17 novembre — Sainte Gertrude la Grande

17 novembre — Sainte Gertrude la Grande

17 novembre — Sainte Gertrude la Grande

Le mot de Sainte Gertrude

Je ne demande à Jésus qu’une seule chose : que jamais ma volonté ne soit en désaccord avec la sienne.

Saints Bénédictins : Sainte Gertrude d’Helfta, Vierge

Nous sommes à Helfta, monastère fondé par les comtes de Mansfeld, non loin de Eisleben, qui doit être la patrie de Luther. L’abbaye compte parmi ses religieuses une jeune fille de vingt-cinq ans, qui est notre Gertrude. L’abbesse était Gertrude de Hackeborn, née en 1232, abbesse en 1251, morte en 1291. Notre sainte n’est donc pas et ne sera jamais l’abbesse de cette maison, comme une similitude de nom l’a fait croire à des critiques peu sagaces. Mais elle en est le charme et l’exemple, et, si nous osions prononcer ce mot en parlant de religieuses ferventes, elle en est l’orgueil : aucune ne sait comme elle saisir les enseignements de l’école du monastère, et elle a fait de rapides progrès dans l’étude des arts libéraux, telle qu’on la comprend à cette époque. N’oublions pas que la culture des lettres était en faveur dans les monastères allemands du moyen âge, et qu’elle était regardée comme une partie essentielle du patrimoine des deux Ordres bénédictins. Ajoutons aussi que Gertrude s’applique surtout à la lecture de la Sainte Écriture, qui n’était pas délaissée comme les protestants ont voulu le faire croire, et qu’elle ne néglige rien pour chanter l’office comme il convient. Il y a vingt ans qu’elle est au monastère; car elle y est entrée à l’âge de cinq ans (1261). Or, c’est en ce moment qu’elle est convertie (27 janvier 1281), d’une de ces conversions dont parlent les saints quand ils pleurent leur vie passée, et qu’ils chantent les miséricordes de Dieu. Souvenons-nous, pour nous en faire une idée, de la conversion de sainte Marie-Madeleine de Pazzi. Parmi les désordres dont Gertrude s’accusait plus tard, il faut noter un goût exagéré pour l’étude des lettres et des sciences.

Mais Jésus-Christ voulait devenir son seul maître, et il donna tant de charme et de puissance à ses exhortations, que la sainte en fut complètement transformée. Comme Marie, sœur de Marthe, elle oublia tout pour se mettre à ses pieds, et elle s’appliqua toute à l’écouter dans le silence des puissances de son âme et dans une entière docilité. L’action de la grâce s’affirma de plus en plus efficace. Elle produisit d’abord dans le cœur de la religieuse une sorte de trouble, qui lui inspira le dégoût de tout ce qui est terrestre. Puis elle lui fit voir que ce cœur n’était pas assez purifié pour être une demeure digne du céleste Époux. Elle la remplissait en même temps de courage et de confiance. Jésus-Christ lui disait : « Ton salut viendra bientôt  : pourquoi t’attrister à ce point? N’as-tu pas un conseiller, un ami, qui peut apaiser tes douleurs toujours renaissantes? » Et il ajoutait : « Je te sauverai et te délivrerai : ne crains rien… Avec mes ennemis, tu as léché la terre, sucé le miel adhérent aux épines. Reviens enfin à moi, et je te ferai bon accueil, et je t’enivrerai du torrent des joies divines. »

Gertrude répondit à cet appel, et, pour récompenser sa bonne volonté, le Maître voulut lui témoigner d’une manière sensible qu’il prenait possession de son cœur. Écoutons la voyante, quand elle nous raconte ce qui lui arriva à cette occasion : « Un jour, — c’était entre la Résurrection et l’Ascension, avant prime —, je m’assis près de l’étang, et je me mis à considérer la beauté de ce lieu. Il me plaisait à cause de la limpidité de l’eau courante, de la verdeur des ombrages, des oiseaux, et particulièrement des colombes, qui s’y ébattaient en toute liberté, mais surtout pour la profonde quiétude que je goûtais dans ce lieu retiré. Je me demandai ce que je voudrais ajouter aux charmes de cet endroit pour que mon bonheur fût parfait, et je souhaitai qu’il y eût quelqu’un pour s’entretenir avec moi dans cette solitude. Et vous, mon Dieu, qui savez procurer des joies inestimables, et qui, j’en ai la confiance, aviez dès le principe dirigé le cours de mes pensées, vous avez fait aussi aboutir vers vous la fin de cette méditation, en m’inspirant la réflexion suivante: si, à la manière d’un cours d’eau, je faisais retourner à vous, par une gratitude continuelle et appropriée, les grâces qui me sont venues de vous; si, croissant en vertus de même que les arbres grandissent, je m’ornais de bonnes œuvres comme ils se parent de feuillage; si, enfin, méprisant les choses terrestres, je volais comme une colombe vers les biens célestes, et si, imposant à mes sens corporels une rupture avec le tumulte des choses extérieures, j’occupais mon âme de vous seul, alors mon cœur deviendrait pour vous la plus délicieuse des demeures. » La sainte continue : « Tout le jour, j’eus l’esprit occupé de ces pensées. Le soir, avant de prendre mon repos, au moment où je venais de fléchir les genoux et de m’incliner pour faire ma prière, je me rappelai tout à coup ce passage de l’Évangile : « Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole, et mon Père l’aimera, et nous viendrons à lui, et nous ferons en lui notre demeure. »( Jean 4, 23). Et, au-dedans de moi-même, mon cœur de boue sentit d’une manière très intime votre arrivée en moi. Je voudrais mille et mille fois que la mer fût changée en sang, pour la faire passer sur ma tête, afin d’inonder cette sentine d’extrême misère que vous avez daigné choisir pour demeure, ô vous, qui êtes ce qu’il y a de plus parfait dans l’ineffable majesté ! Si, du moins, je pouvais avoir pendant une heure mon cœur entre les mains, pour le mettre en pièces, le purifier et en brûler toutes les scories, afin qu’il devienne pour vous une demeure, non pas digne, mais moins indigne de vous! »

Admirables accents! où l’amour le plus éprouvé est toujours accompagné de l’humilité la plus profonde et la plus sincère ! Nous les retrouvons, variés sans doute dans leur expression, mais au fond toujours les mêmes, dans les pages où Gertrude nous raconte les autres faveurs qu’elle reçut du Maître: quand, par exemple, il daigna imprimer ses plaies dans le cœur de sa docile épouse, ou quand il le transverbéra d’une blessure d’amour. Mais comment pourrions-nous rendre comme il faut ces récits admirables, pour lesquels le latin de Gertrude est lui-même insuffisant?

Nous ne pouvons toutefois résister au désir de traduire le passage où elle nous raconte un autre trait de la condescendance de Jésus-Christ à son égard : « C’était, nous dit-elle, en cette nuit sacrée où, grâce à la douceur apportée par la rosée de votre divinité, les cieux versèrent le miel. Mon âme, comme une toison exposée dans l’aire de la charité, essaya de se pénétrer de cette rosée par la méditation, et, par l’exercice de sa dévotion, elle essaya de remplir un office dans cet enfantement plus que céleste, par lequel la Vierge mit au monde son Fils, vrai Dieu et vrai homme, de même que l’astre émet son rayon. Il me sembla tout à coup que l’on me présentait et que je recevais dans un coin de mon cœur un tendre enfant, né à l’heure même, dans lequel était caché le don de la suprême perfection., un don vraiment excellent ! Pendant que mon âme le possédait en elle, il lui sembla qu’elle était tout à coup changée dans la même couleur que lui, si l’on peut appeler « couleur» ce qui n’est comparable à aucune espèce visible. Mon âme perçut encore une intelligence ineffable de ces paroles pleines de douceur: « Dieu sera tout en tous » (1 Cor 15, 28), alors qu’elle se sentait posséder son Bien-Aimé descendu dans son cœur, et qu’elle se réjouissait de l’heureuse présence d’un Époux si plein d’une suave douceur. C’est pourquoi elle buvait avec une insatiable avidité les paroles suivantes, qu’une main divine lui versait ainsi qu’un doux breuvage: « Comme je suis, dans ma divinité, la figure de la substance de Dieu le Père, ainsi tu seras l’image de ma substance du côté de l’humanité, en recevant dans ton âme déifiée des effluves de ma divinité, de même que l’air reçoit les rayons du soleil: pénétrée de ce principe unitif, tu seras disposée à une union plus intime avec moi. »

