes à personne. Elle est la Mère de tous les vivants, la nouvelle Ève. Comment peut-il demeurer une tristesse sur terre, depuis que l’éternité elle-même s’est inclinée, que les cieux se sont abaissés, que l’ange est venu au nom de Dieu, et que Notre- Dame et notre Mère lui a répondu simplement : « Je suis la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon votre parole » ?
Et l’ange se retira d’auprès d’elle. Et, en même temps que la Vierge disait à Dieu : Ecce ancilla Domini, dans une adoration parfaite, s’élevait de son sein une adoration plus parfaite encore. La Mère de Dieu se disait la servante du Seigneur ; le Fils de Dieu se disait l’esclave et le serviteur de Dieu. L’apôtre saint Paul nous l’a révélé : « Lorsque le Christ fit son entrée ici-bas, il dit : Vous ne vouliez plus d’hosties et d’oblations, alors vous m’avez donné un corps ; les holocaustes et les victimes pour le péché ne vous plaisaient point, alors j’ai dit : Me voici, selon qu’en tête du livre il est écrit de moi, pour faire, ô Dieu, votre volonté. » (Hbr 10, 5-7.) C’est au même instant que, du cœur du Fils comme de celui de la Mère, montait vers Dieu le parfum d’un même sacrifice, d’une même adoration.

Prières

Oratio

Præsta, quæsumus, omnípotens Deus : ut redemptiónis nostræ ventúra sollémnitas et præséntis nobis vitæ subsídia cónferat, et ætérnæ beatitúdinis præmia largiátur. Per Dóminum.

Oraison

Faites, nous vous le demandons, Seigneur : que la solennité approchant de notre rédemption nous apporte avec elle les grâces nécessaires pour la vie présente et nous obtienne la récompense du bonheur éternel.

Oratio

Festína, quæsumus, Dómine, ne tardáveris, et auxílium nobis supérnæ virtútis impénde : ut advéntus tui consolatiónibus sublevéntur, qui in tua pietáte confídunt : Qui vivis et regnas.

Oraison

Hâtez-vous, Seigneur, nous vous le demandons, ne tardez plus : assistez-nous de la force d’en haut pour que votre venue réconforte ceux qui se confient en votre bonté.

Prière de Sainte Gertrude d’Helfta (1256-1301)

Salut, Marie, Reine de clémence, Olivier de miséricorde, vous par qui nous est venu le Remède de vie ; Reine de clémence, Vierge et Mère du divin Rejeton, vous par qui nous est venu le Fils de l’éternelle lumière, l’odorant Rejeton d’Israël. Ah ! Puisque, par votre Fils, vous êtes devenue la véritable Mère de tous les hommes dont lui, votre unique, n’a pas dédaigné devenir le frère ; ainsi maintenant, pour son amour, recevez-moi, malgré mon indignité, en votre amour de Mère : aidez ma foi, conservez-la et fortifiez-la. Et ainsi maintenant, soyez pour moi la marraine de mon renouvellement et de ma foi, afin d’être pour l’éternité mon unique et très aimante Mère toujours affectueuse ; accordez-moi vos soins en cette vie, et recevez-moi à la plénitude de votre maternité à l’heure de ma mort. Ainsi soit-il.

Antienne

Ã. Missus est Gabrihel Angelus ad Mariam virginem, desponsatam Ioseph.

Ã. L’Ange Gabriel fut envoyé à la Vierge Marie, qu’avait épousée Joseph.

Antienne grégorienne “Missus est”

Antienne Missus est

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3ème dimanche de l’Avent — Gaudete

3ème dimanche de l’Avent — Gaudete

3ème dimanche de l’Avent — Gaudete

Le mot de Dom Delatte

La joie n’est pas une vertu, parce qu’elle n’est pas une disposition directement opérative ; mais elle est l’atmosphère de la vertu, l’indice, le fruit, la cause, la mesure, la condition de la charité.

Commentaire de l’épître du jour (Phil 4, 4-9) par Dom Paul Delatte

D’après le Docteur Angélique la joie vient ou d’un bonheur possédé par nous, ou d’un bonheur assuré à ce que nous aimons. En effet, aimer c’est mettre son bonheur dans le bonheur d’un autre. Et Dieu étant avec nous, et Dieu étant heureux, la joie doit être au centre même de toute vie chrétienne. Elle est assurée si nous prenons notre foi au sérieux. La joie n’est pas une vertu, parce qu’elle n’est pas une disposition directement opérative ; mais elle est l’atmosphère de la vertu, l’indice, le fruit, la cause, la mesure, la condition de la charité. Elle en est aussi le rayonnement comme elle est le premier fruit de l’Esprit. Aucun précepte, plus que ce précepte de la joie qui vient de la charité, n’était de nature à effacer toutes les dissonances qui affligeaient la communauté de Philippes : mais le précepte de la joie va plus loin, et dessine une attitude de la vie chrétienne. La joie est la condition de tout bien. Nous l’avons dit déjà, nous ne sommes fidèles, nous ne sommes aimants, nous ne sommes délicats, nous ne sommes reconnaissants, nous ne sommes persévérants que dans la joie. Nous puisons la joie aux sources mêmes de la vie chrétienne. Une religion se traduit par le caractère de ses préceptes. Et en même temps qu’il révèle toute la religion, le précepte de la joie révèle Dieu, comme le précepte de l’abnégation, comme le précepte de la paix, comme le précepte de la prière, comme le précepte de la charité : en même temps qu’ils sont la norme de notre vie, tous ces éléments nous définissent la religion, et Dieu même. Dieu seul et le christianisme prescrivent la joie, parce que seuls ils la motivent.

Mais nous n’avons pas le droit de nous écarter du texte. Le Seigneur avait dit déjà : Nolite fieri sicut hypocritae, tristes. On ne sert pas Dieu avec un air maussade. L’Apôtre ajoute : Réjouissez-vous. C’est l’objet du précepte : la joie ; puis la qualité de cette joie, son motif : Réjouissez-vous dans le Seigneur. Quand faut-il se réjouir ? Toujours. Et après, que faut-il faire ? Il semble qu’après avoir prescrit la joie, il y avait place pour un autre devoir et une autre prescription; mais l’Apôtre a foi dans la suffisance de la joie seule : Je vous le dis de nouveau : réjouissez-vous. Cela suffit. Lorsque l’âme est joyeuse, elle est bienveillante aussi. La charité s’exerce spontanément et d’elle-même. Même elle est contagieuse, la joie. Ceux qui ont de la joie en donnent tout autour d’eux. Il n’y a plus alors de dissidences possibles. S’il en est autrement, le bruit des discussions s’entend à l’extérieur, et crée contre nous un préjugé ; les païens se disent alors : Ils nous ressemblent, ils ont leurs divisions et leurs rivalités, eux aussi. Qu’un sage esprit de mesure et de douceur, répandu sur toute notre vie, se laisse donc apercevoir de tous les hommes. L’effacement de l’égoïsme, la charité mutuelle sont un motif de crédibilité, les âmes vont si volontiers là où on s’aime. Mais le motif de cette douceur et de cette mesure est plus profond que l’édification elle-même : le Seigneur est proche. Il est tout près. Il est intime. Il vit en nous. Nous vivons dans un sanctuaire vivant et incréé, où les attitudes et les mouvements doivent être mesurés et définis par le respect.

N’ayez pas l’âme divisée par des soucis et des inquiétudes, par toutes les anxiétés ou préoccupations du lendemain (Mt 6, 25). En toute chose, nous dit l’Apôtre, en toute circonstance, que vos prières et vos demandes exposent à Dieu vos besoins : et que votre prière soit toujours mêlée de reconnaissance pour les bienfaits obtenus. Ainsi votre âme cessera d’être partagée et déchirée par des soucis que vous aurez confiés à Dieu. Ainsi au milieu même des épreuves et des anxiétés d’ici-bas, la paix de Dieu régnera sur toute votre vie, la paix qui surpasse tout sentiment.

Peut-être le commentaire, d’ailleurs très vrai et très aimable, habituellement donné à ce passage trahit-il quelque peu le sens littéral. La pensée de l’Apôtre nous semble celle-ci : en face des problèmes qui s’offrent à nous, notre premier mouvement, et il est très légitime, est de faire appel aux ressources de notre esprit pratique, d’étudier les voies, moyens et combinaisons qui pourront nous tirer d’affaire. Sans blâmer aucunement cette disposition naturelle, et de peur qu’elle ne devienne naturaliste, l’Apôtre nous avertit qu’il y a quelque chose qui l’emporte sur la sagesse de nos réflexions et sur nos combinaisons les plus profondes : c’est le repos en Dieu, l’attachement à Dieu, en un mot la paix de Dieu.

Ayons donc moins confiance en nous qu’en elle. C’est elle qui gardera nos cœurs et nos pensées à l’abri de l’anxiété, et formera autour de notre vie comme une sorte de clôture divine d’où nous ne sortirons jamais. Nous y sommes avec Dieu. C’est parce qu’il craint d’oublier un conseil utile à ses chers Philippiens que l’Apôtre résume rapidement (8 et 9) tout l’ensemble pratique des devoirs du christianisme toujours menacés dans les divisions, petites et grandes : Que tout ce qui est vrai et saint, tout ce qui est juste et pur, tout ce qui est aimable et digne d’éloges, tout ce qui est vertu et objet de louange, soit l’objet habituel de vos pensées. Et si ce programme abstrait vous semble trop peu précis, songez à tout ce que vous avez appris et reçu de moi, à tout ce que votre souvenir vous rappellera de mes paroles et de mes actes ; mettez-le en pratique, et le Dieu de la paix, de cette paix chrétienne un instant menacée, sera toujours avec vous.