Par une faveur plus grande encore, elle fut marquée du sceau de la Sainte Trinité. Mais au lieu de nous arrêter à discuter la nature de ce miracle, nous aimons mieux parler de sa dévotion au Sacré Cœur. Elle avait reçu de Jésus-Christ saint Jean l’Évangéliste pour patron particulier. Or, un jour qu’elle avait reposé sur le cœur de Jésus-Christ, elle demanda à l’apôtre ; « N’avez-vous pas ressenti, vous aussi, le bien-aimé de Dieu, la douceur de ces très suaves pulsations, quand vous avez reposé pendant la Cène sur cette même poitrine, dont la douceur cause encore maintenant un tel bonheur à mon âme? » ll répondit : « Oui, je le confesse, j’ai senti et ressenti cette douceur: la suavité de ces pulsations pénétra jusqu’à l’intime de mon âme, de même que la liqueur la plus suave donne de la douceur à une miette de pain frais. De plus, elles ont enflammé mon cœur d’une manière puissante, de même qu’une chaudière bouillante est échauffée par l’ardeur excessive du feu. » Alors la sainte: « Et pourquoi, reprit-elle, avez-vous gardé là-dessus un silence si absolu, que vous n’en avez pas dit un seul mot qui le donnât à entendre pour notre progrès spirituel? » L’apôtre répondit: « Ma mission était autre. À l’Église récemment fondée, j’avais à faire connaître, sur le Verbe incréé de Dieu le Père, une seule parole, propre à satisfaire jusqu’à la fin du monde l’intelligence du genre humain tout entier, mais telle que personne ne peut la comprendre parfaitement. Mais la suave éloquence que possèdent ces pulsations a été réservée à notre temps, afin qu’à les entendre, le monde déjà vieux et tiède dans l’amour de Dieu se sente réchauffé. »

Il faudrait citer tout le livre; mais nous nous arrêterons ici. Aussi bien, ce que nous avons le plus admiré, ce ne sont pas ces dons extraordinaires dont nous venons de donner une faible idée, ni les miracles et les prophéties qui ont marqué la vie de Gertrude et montré le caractère divin de sa mission. C’est la théologie sublime qui apparaît dans tous ses écrits, et dont une synthèse suffisamment étudiée serait utile à bien des âmes. On a dit que sainte Gertrude était la théologienne du Sacré Cœur. Nous l’admettrons bien volontiers, pourvu que ce mot ne soit pas pris dans un sens trop exclusif: elle a parlé très souvent et très explicitement de ce divin Cœur, mais elle a traité aussi d’autres points très importants. Nous préférons dire que sainte Gertrude a enseigné d’une manière admirable la théologie de l’Incarnation.

Essayons de résumer sa doctrine : par là même nous caractériserons sa sainteté et sa direction spirituelle. Jésus-Christ est tout pour l’homme. La conséquence de ce principe, c’est que nous devons recourir à lui dans tous nos besoins, toutes nos détresses et toutes nos peines. Il est l’ami auquel nous devons nous confier, le refuge où nous devons nous retirer, le trésor où nous pouvons toujours puiser. Pour être conforme aux desseins de Dieu, notre vie sera toujours unie à la sienne, animée et vivifiée par elle. La sainte recourait à lui avec une entière confiance. Se sentait-elle insuffisamment préparée pour la communion, elle priait Jésus de suppléer à son indigence, et elle s’approchait sans crainte de la Sainte Table. Rien de ce qu’elle put lire n’eut assez de pouvoir pour lui faire omettre une seule de ses communions. Et, pour le dire en passant, nous ne saurions trop recommander ses écrits à ceux qui gardent au fond de leur cœur des objections contre la communion fréquente. Cette confiance apparaissait dans une foule de circonstances. Un jour qu’elle marchait dans un chemin escarpé, elle fit une chute dangereuse. Sa première pensée fut de s’écrier : « Quel bonheur pour moi, Seigneur bien-aimé, si cette chute avait précipité ma réunion avec vous ! » Les religieuses présentes, tout étonnées, lui demandèrent si elle ne craignait pas de mourir sans sacrements. « Je désire de tout mon cœur, reprit-elle, recevoir les sacrements de l’Église, si utiles à l’âme; mais je place au-dessus de toutes les préparations la providence et la volonté de mon Maître. Je suis certaine, quel que soit le genre de mort qui m’enlève de ce monde, de n’être pas privée de la miséricorde du Seigneur : seule elle peut me sauver, aussi bien dans une mort subite que dans une mort à laquelle je me serais longuement préparée. »

Par une conséquence naturelle et nécessaire, Gertrude sentait que pour répondre à tant d’amour et à des bienfaits si multiples, l’homme doit être tout à Dieu et ne rien se réserver. De là une pureté de cœur qui eut pour résultat non pas seulement de garder dans toute sa Splendeur le beau lis de sa virginité, non pas seulement de la préserver de tout péché volontaire, mais encore de la détacher de toute amitié naturelle, de toute propriété, de toute sollicitude inutile. Notre-Seigneur daigna témoigner un jour à sainte Mechtilde, la maîtresse de sainte Gertrude, combien il aimait dans la jeune religieuse ce désir de lui plaire en toutes choses: « Elle marche devant moi, disait-il, sans me perdre de vue un seul instant. Elle n’a qu’un désir: connaître le bon plaisir de mon cœur; et, dès qu’elle l’a appris, elle l’exécute avec un incroyable empressement. À peine a-t-elle accompli une de mes volontés qu’elle m’interroge pour en savoir une autre, et elle s’y conforme avec la même promptitude. Ainsi, toute sa vie est pour ma gloire.»

Est-il besoin d’ajouter que l’humilité de la sainte était profonde, comme nous avons eu déjà l’occasion de le dire en passant? L’âme qui a conscience de ce que Dieu est pour elle, échappe plus facilement aux tentations de l’orgueil. Elle voit les bienfaits dont elle est comblée, et elle se rend compte du mauvais usage qu’elle en fait : comment pourrait-elle être impressionnée par les séductions de l’amour-propre? L’admirable voyante disait avec une profonde conviction : « Le plus grand de vos miracles à mes yeux, Seigneur, c’est que la terre puisse porter une pécheresse aussi indigne que je le suis. » Longtemps elle balaya seule la maison, et elle aimait à rendre aux plus petits les services les plus répugnants. Mais, d’autre part, elle ne jugeait pas à propos de cacher les grâces dont elle était l’objet. Profondément convaincue que personne plus qu’elle n’en était indigne, elle estimait que c’étaient des semences qui passaient dans son âme pour aller fructifier sur de meilleures terres. C’était donc déshonorer les dons de Dieu que de les laisser enfouis dans la sentine de son cœur, et elle devait les tirer de ce cœur pour les déposer dans d’autres cœurs, plus dignes de les recevoir et plus propres à en user pour la gloire de Dieu. C’était par une pensée semblable qu’elle repoussait les tentations de vaine gloire. Elle se disait alors : « Si quelqu’un, en te voyant, cherche à imiter ce qui lui paraît bon, sans imiter ton orgueil, tout sera pour le mieux : ce sera autant de gagné pour Dieu. »

Mais ce que nous croyons devoir signaler comme un trait particulier de la piété de sainte Gertrude, c’est ce que le P. Faber appelle « la liberté d’esprit ». Voici ce que l’éminent Oratorien écrit à ce sujet : « Où règne la loi de Dieu, où souffle l’esprit du Christ, là est la liberté. Nul ne peut lire les écrivains spirituels de l’ancienne école de saint Benoît sans remarquer avec admiration la liberté d’esprit dont leur âme était pénétrée. Ce serait un grand bien pour nous que de posséder un plus grand nombre d’exemplaires et de traductions de leurs œuvres. Sainte Gertrude en est un bel exemple : elle respire partout l’esprit de saint Benoît. » Et plus loin : « Il est assez difficile de parler de liberté d’esprit sans avoir l’air de recommander la négligence, ou de soutenir l’inexactitude, la paresse et le caprice. Mais nous pouvons en toute sécurité développer ce sujet d’après sainte Gertrude elle-même. » Un trait nous montrera comment elle pratiquait cette liberté d’esprit. Une nuit, se sentant défaillir, elle mange une grappe de raisin dans l’intention de soulager dans sa personne le Seigneur lui-même. Celui-ci daigna accepter cette intention, et il lui dit : « Maintenant, je puise à ton cœur un délicieux breuvage. Il compense, par sa douceur, l’amertume du fiel et du vinaigre que, pour l’amour de toi, je laissai exprimer sur mes lèvres, quand j’étais attaché à la Croix. »

Nous voudrions continuer, et parler, par exemple, de cette charité de Gertrude qui se portait vers le soulagement de toutes les misères, aussi bien dans le purgatoire que sur la terre. La sainte est encore, tous le savent, une des âmes favorisées des révélations que l’on consulte avec le plus de fruit pour savoir comment soulager les âmes des défunts. Toutefois, nous ne voulons pas la quitter sans signaler sa tendre dévotion à Marie, et rappeler un trait qui nous montre comment cette dévotion était récompensée. Le jour de la Nativité de la sainte Vierge, Gertrude récitait le Salve Regina. Quand elle arriva à ces mots : « Illos tuos misericordes oculos ad nos converte », elle vit Marie tenant dans ses bras le divin Enfant. La Vierge toucha délicatement le menton de son Fils, et, dirigeant vers Gertrude et ses compagnes le visage et les yeux de Jésus : « Les voici, dit-elle, mes yeux très miséricordieux: ce sont les yeux de mon Fils, et je puis en tourner les regards vers tous ceux qui m’invoquent, pour le salut éternel et la sanctification des âmes. »

Insondables desseins de la Providence, nous nous étonnerions si nous ignorions que vous êtes voulus et dictés par l’infinie Sagesse! Quarante ans environ après la mort de sainte Gertrude survenue en 1302 ou 1303, le monastère de Helfta fut incendié, et le souvenir de la sainte ne put le défendre des horreurs de la guerre. Aujourd’hui, il ne reste plus de ce monastère que la petite chapelle où elle pria si souvent, et où elle fut favorisée bien des fois des apparitions de Notre-Seigneur : encore cette chapelle est-elle profanée, puisqu’elle sert de grenier à foin. Du moins, la sainte nous a laissé de sa sagesse et de sa piété deux monuments incomparables, que personne, il faut l’espérer, ne parviendra désormais à faire disparaître : le Héraut de l’amour divin et les Exercices spirituels. C’est devant ces livres que nous irons nous recueillir, comme dans un sanctuaire, pour écouter ce que Gertrude nous enseigne au nom du Maître qu’elle a choisi de préférence aux docteurs du siècle. À l’école de sainte Gertrude, nous rencontrerons sainte Thérèse, qui avait tant de dévotion pour elle, et aussi saint François de Sales, qui citait avec tendresse et avec bonheur les aspirations de la pieuse Bénédictine . Ceux qui ne la connaissent pas encore seront étonnés qu’une si admirable voyante ait pu leur demeurer jusqu’alors étrangère. Ils s’efforceront comme nous, sans aucun doute, de la signaler à l’admiration de leurs frères.

A. Lépître dans La Revue Universitaire, T. XXV, Lyon, 1897, pp. 228-236

Prières

Oratio

Deus, qui in corde beátæ Gertrudis Vírginis iucúndam tibi mansionem præparásti : ipsíus méritis et intercessióne ; cordis nostri máculas cleménter abstérge, et eiúsdem tríbue gaudére consórtio. Per Dóminum.

Oraison

Ô Dieu, qui vous êtes préparé une demeure agréable dans le cœur de la bienheureuse Vierge Gertrude, daignez, dans votre clémence, en égard à ses mérites et à son intercession, laver les taches qui souillent notre cœur et nous faire jouir de sa compagnie. Par Jésus-Christ, notre Seigneur.

Prière à Sainte Gertrude

​Grâces soient rendues au Seigneur Dieu, source de tous les vrais biens, par tout ce qui est renfermé dans l’étendue des cieux, les limites de la terre et les profondeurs de l’abîme. Que tous les êtres chantent en son honneur cette louange éternelle, immense, immuable, qui, procédant de l’Amour incréé, ne s’achève parfaitement qu’en Lui. Louanges pour la plénitude débordante de cette tendresse divine qui, dirigeant son cours impétueux vers la vallée de notre humaine fragilité, a jeté sur Gertrude, parmi toutes les autres, un regard de prédilection, à cause de ses propres dons par lesquels le Seigneur l’avait attirée à Lui.

Seigneur, je vous loue et vous rends grâces pour tous les bienfaits dont vous avez comblé votre servante Gertrude, je vous loue par cet amour qui vous a fait la choisir de toute éternité pour une grâce si spéciale, l’attirer à vous si suavement, l’unir à vous par une telle familiarité, trouver en elle vos complaisances et vos joies, enfin consommer si heureusement sa vie.

Je vous offre, Seigneur, cette prière de dévotion en union avec l’amour qui vous a fait descendre du ciel sur la terre et accomplir toute votre œuvre de la rédemption des hommes ; en union aussi avec l’amour qui vous fit endurer la mort, puis offrir celle-ci au Père avec tout le fruit de votre très sainte Humanité. Ainsi soit-il.

Prière de Sainte Gertrude pour offrir à Dieu nos actions

Père, je vous confie ceci en union avec les œuvres très parfaites du Seigneur votre Fils, afin que vous l’ordonniez au salut de l’univers, selon votre volonté toujours digne de louanges.

Prière de Sainte Gertrude à Marie pour réparer nos négligences

Je vous offre, ô Mère sans tache, en réparation pour toutes mes négligences, le Cœur très noble et très doux de Jésus-Christ. Seul, en effet, ô Marie, ce Cœur si glorieux et qui renferme en lui tous les biens, peut vous présenter la somme de tout ce qui existe de plus désirable, de tout ce que la dévotion de chaque homme et l’ardeur de ses prières peuvent témoigner d’honneur à votre divine maternité.

Prière de Sainte Gertrude avant de s’endormir

Par la suavité tranquille avec laquelle, de toute éternité, vous avez reposé dans le sein du Père ; par le séjour délicieux qui fut votre repos; durant neuf mois, dans le sein de la Vierge ; par la délectation très agréable que vous daignez savourer en certaines âmes que vous chérissez davantage, je vous supplie, ô Dieu de toute miséricorde, veuillez m’accorder, non pour ma commodité, mais à votre éternelle louange, ce repos de la nuit, afin que mes membres fatigués retrouvent le libre exercice de leurs forces.

Antienne

Ã. Rogemus omnes beatam Gertrudim et humiliter supplicemus ut fiat nobis in caelo coram excelso supplicatrix quae pro Christi amore suam castitatem reservavit in terris.

Ã. Prions tous la bienheureuse Gertrude, et supplions-la avec humilité : qu’elle devienne pour nous dans le Ciel une médiatrice auprès du Très-Haut, elle qui, pour l’amour du Christ, a gardé sa chasteté sur la terre.