Humilité de Saint Jean-Baptiste (Io 1, 19-28) : homélie de Saint Grégoire le Grand

Les paroles de l’évangile d’aujourd’hui nous font valoir l’humilité de Jean. Lui dont la vertu était si grande qu’on aurait pu le prendre pour le Christ, il choisit de rester sagement dans son rôle, sans se laisser follement entraîner par l’opinion humaine au-dessus de lui-même. « Il reconnut, il ne nia pas, il reconnut : « Je ne suis pas le Christ. » En déclarant : « Je ne suis pas », il a clairement nié ce qu’il n’était pas, mais il n’a pas nié ce qu’il était, afin qu’en disant la vérité, il devînt membre de celui dont il ne revendiquait pas faussement le nom. Parce qu’il ne voulut pas chercher à prendre le nom du Christ, il devint membre du Christ. En s’appliquant à reconnaître humblement sa propre faiblesse, il mérita de participer vraiment à la grandeur du Christ.
Après avoir déclaré n’être pas un prophète — car il pouvait non seulement prédire le Rédempteur, mais aussi le montrer — Jean explique aussitôt qui il est, en ajoutant : « Je suis la voix de celui qui crie dans le désert. »
Vous savez, frères très chers, que le Fils unique est appelé le Verbe du Père, comme Jean l’atteste en disant : « Au commencement était le Verbe, et le Verbe était auprès de Dieu, et le Verbe était Dieu. » (Io 1, 1) Vous savez, pour avoir vous-même parlé, que la voix doit commencer par retentir pour que le verbe puisse être entendu. Jean affirme donc être la voix, parce qu’il précède le Verbe. Devançant l’avènement du Seigneur, Jean est appelé la voix, du fait que par son ministère, le Verbe du Père est entendu des hommes. Il crie dans le désert, puisqu’il annonce à la Judée abandonnée et désertée que le Rédempteur va la consoler.
Mais que crie-t-il ? Ce qu’il ajoute nous le fait savoir : « Rendez droit le chemin du Seigneur, comme l’a dit le prophète Isaïe. » Le chemin du Seigneur vers le cœur de l’homme est rendu droit quand celui-ci écoute humblement la parole de vérité. Le chemin du Seigneur vers le cœur est rendu droit quand celui-ci dispose sa vie dans le sens des préceptes. C’est pourquoi il est écrit : « Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole, et mon Père l’aimera, et nous viendrons à lui, et nous ferons en lui notre demeure. » (Io 14, 23)
Quiconque gonfle son esprit d’orgueil, quiconque est étouffé par les ardeurs de l’avarice, quiconque se souille des avilissements de la luxure, ferme la porte de son cœur à la vérité ; il se retranche en son âme par les verrous de ses vices afin d’empêcher le Seigneur de venir à lui.
Ceux qui étaient envoyés demandèrent encore : « Pourquoi donc baptises-tu, si tu n’es ni Élie, ni le Christ, ni un prophète? » Ils ne disent pas cela par désir de connaître la vérité, mais par malice et hostilité, comme l’évangéliste le donne à entendre implicitement, en ajoutant : « Ceux qui avaient été envoyés étaient des pharisiens. » C’est comme s’il disait clairement : « Ces hommes qui interrogent Jean sur ses actes sont incapables de chercher un enseignement, ils ne savent que jalouser. »
Cependant, un saint ne se détourne pas de son ardeur au bien, même quand on l’interroge avec perversité. C’est pourquoi Jean répond encore aux paroles de jalousie par des enseignements porteurs de vie. Il ajoute en effet aussitôt : « Moi, je baptise dans l’eau ; mais au milieu de vous, se trouve quelqu’un que vous ne connaissez pas. » Ce n’est pas dans l’esprit, mais dans l’eau que Jean baptise. Impuissant à pardonner les péchés, il lave par l’eau le corps des baptisés, mais ne lave pourtant pas l’esprit par le pardon. Pourquoi donc baptise-t-il, s’il ne remet pas les péchés par son baptême ? Pourquoi, sinon pour rester dans la ligne de son rôle de précurseur ? De même qu’en naissant, il avait précédé le Seigneur qui allait naître, il précédait aussi, en baptisant, le Seigneur qui allait baptiser ; lui qui avait été le précurseur du Christ par sa prédication, il le devenait également en administrant un baptême qui était l’image du sacrement.
Jean a ici annoncé un mystère, lorsqu’il a déclaré à la fois que le Christ se tenait au milieu des hommes et qu’il n’en était pas connu, puisque le Seigneur, quand il se montra dans la chair, était à la fois visible en son corps et invisible en sa majesté. Parlant du Christ, Jean ajoute : « Celui qui vient après moi a passé devant moi. » Il dit : « Il a passé devant moi », comme s’il disait : « Il a été placé devant moi ». Il vient donc après moi, puisqu’il est né après ; mais il a passé devant moi, parce qu’il m’est supérieur. Traitant cette question un peu plus haut, il a expliqué les causes de la supériorité du Christ lorsqu’il a précisé : « Car il était avant moi » (Io 1, 16), comme pour dire clairement : « S’il l’emporte sur moi, alors qu’il est né après moi, c’est que le temps de sa naissance ne le resserre pas dans des limites : né d’une mère dans le temps, il est engendré par le Père hors du temps. »
Jean manifeste quel humble respect il lui doit, en poursuivant : « Je ne suis pas digne de dénouer la courroie de sa sandale. » Il était de coutume chez les anciens que si quelqu’un refusait d’épouser une jeune fille qui lui était promise, il dénouât la sandale de celui à qui il revenait d’être son époux par droit de parenté. Or le Christ ne s’est-il pas manifesté parmi les hommes comme l’Époux de la sainte Église? Et n’est-ce pas de lui que Jean affirme : « Celui qui a l’épouse est l’époux. » (Io 3, 29). Mais parce que les hommes ont pensé que Jean était le Christ — ce que Jean lui-même nie — il se déclare avec raison indigne de dénouer la courroie de sa chaussure. C’est comme s’il disait clairement : « Je ne peux pas mettre à nu les pieds de notre Rédempteur, puisque je ne m’arroge pas à tort le nom d’époux. »
Mais on peut aussi comprendre cela d’une autre façon. Qui ne sait, en effet, que les sandales sont faites de cuir d’animaux morts ? Or le Seigneur, venant en son Incarnation, s’est pour ainsi dire manifesté les sandales aux pieds, car il a assumé en sa divinité ce qu’il y a en nous de mortel et de corruptible. C’est pourquoi il dit, par la bouche du prophète : « J’étendrai ma sandale sur l’Idumée. » (Ps 60, 10). L’Idumée désigne les païens, et la sandale, notre condition mortelle assumée par le Seigneur. Il affirme donc qu’il étend sa sandale sur l’Idumée, parce que se faisant connaître aux païens en la chair, sa divinité est en quelque sorte venue à nous les sandales aux pieds. Mais de cette Incarnation, l’œil humain est impuissant à pénétrer le mystère. Il ne peut en effet absolument pas saisir comment le Verbe prend un corps, comment l’être spirituel le plus haut, qui est source de la vie, prend une âme dans le sein d’une mère, comment celui qui n’a pas de commencement vient à l’existence et est conçu. La courroie de la sandale, c’est le lien de ce mystère. Jean ne peut dénouer la courroie de la sandale du Seigneur, car même lui qui a connu l’Incarnation par l’esprit de prophétie, il demeure impuissant à en sonder le mystère. Et pourquoi dire : « Je ne suis pas digne de dénouer la courroie de sa sandale », sinon pour reconnaître ouvertement et humblement son ignorance ? C’est comme s’il disait clairement : « Comment s’étonner qu’il me soit supérieur, puisque même si je vois bien qu’il est né après moi, je ne peux saisir le mystère de sa naissance ? » Voilà comment Jean, tout rempli qu’il soit de l’esprit de prophétie, et admirable par l’éclat de sa science, nous fait pourtant savoir son ignorance.
À ce propos, frères très chers, nous devons considérer et méditer très attentivement la conduite des saints : même quand ils savent certaines choses d’une manière admirable, ils tâchent de se remettre devant les yeux de l’esprit ce qu’ils ne savent pas, afin de conserver en eux la vertu d’humilité. S’examinant ainsi du côté où ils sont faibles, ils empêchent leur âme de s’élever du côté où elle est parfaite. Car si la science de Dieu est une vertu, l’humilité est la gardienne de la vertu. Il ne reste donc qu’à humilier notre esprit en tout ce qu’il sait, pour lui éviter de se voir arracher par le vent de l’orgueil ce que sa vertu de science avait rassemblé.
Quand vous faites le bien, mes frères, rappelez-vous toujours ce que vous avez fait de mal : votre âme, ayant ainsi la prudence de prêter attention à ses fautes, n’aura jamais l’imprudence de se complaire dans ses bonnes actions. Estimez vos proches meilleurs que vous, surtout ceux dont vous n’avez pas la charge ; car même si vous les voyez commettre quelque mal, vous ignorez tout ce qui se cache de bien en eux.
Efforcez-vous d’être grands, mais ignorez pourtant, d’une certaine manière, que vous l’êtes, pour ne pas perdre cette grandeur par la suffisance que vous mettriez à vous l’attribuer. N’est-ce pas ce que dit le prophète : « Malheur à vous qui êtes sages à vos propres yeux et avisés selon votre propre sens. » (Is 5, 21). Et Paul déclare : « Ne vous prenez pas pour des gens avisés. » (Rm 12, 16).
Si donc les saints, même quand ils accomplissent des actions courageuses, ont d’humbles sentiments d’eux-mêmes, que diront pour leur excuse ceux qui se gonflent d’orgueil sans pratiquer la vertu ? Mais quelles que soient les bonnes œuvres qu’on réalise, elles sont sans valeur si elles ne sont assaisonnées d’humilité : une action admirable accomplie avec orgueil ne nous élève pas, mais nous appesantit davantage. Celui qui cumule les vertus sans humilité est semblable à un homme qui porte de la poussière en plein vent, et qui en est d’autant plus aveuglé qu’il paraît en porter davantage. En tout ce que vous faites, mes frères, conservez donc l’humilité, comme racine obligée de vos bonnes œuvres. Ne regardez pas ceux que vous avez déjà dépassés, mais ceux qui vous dépassent encore, pour qu’en vous proposant les meilleurs en exemple, vous puissiez monter toujours plus haut grâce à l’humilité.

Prières

Oratio

Aurem tuam, quǽsumus, Dómine, précibus nostris accómmoda : et mentis nostræ ténebras, grátia tuæ visitatiónis illústra : Qui vivis.