Antienne grégorienne “Rogemus omnes"

Antienne Rogemus omnes

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10 novembre — Saint Vanne et Saint Hydulphe

10 novembre — Saint Vanne et Saint Hydulphe

10 novembre — Saint Vanne et Saint Hydulphe

Le mot du Vénérable Dom Didier de la Cour à ses moines

Si j’avais quelque pouvoir sur vous, je vous défendrais, sous peine d’excommunication, de dire du bien de moi après ma mort ; car j’ai mené une vie fort commune aux yeux des hommes et très misérable devant Dieu. Un peu de gravité et de retenue, voilà tout ce que je puis avoir de bon.

Les Saints Vanne et Hydulphe sont réunis en une seule et même fête dans la Congrégation bénédictine de France. Celle-ci a en effet été approuvée en 1833 par le Pape Grégoire XVI en tant qu’héritière des anciennes Congrégations bénédictines présentes en France avant la Révolution, dont la Congrégation des Saints Vanne et Hydulphe.

Saints Bénédictins : Saint Vanne, évêque de Verdun

Saint Vanne (en latin : Vitonus, Videnus ou Victo) qui avait embrassé de bonne heure la vie monastique, fut élevé sur le siège épiscopal de Verdun vers l’an 498. La haute opinion qu’on avait conçue de sa sainteté fut confirmée par plusieurs miracles qu’il opéra. Il travailla vingt-six ans avec un zèle infatigable à la sanctification de son troupeau. Il mourut le 9 novembre vers l’an 525, épuisé de fatigues et d’austérités.

D’après Alban Butler, Vies des Pères, des Martyrs et des autres principaux Saints.

Saints Bénédictins : Saint Hydulphe, chorévêque de Trèves et Abbé

Saint Hydulphe, issu d’une des plus illustres familles de Bavière, naquit à Ratisbonne vers l’an 612. Il renonça dès sa jeunesse aux espérances flatteuses qu’il pouvait avoir dans le monde, et se consacra au service de Dieu en embrassant l’état ecclésiastique. Son exemple fut suivi par Erard, son frère, qui devint depuis évêque régionnaire à Ratisbonne et dans la Bavière. Ce dernier est honoré comme saint le 8 janvier. Il mourut à Ratisbonne, suivant l’ancien martyrologe de Moyenmoutier. Ce furent Hydulphe et Erard qui tinrent sur les fonts baptismaux la fille d’Adalric, duc d’Alsace, laquelle était aveugle; ils lui donnèrent le nom d’Odile, parce qu’elle avait reçu la grâce de la vue avec celle du baptême.

Saint Hydulphe ayant été fait chorévêque de Trêves (espèce de coadjuteur de l’évêque du lieu, s’occupant des zones rurales du diocèse) remplit tous les devoirs d’un pasteur zélé et vigilant. Vers l’an 665, il introduisit la règle de Saint-Benoît dans le monastère de Saint-Maximin, qui avait été fondé dans le 4ème siècle, et où sans doute on suivait les observances des moines de l’Orient. Il en augmenta considérablement les revenus, et y établit une régularité si parfaite que cette maison devint l’admiration de ce siècle. Cette abbaye était une des plus célèbres de l’Allemagne.

Après une trentaine d’années, il se démet de sa charge et arrive dans la vallée vosgienne du Rabodeau vers 670. Il bâtit sa hutte à mi-chemin d’Étival et de Senones, dans la forêt. La renommée du nouvel ermite attire bientôt une foule de disciples. Hydulphe décide alors la construction d’un monastère sur le lieu, qui devient « medianum monasterium ». Premier abbé de Moyenmoutier, il adopte la règle de saint Benoît comme mode de vie de la nouvelle communauté. Il y avait plus d’un quart de siècle que Saint Hydulphe était à Moyenmoutier aux prises avec une œuvre de cette ampleur, lorsqu’il sentit faiblir ses forces. Il se démit de sa charge, afin de retrouver au soir de sa vie ce calme auquel il avait aspiré en venant ici comme ermite. Il confia donc la dignité abbatiale à Leutbald, un de ses meilleurs disciples, et prit modestement sa place au milieu de ses frères. Mais ce dernier mourut si prématurément en 704 que les moines s’en émurent, et tout désemparés se tournèrent vers leur fondateur. Le pauvre abbé, dans son ardente foi, vit un signe de la Providence qui lui demandait à nouveau le sacrifice de sa volonté propre. Avec un tranquille courage, il reprit donc sa crosse, mais pour peu de temps, car le Seigneur le rappelait à lui le 11 juillet 707, au terme d’une courte maladie. On l’inhuma dans la chapelle Saint-Grégoire, auprès de ses trois fils de prédilection, Spinule, Jean et Bénigne, qui l’y avaient précédé de peu.

D’après Alban Butler, Vies des Pères, des Martyrs et des autres principaux Saints.

La Congrégation bénédictine de Saint Vanne (Dom Stephanus Hilpisch, Histoire du monachisme bénédictin)

Pendant les guerres de religion du 16ème siècle, les monastères français avaient souffert de nombreuses destructions et ravages. Beaucoup d’abbayes avaient été saccagées ou entièrement détruites, la plupart appauvries et sans ressources. Quand un monastère avait encore du bien, ses revenus étaient donnés en commende par le roi ; et les abbés commendataires négligeaient l’intérêt du monastère à tous points de vue. C’est au milieu de ces circonstances que le projet d’une réforme naquit dans l’âme du Cardinal Charles de Lorraine. Outre son évêché de Metz, le Cardinal possédait en commende quatre grandes abbayes, et avait la légation de Lorraine et de Barrois. Il se décida à agir dans le ressort de sa légation. À la même époque l’évêque de Verdun, Éric de Vaudemont, qui tenait en commende l’abbaye de Saint-Vanne dans sa ville épiscopale, travaillait lui aussi à une réforme. Un bref de Grégoire XV donna au Cardinal pouvoir de réunir les abbés et prieurs de sa légation, et de discuter avec eux la question d’une réforme dans l’esprit du concile de Trente. L’assemblée, comptant seulement quatre abbés et quatre prieurs, eut lieu le 5 juin 1595 à Saint-Mihiel et décida l’érection d’une Congrégation. Mais le moment de s’exécuter, le Cardinal découragé fit au Pape Clément VIII (1592-1605) la singulière proposition de supprimer les monastères bénédictins de sa légation. Le Pape Clément refusa résolument, et avisa le cardinal qu’il était envoyé pour sauver les malades, non pour les étrangler. La seule pensée de la suppression était déjà un crime.

Le Cardinal appelle alors à l’aide l’abbaye Saint-Maximin de Trèves qui jouissait d’une bonne réputation. Il en reçu deux moines pour Saint-Vanne, et la moisson leva comme d’elle-même. Le prieur était Didier de la Cour, dépendant de l’évêque Éric de Verdun, abbé commendataire. En janvier 1600, sous l’inspiration du prieur, quatre novices et un profès se résolurent à une exacte observance de la règle : humble début. Mais dès 1601 Moyenmoutier recevait de Saint-Vanne des moines réformés, et les deux abbayes décidaient de se constituer en une Congrégation qui, en 1604, fut approuvée par Clément VIII sous le nom des Saint-Vanne et Hydulphe, patrons respectifs des deux abbayes. On adopta la formule de la Congrégation cassinienne. Un bref de Paul V recommanda en 1605 à tous les monastères de Lorraine de se rallier à la nouvelle réforme, et bientôt d’autres abbayes vinrent s’unir à la Congrégation. Jusqu’en 1670 celle-ci compris quarante-cinq abbayes dans les diocèses de Metz, Toul, Verdun, Bâle, Besançon (dont l’Abbaye Notre-Dame de Faverney, réformée en 1613), Châlons, Langres, Laon, Reims, Sens et Troyes, distribués en trois provinces. À la fin du 18ème siècle, elle comptait plus de 600 membres.