Oraison

Seigneur, prêtez l’oreille à nos prières : et quand vous nous ferez la grâce de venir parmi nous, apportez votre lumière dans l’obscurité de nos âmes.

Prière de Saint Anselme de Cantorbéry (1033-1109)

Mon Dieu et mon Seigneur, mon espoir et la joie de mon cœur, dites à mon âme si sa joie est celle dont vous nous dites par votre Fils : « Demandez et vous recevrez : ainsi vous serez comblés de joie ». J’ai trouvé, en effet, une joie pleine et plus que pleine, car le cœur, l’esprit, l’âme, tout mon être étant rempli de cette joie, elle abondera encore sans mesure. Ce n’est pas elle qui entrera en ceux qui se réjouissent ; ce seront plutôt eux qui entreront de tout leur être en elle. Parlez, Seigneur ! Dites à votre serviteur, au fond de son cœur, si ce que j’éprouve est bien la joie dans laquelle entreront ceux qui goûteront la joie même de leur Maître (Mt 25, 21). Mais cette joie dont jouiront vos serviteurs, « nul œil ne l’a vue, nulle oreille ne l’a entendue, le cœur de l’homme ne l’a pas sentie s’élever en lui » (1 Co 2, 9). Je vous prie donc, mon Dieu, de me donner de vous connaître, de vous aimer, pour qu’en vous je sois dans la joie. Et si je ne le peux pas pleinement en cette vie, faites-moi avancer maintenant jusqu’à ce que j’y entre pleinement un jour. Que ma connaissance de vous ici-bas grandisse, pour qu’elle puisse arriver à la plénitude où vous êtes. Que mon amour pour vous croisse ici pour être total là-haut. Que maintenant ma joie soit immense en espérance, pour être alors totale en réalité. Seigneur, vous ordonnez par votre Fils que nous demandions, et vous promettez que nous recevrons, afin que notre joie soit parfaite. Faites grandir ma faim de cette joie, afin que j’y entre ! Ainsi soit-il.

Antiennes

Ã. Iuste et pie vivamus exspectantes beatam spem et adventum Domini.
Ã. Vivons avec justice et piété, attendant la bienheureuse espérance et l’avènement du Seigneur.

Antienne grégorienne “Iuste et pie”

Antienne Iuste et pie

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2ème dimanche de l’Avent

2ème dimanche de l’Avent

2ème dimanche de l’Avent

Le mot de Saint Alphonse

Prenez l’habitude de vous entretenir seul à seul avec Dieu, familièrement, avec confiance et amour, comme avec l’ami le plus cher que vous ayez, et le plus affectueux.

Sermon

Message de Saint Jean-Baptiste au Christ (Mt 11, 2-6) : commentaire de Dom Delatte

Depuis de longs mois, saint Jean-Baptiste était incarcéré à Machéronte. Hérode Antipas lui témoignait quelque déférence et s’entretenait avec lui volontiers (Mc 6, 20). La captivité de Jean n’était pas tellement rigoureuse que ses disciples n’eussent accès auprès de lui. Ils lui racontèrent ce qui se passait dans la Galilée : comment Jésus de Nazareth accomplissait de grands prodiges, entraînait des foules à sa suite, accueillait les pécheurs, faisait bon marché de la casuistique des pharisiens et entrait en conflit avec eux. Les récits qui passent par beaucoup de bouches se teignent, en chemin, des dispositions variées de chacun et, finalement, sont de moins en moins d’accord avec la réalité. N’oublions pas les sentiments de rivalité qui animaient certains disciples de Jean à l’égard des disciples du Seigneur, et un peu à l’égard du Seigneur lui-même (Io 3, 25-26) ; ces dispositions n’avaient pu que s’accentuer après l’emprisonnement du Précurseur. On conçoit bien que les rapports qui parvenaient à celui-ci fussent très divers. Quoi qu’il en soit, saint Jean manda un jour deux de ses disciples et les députa vers Jésus, avec mission de lui demander : « Êtes-vous celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre? »

La question est reproduite dans les mêmes termes par les deux évangélistes. Elle crée une difficulté réelle et les solutions sont diverses. Écartons d’abord celle de Tertullien, pour qui la foi de saint Jean-Baptiste aurait subi une réelle éclipse, par soustraction de la lumière du Saint-Esprit. Si Jean-Baptiste n’avait pas cru au Seigneur, il ne lui aurait pas envoyé d’ambassade ; il eût été puéril d’aller demander à un homme de qui l’on doute un témoignage sur son propre cas ! Et quelle démonstration aurait pu convaincre celui que ni la voix céleste, ni la vue de la colombe, ni la parole intérieure n’avaient pu persuader ? — L’explication qui a rallié le plus de suffrages, et celui notamment de saint Jean Chrysostome, veut que l’intention de saint Jean ait été d’éclairer ses disciples, et non lui-même ; de rendre ainsi sous une forme détournée un nouveau témoignage au Seigneur. Ils étaient étonnés, scandalisés, et ne reconnaissaient point en Jésus le signalement du Messie. « Allez donc le voir, aurait dit saint Jean, rendez-vous compte par vous-mêmes, et demandez-lui la lumière. » Mais ici encore le texte de l’évangile semble contraire : c’est bien de Jean-Baptiste que vient la question, c’est à lui que la réponse est adressée. D’ailleurs, étant donné l’état d’esprit des disciples de Jean, son autorité était plus efficace que toute autre pour les convaincre.

Cherchons encore. Sans doute, la foi de saint Jean demeure intacte ; il ne peut démentir, lui, le saint incomparable, l’acte de foi si complet qui a commencé son ministère ; mais il est encore un homme. Il touche à la fin de sa vie : c’est l’heure des tentations suprêmes, de celles qui éprouvent et couronnent la sainteté. Il advient parfois aux meilleurs ouvriers de Dieu d’être visités, vers la dernière heure de leur vie, par une tentation redoutable : une sorte de vision du néant : « Si je m’étais trompé! Si ma vie était vaine! S’il n’y avait ni Dieu, ni âme, ni éternité… » Ainsi leur est demandé un acte de foi qui scelle définitivement leur persévérance et leur fidélité. Or, la captivité de Jean-Baptiste se prolonge; le roi impudique auquel il a rappelé la loi divine n’a pas obéi à ses réclamations ; celui-là même dont il connaît bien et la personne et la mission, cet Agneau de Dieu qu’il a désigné du doigt comme étant le Sauveur d’Israël, pourquoi tarde-t-il? pourquoi s’est-il retiré dans l’obscurité de la Galilée? pourquoi consent-il à entrer dans toutes ces contestations avec la Synagogue, au lieu de fonder le Royaume de Dieu?… Ce ne serait qu’une tentation, très compatible avec la fidélité profonde du Précurseur. Et la preuve de cette fidélité demeure impliquée dans la démarche même qu’il provoque : il s’adresse directement au Seigneur, à celui-là seul qui peut dissiper les ombres et à qui l’âme de Jean est attachée pour l’éternité. Le Seigneur lui-même n’a-t-il pas éprouvé quelque chose de cette angoisse dernière : « Maintenant, mon âme est troublée ; et que dirai-je? Père, sauvez- moi de cette heure » (Io 12, 27). Et dans son agonie, il disait : « Mon Père, s’il est possible, que ce calice s’éloigne de moi » (Mt 26, 39) : il savait bien, pourtant, que le programme de son Père et le sien exigeaient son sang et sa mort. Dans le cas de saint Jean-Baptiste, il s’agit moins, peut-être, d’une tentation que d’une pieuse impatience, d’un vif désir de voir en lui la vraie lumière se donner au monde : « Pourquoi ne venez-vous pas au plus tôt? Pourquoi cette lenteur et cette discrétion calculées? Devons-nous donc espérer en un autre qu’en vous? » Ce qui signifie : Vous êtes l’unique Sauveur et Seigneur, les âmes vous attendent : Veni, Domine Jesu !

Les disciples de saint Jean viennent donc au Seigneur et s’acquittent fidèlement de leur message : « Jean-Baptiste nous a envoyés vers vous, et vous demande : Êtes-vous celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre? » Et le Seigneur commence par leur donner une leçon de choses. À l’heure même, il multiplie les miracles et les bienfaits ; il guérit les malades et les infirmes, chasse les esprits mauvais ; à nombre d’aveugles il rend la vue. Puis, s‘adressant aux deux disciples : « Allez, leur dit-il, rapportez à Jean ce que vous avez vu et entendu : les aveugles voient, les boiteux marchent, les sourds entendent, les morts ressuscitent, la bonne nouvelle est annoncée aux humbles. » Tout cela était l’accomplissement d’une prophétie d’Isaïe (35, 5-6). Les temps messianiques sont donc ouverts. Et ce qui est surtout caractéristique, ce qui est l’œuvre spéciale du Messie, c’est la sollicitude qu’il témoigne aux petits, aux humbles, aux méprisés, à ceux dont la vie ne compte que devant Dieu : Pauperes evangelizantur (cf. Is 61, 1). Les disciples de saint Jean, sinon saint Jean lui-même, peuvent trouver, dans cette réponse aimable et symbolique, la solution de toutes leurs difficultés. Non, le Messie n’est pas éloigné ; non, il ne faut pas attendre un autre Sauveur que Jésus de Nazareth ; non, l’Agneau ne se dérobe pas à sa mission, il poursuit doucement la longue série de miracles et d’enseignements qui doit lui concilier les âmes de bonne volonté. Mais il en est qui ne consentiront point à l’accueillir, et qui, trompés par leur fausse conception du Messie, trouveront occasion de ruine dans cela même qui était ménagé pour leur salut. « Heureux, dit le Seigneur, celui qui ne sera pas scandalisé à mon sujet ! » Voyons dans cette remarque non pas une leçon voilée à l’adresse du Précurseur, mais plutôt une allusion à tous ceux pour qui Jésus sera « une pierre d’achoppement » et de scandale, à la Synagogue notamment.

Prières

Oratio

Excita, Dómine, corda nostra ad præparándas Unigéniti tui vias : ut, per eius advéntum, purificátis tibi méntibus servíre mereámur : Qui tecum.

Oraison

Excitez, Seigneur, nos cœurs pour préparer la route à votre Fils unique, afin que sa venue nous permette de vous servir avec une âme plus pure.

Prière de Dom Prosper Guéranger (1805-1875)

Venez, ô Messie, rétablir l’harmonie primitive ; mais daignez vous souvenir que c’est surtout dans le cœur de l’homme que cette harmonie a été brisée ; venez guérir ce cœur, posséder cette Jérusalem, indigne objet de votre prédilection. Assez longtemps elle a été captive en Babylone ; ramenez-la de la terre étrangère. Rebâtissez son temple ; et que la gloire de ce second temple soit plus grande que celle du premier, par l’honneur que vous lui ferez de l’habiter, non plus en figure, mais en personne. L’Ange l’a dit à Marie : « Le Seigneur Dieu donnera à votre fils le trône de David son père ; et il régnera dans la maison de Jacob à jamais, et son règne n’aura point de fin. » Que pouvons-nous faire, ô Jésus ! si ce n’est de dire, comme Jean le bien-aimé, à la fin de sa Prophétie : « Amen ! Ainsi soit-il ! Venez, Seigneur Jésus ! »

Antienne

Ã. Ecce in nubibus cæli Dominus veniet cum potestate magna, alleluia.

Ã. Voici que dans les nuées du ciel le Seigneur viendra avec une grande puissance, alleluia.

Antienne grégorienne “Ecce in nubibus”

Antienne Ecce in nubibus

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1er dimanche de l’Avent

1er dimanche de l’Avent

1er dimanche de l’Avent

La Punchline du Père Garrigou-Lagrange

Celui qui prie comme il le faut, avec humilité, confiance, persévérance, en demandant les biens nécessaires au salut, celui-là coopère au gouvernement divin.

Sermon

Mystique de l’Avent par Dom Guéranger

Le mystère de l’Avènement de Jésus-Christ est à la fois simple et triple. Il est simple, car c’est le même Fils de Dieu qui vient ; triple, car il vient en trois temps et en trois manières.

« Dans le premier Avènement, dit saint Bernard au Sermon cinquième sur l’Avent, il vient en chair et infirmité; dans le second, il vient en esprit et en puissance; dans le troisième, il vient en gloire et en majesté ; et le second Avènement est le moyen par lequel on passe du premier au troisième. »

Tel est le mystère de l’Avent. Écoutons maintenant l’explication que Pierre de Blois va nous donner de cette triple visite du Christ, dans son sermon troisième de Adventu : « Il y a trois Avènements du Seigneur, le premier dans la chair, le second dans l’âme, le troisième par le jugement. Le premier eut lieu au milieu de la nuit, suivant ces paroles de l’Évangile : Au milieu de la nuit un cri s’est fait entendre : Voici l’Époux ! Et ce premier Avènement est déjà passé : car le Christ a été vu sur la terre et a conversé avec les hommes. Nous sommes présentement dans le second Avènement : pourvu toutefois que nous soyons tels qu’il puisse ainsi venir à nous; car il a dit que si nous l’aimons, il viendra à nous et fera sa demeure en nous. Ce second Avènement est donc pour nous une chose mêlée d’incertitude ; car quel autre que l’Esprit de Dieu connaît ceux qui sont à Dieu ? Ceux que le désir des choses célestes ravit hors d’eux-mêmes, savent bien quand il vient; cependant, ils ne savent pas d’où il vient ni où il va. Quand au troisième Avènement, il est très certain qu’il aura lieu ; très incertain quand il aura lieu : puisqu’il n’est rien de plus certain que la mort, et rien de plus incertain que le jour de la mort. Au moment où l’on parlera de paix et de sécurité, dit le Sage, c’est alors que la mort apparaîtra soudain, comme les douleurs de l’enfantement au sein de la femme, et nul ne pourra fuir. Le premier Avènement fut donc humble et caché, le second est mystérieux et plein d’amour, le troisième sera éclatant et terrible. Dans son premier Avènement, le Christ a été jugé par les hommes avec injustice ; dans le second, il nous rend justes par sa grâce ; dans le dernier, il jugera toutes choses avec équité : Agneau dans le premier Avènement, Lion dans le dernier, Ami plein de tendresse dans le second (De Adventu, Sermo III). »

Les choses étant telles, la sainte Église, pendant l’Avent, attend avec larmes et impatience la venue du Christ Rédempteur en son premier Avènement. Elle emprunte pour cela les expressions enflammées des Prophètes, auxquelles elle ajoute ses propres supplications. Dans la bouche de l’Église, les soupirs vers le Messie ne sont point une pure commémoration des désirs de l’ancien peuple : ils ont une valeur réelle, une influence efficace sur le grand acte de la munificence du Père céleste qui nous a donné son Fils. Dès l’éternité, les prières de l’ancien peuple et celles de l’Église chrétienne unies ensemble ont été présentes à l’oreille de Dieu ; et c’est après les avoir toutes entendues et exaucées, qu’il a envoyé en son temps sur la terre cette rosée bénie qui a fait germer le Sauveur.

L’Église aspire aussi vers le second Avènement, suite du premier, et qui consiste, comme nous venons de le voir, en la visite que l’Époux fait à l’Épouse. Chaque année cet Avènement a lieu dans la fête de Noël ; et une nouvelle naissance du Fils de Dieu délivre la société des Fidèles de ce joug de servitude que l’ennemi voudrait faire peser sur elle (Collecte du jour de Noël). L’Église, durant l’Avent, demande donc d’être visitée par celui qui est son chef et son Époux, visitée dans sa hiérarchie, dans ses membres, dont les uns sont vivants et les autres sont morts, mais peuvent revivre ; enfin dans ceux qui ne sont point de sa communion, et dans les infidèles eux-mêmes, afin qu’ils se convertissent à la vraie lumière qui luit aussi pour eux. Les expressions de la Liturgie que l’Église emploie pour solliciter cet amoureux et invisible Avènement, sont les mêmes que celles par lesquelles elle sollicite la venue du Rédempteur dans la chair ; car, sauf la proportion, la situation est la même. En vain le Fils de Dieu serait venu, il y a vingt siècles, visiter et sauver le genre humain, s’il ne revenait, pour chacun de nous et à chaque moment de notre existence, apporter et fomenter cette vie surnaturelle dont le principe n’est que de lui et de son divin Esprit. Mais cette visite annuelle de l’Époux ne satisfait pas l’Église ; elle aspire après le troisième Avènement qui consommera toutes choses, en ouvrant les portes de l’éternité. Elle a recueilli cette dernière parole de l’Époux : Voilà que je viens tout à l’heure (Apc 22, 20) ; et elle dit avec ardeur : Venez, Seigneur Jésus ! (ibid.) Elle a hâte d’être délivrée des conditions du temps ; elle soupire après le complément du nombre des élus, pour voir paraître sur les nuées du ciel le signe de son libérateur et de son Époux. C’est donc jusque-là que s’étend la signification des vœux qu’elle a déposés dans la Liturgie de l’Avent ; telle est l’explication de la parole du disciple bien-aimé dans sa prophétie : Voici les noces de l’Agneau, et l’Épouse s’est préparée (Apc 19, 7).

Mais ce jour de l’arrivée de l’Époux sera en même temps un jour terrible. La sainte Église souvent frémit à la seule pensée des formidables assises devant lesquelles comparaîtront tous les hommes. Elle appelle ce jour « un jour de colère, duquel David et la Sibylle ont dit qu’il doit réduire le monde en cendres ; un jour de larmes et d’épouvante. » Ce n’est pas cependant qu’elle craigne pour elle-même, puisque ce jour fixera à jamais sur son front la couronne d’Épouse ; mais son cœur de Mère s’inquiète en songeant qu’alors plusieurs de ses enfants seront à la gauche du Juge, et que, privés de toute part avec les élus, ils seront jetés pieds et mains liés dans ces ténèbres où il n’y aura que des pleurs et des grincements de dents. Voilà pourquoi, dans la Liturgie de l’Avent, l’Église s’arrête si souvent à montrer l’Avènement du Christ comme un Avènement terrible, et choisit dans les Écritures les passages les plus propres à réveiller une terreur salutaire dans l’âme de ceux de ses enfants qui dormiraient d’un sommeil de péché.

Tel est donc le triple mystère de l’Avent. Or, les formes liturgiques dont il est revêtu, sont de deux sortes : les unes consistent dans les prières, lectures et autres formules, où la parole elle-même est employée à rendre les sentiments que nous venons d’exposer ; les autres sont des rites extérieurs propres à ce saint temps, et destinés à compléter ce qu’expriment les chants et les paroles.

Remarquons d’abord le nombre des jours de l’Avent. La quarantaine est la première forme qu’ait adoptée l’Église pour cette période; et cette forme est restée dans le rite ambrosien et chez les Orientaux. Si, plus tard, l’Église Romaine et celles qui la suivent l’ont abandonnée, le quaternaire n’en est pas moins exprimé dans les quatre semaines qui ont été substituées aux quarante jours. La nouvelle Naissance du Rédempteur a lieu après quatre semaines, comme la première Naissance eut lieu après quatre mille années, selon la supputation de l’Hébreu et de la Vulgate.

Au temps de l’Avent comme en celui du Carême, les Noces sont suspendues, afin que les joies humaines ne viennent pas distraire les chrétiens des pensées graves que doit leur inspirer l’attente du souverain Juge, ni les amis de l’Époux (Io 3, 29) de l’espérance qu’ils nourrissent chèrement d’être bientôt conviés aux Noces de l’éternité.