Au sommet de la Congrégation se tenait un président élu par le chapitre général pour un an. Le chapitre général était la plus haute autorité et se composait des supérieur de chaque maison et d’un délégué par convent. Comme la plupart des monastères étaient en commende, les supérieurs n’y avait que le titre de prieur, les autres étaient abbés à vie et élu par le convent. La Congrégation possédait sa maison d’études philosophiques et théologiques au Prieuré de Breuil (Commercy). Les études étaient florissantes. La Congrégation compta des noms célèbres qui méritent d’être cités auprès de ceux des mauristes : principalement Dom Calmet, grand exégète et historien de la Lorraine, abbé de Senones, l’un des premiers érudits de son temps ; puis Alliot et Petit-Didier, spécialisés dans l’étude de la Bible. Il fallut la Révolution pour supprimer la Congrégation.

La Congrégation Lorraine de Saint-Vanne exerça bientôt une influence salutaire sur les monastères français et trouva en France des appuis éminents, au premier rang desquels il faut placer le prieur du collège de Cluny à Paris, Laurent Bénard, et Dom Anselme Rolle de la Congrégation des Exemps. Le premier monastère français qui appela la réforme de Saint-Vanne fut l’abbaye de Saint-Augustin de Limoges. En 1614 Saint Germain-des-Prés demanda son agrégation. Bientôt suivirent Nouaillé près de Poitiers (1615), Saint-Faron de Meaux et Jumièges (1617). Ces abbayes entraient dans la congrégation Lorraine. Mais comme le gouvernement ne voyait pas d’un bon œil que les monastères du royaume s’unissent à une congrégation étrangère, il fut décidé au chapitre général de 1618 que les monastères français de l’Union se grouperaient en une congrégation spéciale. On compta pour débuter cinq monastères : Saint Augustin de Limoges, Saint-Julien de Nouaillé, Saint-Faron de Meaux, Jumièges, et les Blancs-Manteaux de Paris. Ce fut, à partir de 1618, la Congrégation « gallicana Parisiensis ». Dès 1621 la nouvelle fondation fut approuvée par Grégoire XV sous le nom de Congrégation de Saint-Maur.

Prières

Oratio

Omnípotens sempitérne Deus, qui per beátos pontífices Vitónum et Hydúlphum Ecclésiam tuam lætificásti, et órdinis monástici splendórem restituére dignátus es : fac nos opem eórum iúgiter experíri, et præmia cónsequi sempitérna. Per Dóminum.

Oraison

Dieu, tout-puissant et éternel qui par les bienheureux Pontifes Vanne et Hydulphe avez réjoui votre Église, et qui avez daigné restituer la splendeur de l’Ordre monastique : faites-nous ressentir continuellement les effets de leur aide et obtenir la récompense éternelle. Par Jésus-Christ, notre Seigneur.

Prière de Dom Claude Martin (1619-1696)

Ô Bonté infinie ! Que votre patience m’étonne et me confond ! Ô mon Dieu ! Elle m’étonne, parce que je vois que tous les hommes la fatiguent et que personne ne la soulage ; et elle me confond, parce que je lui suis à charge moi-même, par mes dérèglements, par mes infidélités, par mes péchés. Cet excès de bonté, ô mon Dieu, me porte à faire trois résolutions. La première, puisque tous les hommes exercent votre patience, de la soulager de tout mon possible, en menant avec le secours de votre grâce une vie toute pure, et – s’il est possible – toute angélique et toute céleste. La seconde, de me mettre entre Vous et les pécheurs, comme Abraham se mit entre vous et les villes impures de Sodome et de Gomorrhe, afin d’empêcher, par la prière et par le sacrifice, que leurs fautes ne montent jusqu’à vous et que votre colère ne descende jusqu’à eux. Et la troisième, de prendre votre patience pour la règle de la mienne, afin que, comme vous supportez mes fautes avec une douceur digne de votre infinie Bonté, je supporte aussi avec une parfaite soumission les peines et les privations que votre Providence m’envoie, et me fait ressentir dans le service que vous demandez de moi. Ainsi soit-il.

Antienne

Ã. Isti sunt duæ olívæ, et duo candelábra lucéntia ante Dóminum : habent potestátem cláudere cælum núbibus et aperíre portas eius, quia linguæ eórum claves cæli factæ sunt.

Ã. Ceux-ci sont deux oliviers et deux flambeaux qui brillent devant le Seigneur ; ils ont le pouvoir de fermer le ciel aux nuées, et d’ouvrir ses portes, parce que leurs langues sont devenues les clefs du ciel.

Antienne grégorienne “Isti sunt duae olivae”

Antienne Isti sunt duae olivae

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Il y a cent ans naissait notre cher Père Verrier (13 octobre 1922)

Il y a cent ans naissait notre cher Père Verrier (13 octobre 1922)

Il y a cent ans naissait notre cher Père Verrier (13 octobre 1922)

“Aujourd’hui soyons dans la joie, car le ciel s’ouvre et nous montre combien nous devons travailler à nous sanctifier, pour pouvoir un jour participer à ce bonheur du ciel. C’est là le but de cette vie : nous n’en avons pas d’autre ! Nous ne sommes pas ici pour jouir des plaisirs de la vie. Au contraire, nous sommes mis sur la terre pour pouvoir nous sanctifier, pour pouvoir un jour participer au bonheur du ciel.” (Père Verrier, Toussaint 2005)

“Être Pasteur, ce n’est pas seulement diriger et commander, c’est surtout protéger et se dévouer. C’est se faire tout à tous. C’est en un mot aimer ses brebis, car aimer c’est se donner. Oui, mes frères, vous m’êtes devenus tous chers. Tous sans distinction, riches ou pauvres, pratiquants ou non-pratiquants. Je ne veux pas que l’on puisse dire que je suis le curé d’une catégorie de personnes, mais au contraire je veux être le curé de tous, parce que tous vous m’avez été confiés par Dieu et par la Sainte Église. ” (Père Verrier, Sermon d’installation à Vallerois-le-Bois)

“Ne l’oublions jamais, nous ne sommes pas faits pour la terre, mais pour le ciel, c’est le but de la vie présente. C’est donc là que j’ai mission de vous conduire tous, par le Christ, pour le Christ.” (Père Verrier, Sermon d’installation à Montjustin)

“Nous assistons à la déchristianisation de nos paroisses, et cela est parfois cause d’une si grande souffrance morale, et même physique, que, si le Seigneur n’était pas là, on pourrait mourir de chagrin. Mais ce n’est pas en se laïcisant, en suivant l’esprit du monde que nous rechristianiserons nos paroisses mais en vivant le sacerdoce tel que le Christ l’a voulu.” (Père Verrier, Lettre à l’Archevêque de Besançon, 1969)

Les grandes lignes de la vie de notre cher Père Verrier

Pierre Verrier naît le 13 octobre 1922 à Vesoul. Il passe son enfance dans le cadre de la paroisse Saint-Georges entre les cérémonies solennelles et le service de Messe dans les diverses communautés religieuses de la ville ou pour son curé, Mgr Louis Saunier (1852-1937), qualifié lors de ses obsèques de « prêtre modèle » par Mgr Dubourg. C’est là que naît, dès le plus jeune âge, sa vocation sacerdotale. Après le cursus de Philosophie au séminaire de Faverney, il entre au Grand Séminaire de Besançon à l’automne 1945. Ordonné prêtre le 2 avril 1949 par Mgr Dubourg, il est nommé le 15 octobre suivant à l’aumônerie de l’Institution Notre-Dame du Mont à Franois (Doubs).

Après cette situation de transition, l’abbé Verrier est envoyé comme vicaire-économe à Vallerois-le-Bois (70) le 27 septembre 1950, paroisse dont il devient ensuite curé. Le 1er avril 1961 il est nommé curé d’Aboncourt-Gésincourt et vicaire économe de Fouchécourt, villages haut-saônois de respectivement 141 et 170 habitants à cette époque. Lors de la cérémonie de prise de possession, le Chanoine Chabod, archiprêtre de Vesoul, souligne « ses grandes qualités de prêtres : sa profonde piété, son amour ardent de Dieu et des âmes, son zèle pour ceux qui lui sont confiés ». Mais, après seulement trois années de ministère et suite à un contentieux avec un groupe d’Action catholique irrespectueux de sa juridiction, il est nommé le 25 mai 1964, à sa demande, à la cure de Monjustin, petite paroisse située non loin de Vallerois-le-Bois.