Les yeux du peuple sont avertis de la tristesse qui préoccupe le cœur de la sainte Église par la couleur de deuil dont elle se couvre. Hors les fêtes des Saints, elle ne revêt plus que le violet ; le Diacre dépose la Dalmatique, et le Sous-Diacre la Tunique. Autrefois même, on usait de la couleur noire en plusieurs lieux, comme à Tours, au Mans, etc. Ce deuil de l’Église marque avec quelle vérité elle s’unit aux vrais Israélites qui attendaient le Messie sous la cendre et le cilice, et pleuraient la gloire de Sion éclipsée, et « le sceptre ôté de Juda, jusqu’à ce que vienne celui qui doit être envoyé, et qui est l’attente des nations (Gn 49, 10) ». Il signifie encore les œuvres de la pénitence, par lesquelles elle se prépare au second Avènement plein de douceur et de mystère, qui a lieu dans les cœurs, en proportion de ce qu’ils se montrent touchés de la tendresse que leur témoigne cet Hôte divin qui a dit : Mes délices sont d’être avec les enfants des hommes (Prv 8, 31). Il exprime enfin la désolation de cette veuve attendant l’Époux qui tarde à paraître. Elle gémit sur la montagne, comme la tourterelle, jusqu’à ce que la voix se fasse entendre qui dira: « Viens du Liban, mon Épouse ; viens pour être couronnée, car tu as blessé mon cœur (Ct 5, 8) ».

Pendant l’Avent, l’Église suspend aussi, excepté aux Fêtes des Saints, l’usage du Cantique Angélique : Gloria in excelsis Deo, et in terra pax hominibus bonæ voluntatis. En effet, ce chant merveilleux ne s’est fait entendre qu’en Bethléem sur la crèche de l’Enfant divin ; la langue des Anges n’est donc pas déliée encore ; la Vierge n’a pas déposé son divin fardeau ; il n’est pas temps de chanter, il n’est pas encore vrai de dire : Gloire à Dieu au plus haut des cieux ! sur la terre, paix aux hommes de bonne volonté !

De même, à la fin du Sacrifice, la voix du Diacre ne fait plus entendre ces paroles solennelles qui congédient l’assemblée des fidèles : Ite, Missa est ! Il les remplace par cette exclamation ordinaire : Benedicamus Domino ! comme si l’Église craignait d’interrompre les prières du peuple, qui ne sauraient être trop prolongées en ces jours d’attente.

À l’Office de la Nuit, la sainte Église retranche aussi, dans les mêmes jours, l’hymne de jubilation, Te Deum laudamus [l’office monastique le conserve cependant]. C’est dans l’humilité qu’elle attend le bienfait souverain, et, durant cette attente, elle ne peut que demander, supplier, espérer. Mais à l’heure solennelle, quand, au milieu des ombres les plus épaisses, le Soleil de justice viendra à se lever tout-à-coup, elle retrouvera sa voix d’action de grâces; et le silence de la nuit fera place, par toute la terre, à ce cri d’enthousiasme : « Nous vous louons, ô Dieu ! Seigneur, nous vous célébrons ! Ô Christ ! Roi de gloire, Fils éternel du Père ! pour la délivrance de l’homme, vous n’avez point eu horreur du sein d’une faible Vierge ».

Dans les jours de Férie, avant de conclure chaque heure de l’Office, les Rubriques de l’Avent prescrivent des prières particulières qui doivent se faire à genoux ; le chœur doit aussi se tenir dans la même posture, aux mêmes jours, durant une partie considérable de la Messe. Sous ce rapport, les usages de l’Avent sont totalement identiques à ceux du Carême.

Toutefois, il est un trait spécial qui distingue ces deux temps : c’est que le chant de l’allégresse, le joyeux Alleluia, n’est pas suspendu durant l’Avent, si ce n’est aux jours de Férie. À la Messe des quatre dimanches, on continue de le chanter ; et il forme contraste avec la couleur sombre des ornements. Il est même un de ces dimanches, le troisième, où l’orgue retrouve sa grande et mélodieuse voix, et où la triste parure violette peut un moment faire place à la couleur rose. Ce souvenir des joies passées, qui se retrouve ainsi au fond des saintes tristesses de l’Église, dit assez que, tout en s’unissant à l’ancien peuple pour implorer la venue du Messie, et payer ainsi la grande dette de l’humanité envers la justice et la clémence de Dieu, elle n’oublie cependant pas que l’Emmanuel est déjà venu pour elle, qu’il est en elle, et qu’avant même qu’elle ait ouvert la bouche pour demander le salut, elle est déjà rachetée et marquée pour l’union éternelle. Voilà pourquoi l’Alleluia se mêle à ses soupirs, pourquoi sont empreintes en elle toutes les joies et toutes les tristesses, en attendant que la joie surabonde à la douleur, en cette nuit sacrée qui sera plus radieuse que le plus brillant des jours.

Prières

Oratio

Excita, quæsumus, Dómine, poténtiam tuam, et veni : ut ab imminéntibus peccatórum nostrórum perículis, te mereámur protegénte éripi, te liberánte salvári : Qui vivis et regnas.

Oraison

Réveillez votre puissance, Seigneur et venez, pour que, dans le grand péril où nous sommes à cause de nos péchés, nous puissions trouver en vous le défenseur qui nous délivre et le libérateur qui nous sauve.

Prière de Dom Prosper Guéranger (1805-1875)

Ô Sauveur, vous venez dans les ténèbres, et les ténèbres ne vous comprennent pas. Oh ! faites que nos ténèbres comprennent la lumière et la désirent. Un jour viendra où vous déchirerez les ténèbres insensibles et volontaires, par l’éclair effrayant de votre justice. Gloire à vous en ce jour, ô souverain Juge ! mais gardez-nous de votre colère, durant les jours de cette vie mortelle. — Où frapperai-je maintenant ? dites-vous. Mon peuple n’est déjà plus qu’une plaie. — Soyez donc Sauveur, ô Jésus ! dans l’Avènement que nous attendons : Toute tête est languissante, et tout cœur désolé : venez relever ces fronts que la confusion et trop souvent aussi de viles attaches courbent vers la terre. Venez consoler et rafraîchir ces cœurs timides et flétris. Et si nos plaies sont graves et invétérées, venez, vous qui êtes le charitable Samaritain, répandre sur elles l’huile qui fait disparaître la douleur et rend la santé.

Le monde entier vous attend, ô Rédempteur ! venez vous révéler à lui en le sauvant. L’Église, votre Épouse, commence en ce moment une nouvelle année ; son premier cri est un cri de détresse vers vous; sa première parole est celle-ci : Venez! Nos âmes, ô Jésus, ne veulent pas non plus cheminer sans vous dans le désert de cette vie. Il se fait tard : le jour incline au soir, les ombres sont descendues : levez-vous, divin Soleil ; venez guider nos pas, et nous sauver de la mort.

Prière de Pierre de Blois (vers 1130-1212)

Ô Marie, qui peut dire vos louanges, qui peut parler de votre puissance ? Quoique les filles de Sion vous exaltent, que les reines vous louent, que l’assemblée des saints proclame votre gloire, tous ces honneurs et toutes ces louanges, comparés à votre félicité, sont comme une torche auprès du soleil, ou bien une goutte d’eau devant l’immense océan. Dans nos misères et nos angoisses, vous êtes aussi prompte que puissante à nous secourir. Vous êtes douce pour la bouche de ceux qui vous prient, douce dans les cœurs de ceux qui vous aiment, douce dans la mémoire de ceux qui vous invoquent. Tout sexe, tout âge, toute condition, toute tribu, toute langue, vous glorifient. Vous êtes la myrrhe choisie, la colonne de fumée aromatique, le bouquet de myrrhe de l’épouse, le pin qui étend sur nous ses rameaux de gloire et de salut. En tout et au-dessus de tout vous êtes bénie et la plus bénie ; la plus belle, la plus gracieuse, la plus glorieuse mère, la mère de Celui qui donne la grâce et la gloire, l’honneur et la vie éternelle, de Celui auquel tout honneur et toute gloire sont dus à jamais. Ainsi soit-il.

Antienne

Ã. In illa die stillabunt montes dulcedinem et colles fluent lac et mel, alleluia.

Ã. En ce jour-là les montagnes distilleront la douceur, et les collines ruisselleront de lait et de miel, alleluia.

Antienne grégorienne “In illa die”

Antienne In illa die

Ã. Spiritus sanctus in te descendet Maria : ne timeas habebis in utero Filium Dei, alleluia.

Ã. L’Esprit-Saint descendra sur vous, Marie : ne craignez pas, vous aurez en votre sein le Fils de Dieu, alleluia.

Antienne grégorienne “Spiritus Sanctus”

Antienne Spiritus Sanctus

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8 décembre — Immaculée Conception de Marie

8 décembre — Immaculée Conception de Marie

8 décembre — Immaculée Conception de Marie

La Punchline de Saint Anselme

Dieu est le Père des choses créées ; Marie est la mère des choses recréées.

Sermon

Extraits de la Bulle « Ineffabilis Deus » du Pape Pie IX (8 décembre 1954)

Marie fut toujours sans aucune tache.

Dieu ineffable, dont les voies sont miséricorde et vérité, dont la volonté est toute‑puissante, dont la sagesse atteint d’une extrémité jusqu’à l’autre avec une force souveraine et dispose tout avec une merveilleuse douceur, avait prévu de toute éternité la déplorable ruine en laquelle la transgression d’Adam devait entraîner tout le genre humain ; et dans les profonds secrets d’un dessein caché à tous les siècles, il avait résolu d’accomplir, dans un mystère encore plus profond, par l’incarnation du Verbe, le premier ouvrage de sa bonté, afin que l’homme, qui avait été poussé au péché par la malice et la ruse du démon, ne pérît pas, contrairement au dessein miséricordieux de son Créateur, et que la chute de notre nature, dans le premier Adam, fût réparée avec avantage dans le second. Il destina donc, dès le commencement et avant tous les siècles, à son Fils unique, la Mère de laquelle, s’étant incarné, il naîtrait, dans la bienheureuse plénitude des temps ; il la choisit, il lui marqua sa place dans l’ordre de ses desseins ; il l’aima par‑dessus toutes les créatures, d’un tel amour de prédilection, qu’il mit en elle, d’une manière singulière, toutes ses plus grandes complaisances. C’est pourquoi, puisant dans les trésors de sa divinité, il la combla, bien plus que tous les esprits angéliques, bien plus que tous les saints, de l’abondance de toutes les grâces célestes, et l’enrichit avec une profusion merveilleuse, afin qu’elle fût toujours sans aucune tache, entièrement exempte de l’esclavage du péché, toute belle, toute parfaite et dans une telle plénitude d’innocence et de sainteté qu’on ne peut, au‑dessous de Dieu, en concevoir une plus grande, et que nulle autre pensée que celle de Dieu même ne peut en mesurer la grandeur.

Raison de ce privilège : la maternité divine.

Et certes, il convenait bien qu’il en fût ainsi, il convenait qu’elle resplendît toujours de l’éclat de la sainteté la plus parfaite, qu’elle fût entièrement préservée, même de la tache du péché originel, et qu’elle remportât ainsi le plus complet triomphe sur l’ancien serpent, cette Mère si vénérable, elle à qui Dieu le Père avait résolu de donner son Fils unique, Celui qu’il engendre de son propre sein, qui lui est égal en toutes choses et qu’il aime comme lui‑même, et de le lui donner de telle manière qu’il fût naturellement un même unique et commun Fils de Dieu et de la Vierge ; elle que le Fils de Dieu lui‑même avait choisie pour en faire substantiellement sa Mère ; elle enfin, dans le sein de laquelle le Saint‑Esprit avait voulu que, par son opération divine, fût conçu et naquît Celui dont il procède lui-même.

L’Immaculée Conception est une vérité révélée.

Cette innocence originelle de l’auguste Vierge, si parfaitement en rapport avec son admirable sainteté et avec sa dignité suréminente de Mère de Dieu, l’Église catholique qui, toujours enseignée par l’Esprit‑Saint, est la colonne et le fondement de la vérité, l’a toujours possédée comme une doctrine reçue de Dieu même et renfermée dans le dépôt de la révélation céleste. Aussi, par l’exposition de toutes les preuves qui la démontrent, comme par les faits les plus illustres, elle n’a jamais cessé de la développer, de la proposer, de la favoriser chaque jour davantage. C’est cette doctrine, déjà si florissante dès les temps les plus anciens, et si profondément enracinée dans l’esprit des fidèles, et propagée d’une manière si merveilleuse dans tout le monde catholique par les soins et le zèle des saints évêques, sur laquelle l’Église elle‑même a manifesté son sentiment d’une manière si significative, lorsqu’elle n’a point hésité à proposer au culte et à la vénération publique des fidèles la Conception de la Vierge. Par ce fait éclatant, elle montrait bien que la Conception de la Vierge devait être honorée comme une Conception admirable, singulièrement privilégiée, différente de celle des autres hommes, tout à fait à part et tout à fait sainte puisque l’Église ne célèbre de fêtes qu’en l’honneur de ce qui est saint. C’est pour la même raison, qu’empruntant les termes mêmes dans lesquels les divines Écritures parlent de la Sagesse incréée et représentent son origine éternelle, elle a continué de les employer dans les offices ecclésiastiques et dans la liturgie sacrée, et de les appliquer aux commencements mêmes de la Vierge ; commencements mystérieux, que Dieu avait prévus et arrêtés dans un seul et même décret, avec l’Incarnation de la Sagesse divine.

L’enseignement ordinaire de l’Église sur l’Immaculée Conception.

Mais encore que toutes ces choses connues, pratiquées en tous lieux par les fidèles, témoignent assez quel zèle l’Église romaine, qui est la Mère et la Maîtresse de toutes les Églises, a montré pour cette doctrine de l’Immaculée Conception de la Vierge ; toutefois, il est digne et très convenable de rappeler en détail les grands actes de cette Église, à cause de la prééminence et de l’autorité souveraine dont elle jouit justement, et parce qu’elle est le centre de la vérité et de l’unité catholique, et celle en qui seule a été garanti inviolable le dépôt de la religion, et celle dont il faut que toutes les autres Églises reçoivent la tradition de la foi.

Or, cette sainte Église romaine n’a rien eu de plus à cœur que de professer, de soutenir, de propager et de défendre, par tous les moyens les plus persuasifs, le culte et la doctrine de l’Immaculée Conception : c’est ce que prouvent et attestent de la manière la plus évidente et la plus claire tant d’actes importants des Pontifes romains, Nos prédécesseurs, auxquels, dans la personne du Prince des apôtres, Notre‑Seigneur Jésus‑Christ lui‑même a divinement confié la charge et la puissance suprême de paître les agneaux et les brebis, de confirmer leurs frères, de régir et de gouverner l’Église universelle.

L’enseignement ordinaire de l’Église par le culte liturgique.

Nos prédécesseurs, en effet, se sont fait une gloire d’instituer de leur autorité apostolique la fête de la Conception dans l’Église romaine, et d’en relever l’importance et la dignité par un office propre et par une messe propre où la prérogative de la Vierge et son exemption de la tache héréditaire étaient affirmées avec une clarté manifeste. Quant au culte déjà institué, ils faisaient tous leurs efforts pour le répandre et le propager, soit en accordant des indulgences, soit en concédant aux villes, aux provinces, aux royaumes, la faculté de se choisir pour protectrice la Mère de Dieu, sous le titre de l’Immaculée Conception ; soit en approuvant les Confréries, les Congrégations et les Instituts religieux établis en l’honneur de l’Immaculée Conception ; soit en décernant des louanges à la piété de ceux qui auraient élevé, sous le titre de l’Immaculée Conception, des monastères, des hospices, des autels, des temples, ou qui s’engageraient par le lien sacré du serment à soutenir avec énergie la doctrine de la Conception Immaculée de la Mère de Dieu. En outre, ils ont, avec la plus grande joie, ordonné que la fête de la Conception serait célébrée dans toute l’Église avec la même solennité que la fête de la Nativité ; de plus, que cette même fête de la Conception serait faite par l’Église universelle, avec une octave, et religieusement observée par tous les fidèles comme une fête de précepte, et que chaque année une chapelle pontificale serait tenue, dans notre basilique patriarcale libérienne, le jour consacré à la Conception de la Vierge.

L’enseignement doctrinal de l’Église.

Mais comme les choses du culte sont étroitement liées avec son objet, et que l’un ne peut avoir de consistance et de durée si l’autre est vague et mal défini, pour cette raison, les Pontifes romains Nos Prédécesseurs, en même temps qu’ils faisaient tous leurs efforts pour accroître le culte de la Conception, se sont attachés, avec le plus grand soin, à en faire connaître l’objet et à en bien inculquer et préciser la doctrine. Ils ont, en effet, enseigné clairement et manifestement que c’était la Conception de la Vierge dont on célébrait la fête, et ils ont proscrit comme fausse et tout à fait éloignée de la pensée de l’Église, l’opinion de ceux qui croyaient et qui affirmaient que ce n’était pas la Conception, mais la Sanctification de la Sainte Vierge que l’Église honorait. Ils n’ont pas cru devoir garder plus de ménagements avec ceux qui, pour ébranler la doctrine de l’Immaculée Conception de la Vierge, imaginaient une distinction entre le premier et le second instant de la Conception, prétendaient qu’à la vérité c’était bien la Conception qu’on célébrait, mais pas le premier moment de la Conception. Nos Prédécesseurs, en effet, ont cru qu’il était de leur devoir de soutenir et défendre de toutes leurs forces, tant la fête de la Conception de la Vierge bienheureuse, que le premier instant de sa Conception comme étant le véritable objet de ce culte. De là ces paroles d’une autorité tout à fait décisive, par lesquelles Alexandre VII (Constitution Sollicitudo omnium ecclesiarum du 8 décembre 1661), l’un de Nos Prédécesseurs, a déclaré la véritable pensée de l’Église : « C’est assurément, dit‑il, une ancienne croyance que celle des pieux fidèles qui pensent que l’âme de la Bienheureuse Vierge Marie, Mère de Dieu, dans le premier instant où elle a été créée et unie à son corps, a été, par un privilège et une grâce spéciale de Dieu, préservée et mise à l’abri de la tache du péché originel, et qui, dans ce sentiment, honorent et célèbrent solennellement la fête de sa Conception. »

Mais surtout Nos Prédécesseurs ont toujours, et par un dessein suivi, travaillé avec zèle et de toutes leurs forces à soutenir, à défendre et à maintenir la doctrine de l’Immaculée Conception de la Mère de Dieu. En effet, non seulement ils n’ont jamais souffert que cette doctrine fût l’objet d’un blâme ou d’une censure quelconque ; mais ils sont allés beaucoup plus loin. Par des déclarations positives et réitérées, ils ont enseigné que la doctrine par laquelle nous professons la Conception Immaculée de la Vierge était tout à fait d’accord avec le culte de l’Église, et qu’on la considérait à bon droit comme telle ; que c’était l’ancienne doctrine, presque universelle et si considérable, que l’Église romaine s’était chargée elle‑même de la favoriser et de la défendre ; enfin, qu’elle était tout à fait digne d’avoir place dans la liturgie sacrée et dans les prières les plus solennelles. Non contents de cela, afin que la doctrine de la Conception Immaculée de la Vierge demeurât à l’abri de toute atteinte, ils ont sévèrement interdit de soutenir publiquement ou en particulier l’opinion contraire à cette doctrine, et ils ont voulu que, frappée pour ainsi dire de tant de coups, elle succombât pour ne plus se relever. Enfin, pour que ces déclarations répétées et positives ne fussent pas vaines, ils y ont ajouté une sanction.

La tradition des Anciens et des Pères.

Cette doctrine de l’Immaculée Conception de la Bienheureuse Vierge a toujours existé dans l’Église ; l’Église, par la très grave autorité de son sentiment, par son enseignement, par son zèle, sa science et son admirable sagesse, l’a de plus en plus mise en lumière, déclarée, confirmée et propagée d’une manière merveilleuse chez tous les peuples et chez toutes les nations du monde catholique ; mais, de tout temps, elle l’a possédée comme une doctrine reçue des Anciens et des Pères, et revêtue des caractères d’une doctrine révélée. Les plus illustres monuments de l’Église d’Orient et de l’Église d’Occident, les plus vénérables par leur antiquité, en sont le témoignage irrécusable. Toujours attentive à garder et à défendre les dogmes dont elle a reçu le dépôt, l’Église de Jésus‑Christ n’y change jamais rien, n’en retranche jamais rien, n’y ajoute jamais rien; mais portant un regard fidèle, discret et sage sur les enseignements anciens, elle recueille tout ce que l’antiquité y a mis, tout ce que la foi des Pères y a semé. Elle s’applique à le polir, à en perfectionner la formule de manière que ces anciens dogmes de la céleste doctrine reçoivent l’évidence, la lumière, la distinction, tout en gardant leur plénitude, leur intégrité, leur caractère propre, en un mot, de façon qu’ils se développent sans changer de nature, et qu’ils demeurent toujours dans la même vérité, dans le même sens, dans la même pensée.