Dès les années 1965-1966, il s’inquiète de pratiques liturgiques nouvelles, souvent non-autorisées (comme la communion dans la main, ou l’utilisation de la langue vernaculaire), et d’un affaiblissement de la piété de nombreux prêtres qui délaissent la récitation du Bréviaire, ou encore, le culte des reliques des saints qu’ils relèguent dans les greniers. Il fait part de cette inquiétude au nouvel évêque, Mgr Lallier, qui prétend le comprendre mais ne prend aucune mesure. Quand arrive la nouvelle messe issue des commissions mises en place après le concile Vatican II (1962-1965), il refuse de se plier à cette réforme qu’il dénonce comme contraire à la tradition liturgique de l’Église et à l’esprit sacerdotal, suivant en cela le Bref examen critique du Novus Ordo Missæ présenté à Paul VI par les cardinaux Ottaviani et Bacci en 1969. Il reçoit alors des menaces de la part de certains membres de l’Action catholique soutenus par un vicaire général du diocèse, et finit par se retirer pour prendre du repos le 5 novembre 1970, sans toutefois donner sa démission comme curé de Montjustin.

Il s’établit alors à Vesoul où sa profonde connaissance de l’histoire locale et du patrimoine religieux lui permettent d’assumer une partie du secrétariat de la société d’agriculture, lettres, sciences et arts de la Haute-Saône (SALSA) et de la commission départementale des monuments historiques. En l’absence de ministère pastoral il fait de fréquents séjours à l’Abbaye Notre-Dame de Fontgombault (Indre) où il rencontre le chanoine Étienne Catta († 1974), professeur à la faculté de théologie d’Angers et fondateur de l’Opus Sacerdotale, association sacerdotale. En outre, il assiste les moines de Fontgombault dans certains ministères pastoraux dont ils devaient s’acquitter. C’est également dans cette abbaye qu’il fait la connaissance des scouts de Suresnes dont il devient l’aumônier jusqu’en 1974, date à laquelle il rejoint la Fraternité de la Transfiguration (Mérigny, Indre), fondée par l’abbé Lecareux en 1970, et dont l’apostolat échappait au contrôle de l’évêque de Bourges. Entre 1978 et 1980, suite à des problèmes de santé, il se retire à Saint-Michel-en-Brenne (Indre), à la maison-mère des religieuses de la Fraternité Saint-Pie X.

Revenu en Franche-Comté, il acquiert le 9 juillet 1982 l’ancienne ferme de l’abbaye de Faverney (70) située à quelque distance de ce village au lieu-dit Bethléem et y fonde le prieuré Notre-Dame de Bethléem, reprenant le vœu de Mgr Dubois, archevêque de Besançon, de voir renaître la vie bénédictine à Faverney. Oblat bénédictin de l’abbaye de Solesmes depuis 1966, sous le nom de frère Valbert-Marie, il situe sa fondation dans l’esprit de la Congrégation de France. À partir de 1983, il n’est plus répertorié dans l’annuaire diocésain de Besançon, alors même qu’il n’a jamais reçu de sanction canonique. Le 9 avril 1989, la nouvelle chapelle est bénite par Mgr Marcel Lefebvre († 1991). Mais les évêques que celui-ci a consacrés en 1988 tendent peu à peu à imposer une juridiction ecclésiale dont ils sont de fait dépourvus, et le Père Verrier prend ses distances vis-à-vis d’eux en 2002. Il adopte alors la Thèse de Cassiciacum connue par le moyen de la revue Sodalitium éditée par l’Institut Mater Boni Consilii, fondé en 1985 par d’anciens membres de la Fraternité Saint-Pie X. Par cette thèse théologique, Mgr Michel-Louis Guérard des Lauriers, O.P. († 1988), ancien enseignant à l’Université Pontificale du Latran et au Saulchoir en France, ne remet pas en cause l’élection des papes (papauté matérielle) depuis Paul VI, mais démontre que ceux-ci n’ont pas reçu du Christ l’Autorité pontificale (ne sont pas Papes formellement), pour la raison que, ne poursuivant pas le bien objectif de l’Église et enseignant l’erreur et l’hérésie, ils posent un obstacle à la réception de cette Autorité.

Après une vie bien remplie au service de Dieu et des âmes, notre cher Père Verrier rend son âme à Dieu le 7 juin 2011. Nous retenons son profond esprit de Foi, son amour de l’Église et du Saint-Siège, son admirable piété et son esprit liturgique, son extraordinaire dévotion envers la Très Sainte Vierge Marie, et les saintes reliques. Il était un Père bon, patient, miséricordieux, et ferme sur les principes, avec une connaissance profonde de la Règle de Saint Benoît et de sa spiritualité équilibrée.

5 mai — Dédicace de la Cathédrale de Besançon

5 mai — Dédicace de la Cathédrale de Besançon

5 mai — Dédicace de la Cathédrale de Besançon

Le mot du P. Garrigou-Lagrange

Dans les choses de ce monde, qui contiennent du bien et du mal intimement mêlés et sont pour cela très complexes, celui qui veut être simple, manque de pénétration, reste naïf, ingénu et superficiel.

Sermon

Sur la Dédicace de la Cathédrale de Besançon

Sur la Dédicace des églises (texte de Dom Gaspard Lefebvre)

De tous temps Dieu a voulu qu’on lui érigeât des autels et qu’on lui consacrât des endroits où le peuple se réunirait pour lui rendre le culte qui lui est dû (All.) et pour y recevoir plus abondamment ses grâces (Or.). Comme autrefois Salomon pour le temple de Jérusalem, l’Église s’est toujours plu à employer toutes les ressources du génie humain et toutes les richesses de la nature pour qu’elles fissent retour à Dieu dans la construction de sanctuaires dignes de Lui.

La cérémonie de la Dédicace du Temple de Jérusalem dura huit jours et les Juifs en renouvelaient solennellement la mémoire chaque année. L’Église consacre de même ses temples par une fête qui avait autrefois presque l’éclat de Pâques et de l’Epiphanie, et dont les rites se ramènent à trois chefs principaux : consécration de l’église, consécration de l’autel et translation des reliques. Par sa dédicace à Dieu, l’église est revêtue d’un caractère qui commande le respect et la confiance. C’est là en effet, comme chez Zachée, que Jésus descend (Évang.). L’église est « la maison de Dieu, la porte du ciel, on l’appelle le palais divin » (Intr.). Elle est « le tabernacle de Dieu parmi les hommes » (Ép.) et c’est là que s’établissent les relations officielles qui relient l’homme à son Créateur, car c’est là que se déroulent les cérémonies du culte liturgique prescrites par l’Église et par lesquelles on honore les trois personnes divines. « Soyez ici présent, dit l’Évêque au jour de la Consécration, ô Dieu éternel, un en nature et trois en personnes : Père, Fils, Esprit-Saint. » La pierre ferme sur laquelle est solidement bâtie la maison du Seigneur (All.), c’est l’autel où descend Jésus et qui est le centre où tout converge dans l’église. Le Christ est en effet la pierre d’angle de l’édifice spirituel dont le temple matériel n’est que l’emblème et qui est formé par la réunion de tous les chrétiens, « ces pierres vivantes taillées par le ciseau des épreuves et polies par le marteau des souffrances, pour devenir le temple divin où honneur et gloire sont rendus en tous lieux au Père, au Fils et au Saint-Esprit » (Hymne de Mat., Postc.). Et ce symbole est d’autant plus réel que, comme l’église et l’autel qui sont d’abord lavés, puis oints de l’huile sainte, et qui reçoivent Jésus-Hostie, chaque chrétien est lavé dans les eaux du Baptême, oint du chrême de la Confirmation et reçoit l’Eucharistie dans son cœur. Le temple matériel est enfin le symbole de la Jérusalem céleste où retentissent continuellement les chants d’allégresse des élus. Un jour en effet l’Église glorifiée entrera à tout jamais dans le vrai sanctuaire de Dieu qui est le ciel (Ép.).