L’antithèse de la première et de la seconde Ève.

Les Pères ont exprimé, aussi unanimement qu’éloquemment, que la très glorieuse Vierge, Celle en qui le Tout‑Puissant a fait de grandes choses, a été comblée d’une telle effusion de tous les dons célestes, d’une telle plénitude de grâces, d’un tel éclat de sainteté, qu’elle a été comme le miracle ineffable de Dieu, ou plutôt le chef‑d’œuvre de tous les miracles ; qu’elle a été la digne Mère de Dieu, qu’elle s’est approchée de Dieu même autant qu’il est permis à la nature créée, et qu’ainsi elle est au‑dessus de toutes les louanges, aussi bien de celles des anges, que de celles des hommes. C’est aussi pour cela, qu’afin d’établir l’innocence et la justice originelle de la Mère de Dieu, non seulement ils l’ont très souvent comparée avec Eve encore vierge, encore innocente, encore exempte de corruption, avant qu’elle eût été trompée par le piège mortel de l’astucieux serpent, mais, avec une admirable variété de pensées et de paroles, ils la lui ont même unanimement préférée. Eve, en effet, pour avoir misérablement obéi au serpent, perdit l’innocence originelle et devint son esclave ; mais la Vierge Bienheureuse, croissant toujours dans la grâce originelle, ne prêta jamais l’oreille au serpent, et ébranla profondément sa puissance et sa force par la vertu qu’elle avait reçue de Dieu.

Tout cela est plus clair que le jour ; cependant, comme si ce n’était point assez, les Pères ont, en propres termes et d’une manière expresse, déclaré que, lorsqu’il s’agit de péché, il ne doit pas en aucune façon être question de la Sainte Vierge Marie parce qu’elle a reçu plus de grâce, afin qu’en elle le péché fût absolument vaincu et de toutes parts. Ils ont encore professé que la Très glorieuse Vierge avait été la réparatrice de ses ancêtres et qu’elle avait vivifié sa postérité ; que le Très-Haut l’avait choisie et se l’était réservée dès le commencement des siècles ; que Dieu l’avait prédite et annoncée quand il dit au serpent : « Je mettrai l’inimitié entre toi et la femme » (Gn 3, 15), et que, sans aucun doute, elle a écrasé la tête venimeuse de ce même serpent ; et pour cette raison, ils ont affirmé que la même Vierge Bienheureuse avait été, par la grâce, exempte de toute tache du péché, libre de toute contagion et du corps, et de l’âme, et de l’intelligence ; qu’elle avait toujours conversé avec Dieu ; qu’unie avec Lui par une alliance éternelle, elle n’avait jamais été dans les ténèbres, mais toujours dans la lumière, et par conséquent qu’elle avait été une demeure tout à fait digne du Christ, non à cause de la beauté de son corps, mais à cause de sa grâce originelle.

Définition dogmatique de l’Immaculée Conception.

En conséquence, après avoir offert sans relâche, dans l’humilité et le jeûne, Nos propres prières et les prières publiques de l’Église à Dieu le Père par son Fils, afin qu’il daignât, par la vertu de l’Esprit-Saint, diriger et confirmer Notre esprit ; après avoir imploré le secours de toute la cour céleste et invoqué avec gémissements l’Esprit consolateur, et ainsi, par sa divine inspiration, pour l’honneur de la Sainte et Indivisible Trinité, pour la gloire et l’ornement de la Vierge Mère de Dieu, pour l’exaltation de la foi catholique et l’accroissement de la religion chrétienne ; par l’autorité de Notre-Seigneur Jésus-Christ, des Bienheureux apôtres Pierre et Paul et la Nôtre,

Nous déclarons, Nous prononçons et définissons que la doctrine qui enseigne que la Bienheureuse Vierge Marie, dans le premier instant de sa Conception, a été, par une grâce et un privilège spécial du Dieu Tout-Puissant, en vue des mérites de Jésus-Christ, Sauveur du genre humain, préservée et exempte de toute tache du péché originel, est révélée de Dieu, et par conséquent qu’elle doit être crue fermement et constamment par tous les fidèles.

C’est pourquoi, si quelques-uns avaient la présomption, ce qu’à Dieu ne plaise, de penser contrairement à Notre définition, qu’ils apprennent et qu’ils sachent que condamnés par leur propre jugement ils ont fait naufrage dans la foi et cessé d’être dans l’unité de l’Église ; et que, de plus, ils encourent par le fait même les peines de droit, s’ils osent exprimer ce qu’ils pensent de vive voix ou par écrit, ou de toute autre manière extérieure que ce soit.

Résultats espérés.

En vérité, Notre bouche est pleine de joie et Notre langue est dans l’allégresse ; et Nous rendons et rendrons toujours les plus humbles et les plus profondes actions de grâces à Notre-Seigneur de ce que, par une faveur singulière, il Nous a accordé, sans mérite de Notre part, d’offrir et de décerner cet honneur, cette gloire et cette louange à sa Très Sainte Mère. Nous avons la plus ferme espérance et la confiance la plus assurée que la Vierge Bienheureuse qui, toute belle et tout immaculée, a écrasé la tête venimeuse du cruel serpent et apporté le salut du monde ; qui est la louange des prophètes et des apôtres, l’honneur des martyrs, la joie et la couronne de tous les saints, le refuge le plus assuré de tous ceux qui sont en péril, le secours le plus fidèle, la médiatrice la plus puissante de l’univers entier auprès de son Fils unique pour la réconciliation ; la gloire la plus belle, l’ornement le plus éclatant, le plus solide appui de la sainte Église ; qui a toujours détruit toutes les hérésies, arraché les peuples et les nations fidèles à toutes les plus grandes calamités, et Nous-même délivré de tant de périls menaçants, voudra bien faire en sorte, par sa protection toute-puissante, que la Sainte Mère l’Église catholique, toutes les difficultés étant écartées, toutes les erreurs vaincues, soit de jour en jour plus forte, plus florissante chez toutes les nations et dans tous les lieux ; qu’elle règne d’une mer à l’autre et depuis les rives du fleuve jusqu’aux extrémités du monde ; qu’elle jouisse d’une paix entière, d’une parfaite tranquillité et liberté ; que les coupables obtiennent leur pardon les malades leur guérison, les faibles de cœur la force, les affligés la consolation, ceux qui sont en danger le secours ; que tous ceux qui sont dans l’erreur, délivrés des ténèbres qui couvrent leur esprit, rentrent dans le chemin de la vérité et de la justice, et qu’il n’y ait plus qu’un seul bercail et qu’un seul pasteur.

Que les enfants de l’Église catholique, Nos Fils bien-aimés, entendent nos paroles, et qu’animés chaque jour d’une piété, d’une vénération, d’un amour plus ardents, ils continuent d’honorer, d’invoquer, de prier la Bienheureuse Mère de Dieu, la Vierge Marie, conçue sans la tache originelle ; et que, dans tous leurs périls, dans leurs angoisses, dans leurs nécessités, dans leurs doutes et dans leurs craintes, ils se réfugient avec une entière confiance auprès de cette très douce Mère de miséricorde et de grâce. Car il ne faut jamais craindre, il ne faut jamais désespérer, sous la conduite, sous les auspices, sous le patronage, sous la protection de Celle qui a pour nous un cœur de Mère, et qui, traitant elle-même l’affaire de notre salut, étend sa sollicitude sur tout le genre humain ; qui, établie par le Seigneur Reine du ciel et de la terre, et élevée au-dessus de tous les chœurs des anges et de tous les rangs des  saints, se tient à la droite de son Fils unique, Notre-Seigneur Jésus-Christ, intercède efficacement par toute la puissance des prières maternelles, et trouve ce qu’elle cherche, et son intercession ne peut être sans effet.

Promulgation.

Enfin, pour que cette définition dogmatique par Nous prononcée touchant l’Immaculée Conception de la Bienheureuse Vierge Marie, soit portée à la connaissance de l’Église universelle, Nous avons voulu la consigner dans nos présentes Lettres apostoliques, en perpétuelle mémoire de la chose, ordonnant que les copies manuscrites qui seront faites desdites Lettres, ou même les exemplaires qui en seront imprimés, contresignés par un notaire public, et munis du sceau d’une personne constituée en dignité ecclésiastique, fassent foi auprès de tous, de la même manière absolument que le feraient les présentes Lettres elles-mêmes, si elles étaient exhibées ou produites.

Qu’il ne soit donc permis à qui que ce soit de contredire, par une audacieuse témérité, ce texte écrit de Notre déclaration, décision et définition ou bien d’y porter atteinte et de s’y opposer. Que si quelqu’un avait la hardiesse de l’entreprendre, qu’il sache qu’il encourrait le courroux du Dieu Tout-Puissant et de ses apôtres Pierre et Paul.

Donné à Rome, près Saint-Pierre, l’année mil huit cent cinquante quatrième de l’Incarnation de Notre Seigneur, le sixième jour avant les ides de décembre de l’an 1854, de Notre pontificat le neuvième.

Prières

Oratio

Deus, qui per immaculátam Vírginis Conceptiónem dignum Fílio tuo habitáculum præparásti : quæsumus ; ut, qui ex morte eiúsdem Filii tui prævísa eam ab omni labe præservásti, nos quoque mundos eius intercessióne ad te perveníre concédas. Per eúndem Dóminum.

Oraison

Ô Dieu, qui, par l’Immaculée Conception de la Vierge, avez préparé à votre Fils une demeure digne de lui, nous vous en supplions, vous qui, en prévision de la mort de ce même Fils, l’avez préservée de toute tache, accordez-nous, par son intercession, d’être purifiés et de parvenir jusqu’à vous.