Jésus s’invite chez Zachée (Lc 19, 1-10) : Commentaire de Dom Delatte

L’histoire de Zachée est propre à saint Luc. L’enseignement qu’elle contient nous sera révélé dans la conclusion de l’épisode : l’évangile est universel ; tout le monde peut devenir fils d’Abraham, moyennant une conversion sincère et la foi ; le Royaume des cieux n’est fermé ni aux riches, ni aux publicains, ni aux pécheurs. — Le Seigneur était entré dans Jéricho et traversait la ville. Et voici qu’un homme, nommé Zachée, cherchait à voir qui était Jésus. C’était un chef des publicains, de la corporation détestée. Les fonctionnaires qui prélevaient les impôts au nom de Rome étaient considérés comme des pécheurs publics, et leurs exactions achevaient de les rendre impopulaires. Zachée était riche : il reconnaîtra lui-même que sa gestion n’avait pas toujours été sans reproche; mais une curiosité éveillée par la grâce lui faisait désirer de voir le Seigneur. Il n’y parvenait point, car la foule était dense et lui de petite taille. Alors il devança le cortège, courut dans la direction que Jésus devait prendre, monta sur un sycomore, et attendit. Le Seigneur n’ignorait pas le dessein du publicain, puisqu’il l’avait intérieurement inspiré ; et, arrivé sous le sycomore, il leva les yeux et interpella Zachée par son nom : « Zachée, hâtez-vous de descendre, car aujourd’hui c’est dans votre maison que je dois demeurer. » Le Seigneur s’invite lui-même, familièrement ; il donne au publicain beaucoup plus que celui-ci n’avait espéré. Et Zachée, en hâte, descendit et le reçut chez lui, tout heureux.

Mais en constatant quel gîte s’était choisi le Seigneur, tous, c’est-à-dire la portion pharisienne de la cité, les nombreux prêtres de Jéricho, tous s’étonnent, murmurent, selon leur habitude, et se disent l’un à l’autre : «Il a pris son logement chez un pécheur! » Cependant la bonté du Seigneur fut justifiée par son fruit même. La conversion de Zachée, en effet, fut immédiate, et la seule présence de Jésus accomplit en un instant ce que toute la hauteur pharisienne eût été bien incapable d’obtenir. À l’entrée de sa maison, ou un peu plus tard, le chef des publicains, debout, dit au Seigneur sa résolution généreuse et bien arrêtée : « La moitié de mes biens. Seigneur, je la donne aux pauvres ; et si j’ai nui à quelqu’un, je lui restitue le quadruple. » Il parle comme si la chose était déjà faite. Et le Seigneur affirme qu’en cette heure même le salut a été accordé à la maison de Zachée, et qu’il est, lui aussi, un vrai fils d’Abraham. En dépit du mépris qu’affectait la Synagogue pour les collecteurs de l’impôt étranger, la grâce de Dieu a prévenu ce publicain. Car le Fils de l’homme est venu en ce monde à dessein de chercher et de sauver ce qui était perdu (Mt 25, 24 ; Lc 5, 32). En vérité, dira bientôt le Seigneur aux pharisiens, les publicains et les pécheresses vous précéderont dans le Royaume de Dieu (Mt 21, 31).

Saint Pie V (1504-1572) : extrait du Liber Sacramentorum du Cardinal Schuster O.S.B.

Le nom de Frère Michel Ghislieri — Pie V — orne le frontispice du Missel et du Bréviaire romains, parce que c’est sous son autorité que s’acheva la révision des livres liturgiques expressément réservée au Saint-Siège par le Concile de Trente. Outre ces mérites dans le domaine de la liturgie, saint Pie V a la gloire d’avoir été le Pape de la réforme que depuis deux siècles déjà, appelaient en vain les Pontifes ses prédécesseurs, les conciles, un grand nombre d’évêques et de saints de cette époque si complexe qu’on appelle communément la Renaissance.

Saint Pie V est donc le Pape de la réforme ecclésiastique ; non pas en ce sens qu’il fût le premier à la vouloir et à l’inaugurer, puisque, quand il monta sur le trône de saint Pierre, le Concile de Trente était déjà terminé depuis un certain temps. Mais il fut le Pape de la réforme en tant que, par son autorité et par son exemple, il mit définitivement la Curie romaine et l’épiscopat tout entier sur la voie de ce réveil salutaire de l’esprit ecclésiastique, que plusieurs de ses prédécesseurs, tout en le désirant dans leur cœur, n’avaient pas su soutenir, faute de courage et de constance.

On s’étonne que saint Pie V, de famille modeste, et pauvre religieux dominicain, ait pu s’élever si haut pour le bien de l’Église. Mais c’était un saint, et les instruments de sa puissance étaient la recherche de la seule gloire de Dieu et la prière assidue. Par celle-ci surtout il triompha de l’insolence des Turcs, et il sanctifia le peuple confié à ses soins.

Le saint Pontife sortit pour la dernière fois du Vatican le 21 avril 1572, huit jours avant sa mort, et ce fut une scène admirable.

Quoique malade, il voulut en ce jour visiter pour la dernière fois les sept basiliques principales de Rome, dans l’espérance, disait-il, d’en revoir sous peu les martyrs au ciel. De la basilique de Saint-Paul, il parcourut à pied presque tout le long et mauvais chemin qui conduit à Saint-Sébastien. Arrivé enfin, à bout de forces, à Saint-Jean, ses familiers le supplièrent de monter en litière, ou de remettre le reste du pèlerinage au lendemain. Il répondit en latin : Qui fecit totum, Ipse perficiat opus, et continua sa route.

Il arriva le soir seulement au Vatican, où, s’étant reposé quelque peu, il se fit lire les sept psaumes de la pénitence et le récit de la Passion du Seigneur, n’ayant même plus la force d’enlever son camauro quand il entendait prononcer le saint Nom de Jésus.

Le 28 avril, il essaya de célébrer la messe mais n’y parvint pas. Muni des sacrements, il rendit sa sainte âme à. Dieu le soir du 1er mai, et ses dernières paroles furent une invocation liturgique du Bréviaire :

Quæsumus, Auctor omnium,
In hoc Paschali gaudio,
Ab omni mortis impetu
Tuum defende populum.

« Daignez, Auteur de toutes choses, En cette joie de Pâques, contre tout retour de la mort, défendre votre peuple. »
Sixte-Quint transporta son corps dans une chapelle de Sainte-Marie-Majeure, où on le vénère encore aujourd’hui.

Prières

Oratio

Deus, qui nobis per síngulos annos huius sancti templi tui consecratiónis réparas diem, et sacris semper mystériis repæséntas incólumes : exáudi preces pópuli tui, et præsta ; ut, quisquis hoc templum benefícia petitúrus ingréditur, cuncta se impetrásse lætétur. Per Dóminum.

Oraison

Ô Dieu, qui renouvelez chaque année en notre faveur le jour où ce saint temple vous a été consacré, et qui nous conservez en état d’assister à vos saints mystères, exaucez les prières de votre peuple et accordez à quiconque entrera dans ce temple pour demander vos grâces, la joie de les avoir obtenues.

Oratio

Deus, qui, ad conteréndos Ecclésiæ tuæ hostes et ad divínum cultum reparándum, beátum Pium Pontíficem Máximum elígere dignátus es : fac nos ipsíus deféndi præsídiis et ita tuis inhærére obséquiis ; ut, ómnium hóstium superátis insídiis, perpétua pace lætémur. Per Dóminum nostrum.