Prière de Dom Prosper Guéranger (1805-1875)

Ô Marie ! Que votre douce lumière réjouit délicieusement nos yeux fatigués ! De génération en génération, les hommes se succédaient sur la terre ; ils regardaient le ciel avec inquiétude, espérant à chaque instant voir poindre à l’horizon l’astre qui devait les arracher à l’horreur des ténèbres ; mais la mort avait fermé leurs yeux, avant qu’ils eussent pu seulement entrevoir l’objet de leurs désirs. Il nous était réservé de voir votre lever radieux, ô brillante Etoile du matin ! Vous dont les rayons bénis se réfléchissent sur les ondes de la mer, et lui apportent le calme après une nuit d’orages ! Oh ! Préparez nos yeux à contempler l’éclat vainqueur du divin Soleil qui marche à votre suite. Préparez nos cœurs ; car c’est à nos cœurs qu’il veut se révéler. Mais, pour mériter de le voir, il est nécessaire que nos cœurs soient purs ; purifiez-les, ô vous, l’Immaculée, la très pure ! Entre toutes les fêtes que l’Église a consacrées à votre honneur, la divine Sagesse a voulu que celle de votre Conception sans tache se célébrât dans ces jours de l’Avent, afin que les enfants de l’Église, songeant avec quelle divine jalousie le Seigneur a pris soin d’éloigner de vous tout contact du péché, par honneur pour Celui dont vous deviez être la Mère, ils se préparassent eux-mêmes à le recevoir par le renoncement absolu à tout ce qui est péché et affection au péché. Aidez-nous, ô Marie, à opérer ce grand changement. Détruisez en nous, par votre Conception Immaculée, les racines de la cupidité, éteignez les flammes de la volupté, abaissez les hauteurs de la superbe. Souvenez-vous que Dieu ne vous a choisie pour son habitation, qu’afin de venir ensuite faire sa demeure en chacun de nous. Ainsi soit-il.

Prière d’Eadmer de Canterbury (vers 1060-1124)

Ô vous, bienheureuse entre toutes les femmes ! Car Dieu a voulu faire de vous sa mère, et parce qu’il l’a voulu, il l’a fait. Que dis-je ? Il a fait de vous sa mère, lui le créateur, le maître et le souverain de toutes choses, lui l’auteur et le seigneur de tous les êtres non seulement intelligibles mais de ceux qui dépassent toute intelligence. Il vous a faite, ô Notre Dame, sa mère unique et par là il vous a constituée en même temps la maîtresse et l’impératrice de l’univers. Vous êtes donc devenue la souveraine et la reine des cieux, des terres et des mers, de tous les éléments et de tout ce qu’ils contiennent, et c’est pour être tout cela qu’il vous formait par l’opération du Saint-Esprit dans le sein de votre mère dès le premier instant de votre conception. Il en est ainsi, ô bonne Dame, et nous nous réjouissons qu’il en soit ainsi.

Prière de Saint Anselme de Canterbury (1033-1109)

Ô Vierge d’un mérite incomparable et qui n’avez jamais eu de modèle, Vierge sans seconde, Vierge Mère, le seigneur s’est lui-même fait le gardien de la virginité de votre corps et de la virginité de votre âme, afin de pouvoir dignement revêtir en votre sein cette chair qui est le prix de notre rédemption. Je vous en supplie, ô très Miséricordieuse, et grâce à qui, après Dieu, le monde tout entier a été sauvé, intercédez pour moi qui suis tout couvert de la boue du péché et souillé de toutes les iniquités, afin que Dieu accorde à cette âme toute misérable l’amour de la pureté et la passion de la chasteté. Malheureux que je suis, j’ai perdu la grâce de l’innocence et celle de la sainteté ; j’ai violé en moi-même la majesté du temple de Dieu. Mais que fais-je ? Ne voilà-t-il pas que je raconte mes impuretés à la plus immaculée de toutes les oreilles. J’ai horreur de moi, ô ma Dame. Ma conscience m’accuse. Je sens, comme Adam, ma nudité mauvaise. Je me vois mourir. À qui donc irai-je montrer la blessure de mon âme, exposer ma douleur, dire mes larmes ? Et comment pourrai-je recouvrer la santé s’il ne m’est plus permis d’entrer dans ce lieu de repos de la miséricorde éternelle ? Dame, ayez pitié de moi ; ayez pitié de ce citoyen de votre royaume qui s’est banni lui-même de votre domaine céleste, et qui, après un long exil, après de longs soupirs, après de cruelles déceptions et des tortures sans nombre, revient enfin à sa consolatrice et à sa Mère.

Je me rappelle ici, et ce souvenir m’est bien doux, que pour encourager tous les pécheurs à s’adresser à votre incomparable patronage, vous avez bien voulu révéler votre nom délicieusement mémorable à un de vos serviteurs qui allait mourir. Comme il était dans les affres de l’agonie, vous lui êtes apparue : « me reconnais-tu ? » et il vous a répondu tout tremblant : « non, Dame, je ne vous reconnais point ». Alors avec quelle bonté, avec quelle tendresse, avec quelle familiarité, vous lui avez dit : « je suis la Mère de miséricorde ». Non, non, il n’y a personne qui puisse recevoir la confidence de nos misères, de nos calamités et de nos larmes ; il n’y a que vous, ô Marie, qui êtes vraiment, qui êtes indubitablement la Mère de miséricorde. Mère sainte, Mère unique, Mère immaculée, Mère d’amour, Mère de pardon, Mère de bonté, ouvrez votre cœur si aimant, et accueillez dans ce cœur le malheureux qui est mort en son péché. Et ce malheureux, c’est moi.

Voici l’enfant prodigue qui revient : il est nu, il a les pieds broyés, il arrive d’un lieu horrible, il sort d’une obscurité immonde et infecte. Et il soupire et il crie, et il appelle sa Mère : car il se souvient que vous l’avez bien des fois couvert quand il était nu, réchauffé quand il avait froid, et excusé auprès de son père. Quel père et comme il est bon ! Quelle Mère et comme elle est douce ! Reconnaissez donc en nous ces enfants que votre fils unique, Jésus, n’a pas rougi d’appeler ses frères. Vous avez senti le glaive percer votre cœur à la vue de votre Fils très innocent qu’on avait mis en croix : comment ne pourriez vous pas pleurer sur vos fils adoptifs, qui, comme moi, sont morts dans leur péché ? Comment pourriez-vous, à leur vue, contenir vos sanglots et vos gémissements maternels ? Nous sommes entrainés par l’ennemi, arrachés à notre patrie et jetés en captivité. Et il n’y a personne pour nous délivrer, personne pour nous racheter, personne enfin qui se lève un matin et consente à se faire caution pour nous !

Levez-vous, ô Vierge ; levez-vous, Miséricordieuse. Entrez dans le sanctuaire céleste où Dieu écoute les prières, et restez là, vos mains étendues, vos mains qui sont immaculées, devant cet autel d’or où se fera la réconciliation de Dieu et de l’homme. Et vous nous obtiendrez aisément tout ce que nous osons demander par votre intercession. Et les crimes qui nous remplissent de crainte seront, grâce à vous, pardonnés. Est-ce qu’il pourrait vous laisser longtemps à ses pieds, priant pour nous, celui que, douce Mère, vous avez si souvent consolé, alors qu’il était un petit enfant vagissant. Et qui mériterait d’apaiser la colère de ce juge, si ce n’est celle qui a mérité d’être sa Mère ? N’hésitez donc pas, ô ma Dame.

Ce Dieu que vous allez prier, c’est mon salut et ma gloire, c’est aussi ma chair, c’est notre tête à tous. Il nous connait ; il connait bien son œuvre. Honneur des Vierges, souveraine des nations, reine des anges, fontaine des jardins fermés, virginité sans tâches, ô Marie, tendez la main à un malheureux qui se voit perdu. Il n’a pas l’audace d’espérer encore la robe des anges. Mais, du moins, qu’il reçoive de vous une robe nuptiale, pour s’asseoir au banquet du ciel, ne fût-ce qu’à la dernière place. Enfin, si je ne mérite point, et par là même que je ne mérite pas de m’approcher plus près de ces chœurs odorants et fleuris qui chantent votre gloire là-haut, faites du moins que, de loin, de bien loin, je mérite de voir et d’entendre ces processions et ces concerts du paradis, et tout ce qu’il y aura dans le ciel de joie, de triomphe et de gloire quand nous vous verrons suivre l’agneau partout où il va.

Vierge d’un mérite incomparable, Vierge souverainement et perpétuellement virginale, la seule des Vierges qui ait été Mère, me voici arrivé à la fin de cette prière, de cette misérable supplication. Et je n’ai à vous demander qu’une seule chose au nom de votre Fils : c’est le souvenir perpétuel, le souvenir toujours présent de votre nom si suave. Que ce soit la nourriture très douce de mon âme. Que ce nom soit présent dans tous mes périls, dans toutes mes angoisses, et qu’il soit le principe de toutes mes joies. Si j’obtiens ce don de Dieu et de vous, je ne crains plus l’éternelle mort. Votre protection et votre grâce ne me quitteront plus jamais. Et quand bien même, je serais plongé au fond de l’enfer, vous m’y viendriez chercher, vous m’en arracheriez et me rendriez victorieusement à votre Fils qui m’a racheté et lavé de son sang, à ce Jésus-Christ, notre Seigneur, qui vit et règne éternellement Dieu avec le Père et le Saint-Esprit. Ainsi soit-il.

Antienne

Ã. Alma Redemptoris Mater quæ pervia caeli Porta manes, et stella maris succurre cadenti suggere qui curat populum, tu quæ genuisti, natura mirante, tuum sanctum Genitorem ; Virgo prius, tu posterius Gabrihelis ab ore sumens illud ave, peccatorum miserere.
Ã. Sainte Mère du Rédempteur, Porte du ciel toujours ouverte, Étoile de la mer, venez au secours de ceux qui chancellent, soyez leur soutien, vous qui prenez soin du peuple. Vous avez enfanté, devant la nature émerveillée, Celui qui vous a créée. Vierge avant, vous l’êtes encore après, en ayant reçu cet « ave » de la bouche de Gabriel : ayez pitié de nous, pécheurs.

Antienne grégorienne “Alma Redemptoris Mater”

Antienne Alma Redemptoris Mater

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