Oraison

Ô Dieu, qui, afin d’écraser les ennemis de votre Église, et de réformer le culte divin, avez daigné choisir pour Pontife suprême le bienheureux Pie, faites que nous ressentions le secours de sa protection, et que nous nous attachions à votre service de telle sorte qu’après avoir triomphé de toutes les embûches de nos ennemis, nous goûtions les joies de l’éternelle paix.

Prière de Saint Bernard de Clairvaux (1090-1153) à la Très Sainte Vierge

Ô glorieuse Marie, qui pourra mesurer la longueur, la largeur, la hauteur, la profondeur de votre miséricordieuse bonté ? Sa longueur s’étend jusqu’aux derniers jours du monde, où vous exaucerez encore ceux qui vous invoqueront ; sa largeur enveloppe l’univers entier, et toute la terre est remplie de votre clémence ; sa hauteur s’élève jusque dans la céleste Jérusalem, dont elle a réparé les ruines ; sa profondeur est descendue jusqu’aux régions des ténèbres ; elle a porté la rédemption à ceux qui étaient assis à l’ombre de la mort. Ô Marie, par votre douce miséricorde, vous compatissez avec tendresse à nos misères, et par votre charité puissante, vous les soulagez avec efficacité. Ô Vierge bénie, faites-nous sentir la douceur de votre grâce ; obtenez, par vos saintes prières, aux pécheurs leur pardon, aux malades leur guérison, aux faibles le courage, aux affligés la consolation, à tous ceux qui sont dans le danger le secours et la délivrance. Que tous ceux, ô Vierge clémente, que tous ceux qui invoqueront avec confiance le nom si doux de Marie, reçoivent en récompense la grâce de Jésus-Christ, votre Fils et Notre Seigneur, qui est le Dieu béni sur toutes choses dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.

Prière de Pierre de Celle (1115-1187) à la Très Sainte Vierge

Attirez-moi sur vos pas, ô Vierge Marie, afin que je cours à l’odeur de vos parfums ; attirez-moi, retenu que je suis par le poids de mes péchés et par la malice de mes ennemis. De même que nul ne va à votre Fils si le Père ne l’attire, ainsi, j’ose le dire, en quelque manière, nul ne va à lui si vous ne l’attirez par vos saintes prières. C’est vous qui enseignez la véritable sagesse, c’est vous qui obtenez la grâce aux pécheurs parce que vous êtes leur avocate, c’est vous qui promettez la gloire à quiconque vous honore parce que vous êtes la trésorière des grâces. Ainsi soit-il.

Antienne

Ã. Zachǽe, festínans descénde ; quia hódie in domo tua opórtet me manére. At ille festínans descéndit, et excépit illum gaudens in domum suam. Hódie huic dómui salus a Deo facta est, allelúia.

Ã. Zachée, descends vite, car aujourd’hui, il faut que je demeure dans ta maison. Et lui descendit bien vite, et le reçut avec joie dans sa maison. Aujourd’hui le salut a été accordé par Dieu à cette maison, alleluia.

Antienne grégorienne “Zachæe”

Antienne Zachaee

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3 mai — Invention de la Sainte Croix

3 mai — Invention de la Sainte Croix

3 mai — Invention de la Sainte Croix

Le mot d’Aelred de Rievaulx

Médiateur entre Dieu et les hommes, Jésus, sur la Croix, est suspendu entre ciel et terre, trait d’union d’ici-bas et d’en-haut, pour joindre les réalités terrestres aux célestes.

L’Invention ou découverte de la Sainte Croix

Sainte Hélène, mère de l’empereur Constantin, avait une grande dévotion pour les lieux saints ; ce fut pour la satisfaire qu’elle passa dans la Palestine en 326, quoiqu’elle fut âgée de près de quatre-vingts ans. À son arrivée à Jérusalem, elle se sentit animée d’un désir ardent de trouver la croix sur laquelle Jésus-Christ avait souffert pour nos péchés, mais rien ne désignait où elle pouvait être. Les païens, en haine du Christianisme, avaient mis tout en œuvre pour dérober la connaissance du lieu où le corps du Sauveur avait été enseveli. Non contents d’y avoir amassé une grande quantité de pierres et de décombres, ils y avaient encore bâti un temple à Vénus, afin qu’il parût que les fidèles venaient honorer cette fausse divinité, lorsqu’ils allaient rendre leurs adorations à Jésus-Christ. Ils avaient aussi profané le lieu où s’était accompli le mystère de la Résurrection, en y élevant une statue de Jupiter, qui subsista depuis le règne d’Adrien jusqu’à celui de Constantin.

Hélène, résolue de ne rien épargner pour réussir dans son pieux dessein, consulta les habitants de Jérusalem, et tous ceux dont elle pouvait tirer quelques lumières. On lui répondit que si elle pouvait découvrir le sépulcre du Sauveur, elle ne manquerait pas de trouver les instruments de son supplice. En effet, c’était la coutume chez les Juifs de creuser une fosse auprès du lieu où le corps des personnes condamnées à mort était enterré, et d’y jeter tout ce qui avait servi à leur exécution; ces sortes de choses étaient devenues un objet d’horreur, et l’on se hâtait d’en dérober la vue pour toujours. La pieuse impératrice fit aussitôt démolir le temple et abattre la statue de Vénus, ainsi que celle de Jupiter. On nettoya la place, et on se mit à creuser. Enfin l’on trouva le saint sépulcre. Il y avait auprès trois croix, avec les clous qui avaient percé le corps du Sauveur, et le titre qui avait été attaché au haut de sa croix. Il fut aisé de connaître qu’une de ces croix était celle que l’on cherchait, et que les autres étaient celles des malfaiteurs au milieu desquels Jésus-Christ avait expiré. Mais on ne savait pas comment les distinguer, d’autant plus que le titre était séparé et ne tenait à aucune des trois. Saint Macaire, alors évêque de Jérusalem, fit porter les trois croix chez une dame de qualité, qui était à l’extrémité, puis s’étant adressé à Dieu par une prière fervente, il appliqua séparément les croix sur la malade, qui ne ressentit aucun effet des deux premières, mais qui se trouva parfaitement guérie dès qu’elle eut touché la troisième.

L’impératrice témoigna une grande joie à l’occasion du miracle qui faisait connaître la vraie croix. Elle fonda une église à l’endroit où ce précieux trésor avait été découvert, et l’y déposa avec une grande vénération, après l’avoir fait renfermer dans un étui d’un très grand prix.

Elle en donna une partie à l’empereur son fils, qui la reçut à Constantinople avec beaucoup de respect. Elle en envoya une autre partie à l’église qu’elle fonda à Rome, et qui est connue sous le nom de la Sainte Croix de Jérusalem. Elle fit présent à la même église du titre de la croix du Sauveur. On le mit sur le haut d’une arcade, où il fut trouvé en 1492 renfermé dans une boîte de plomb: l’inscription qui est en hébreu, en grec et en latin, est en lettres rouges et sur du bois blanchi. Les mots « Iesus » et « Iudæorum » sont effacés.

Sainte Hélène fit enfermer dans un étui d’argent la plus considérable portion de la croix, et la laissa à Jérusalem sous la garde du saint évêque Macaire, pour la conserver à la postérité. On la déposa dans la magnifique église que l’impératrice et son fils avaient fait bâtir. On accourait de toutes parts pour la vénérer.

La fête de l’Invention de la Sainte Croix est très ancienne. On la célèbre dans l’Église Latine depuis le cinquième ou le sixième siècle. Ce fut en 327 que sainte Hélène découvrit le bois sacré sur lequel s’était opéré le mystère de notre rédemption.

Pratique. En honorant la Croix, nous renouvelons le souvenir de la mort de Jésus-Christ. Nous professons que nous le regardons comme notre Rédempteur; nous nous excitons à espérer en ses mérites; nous allumons dans nos cœurs le feu sacré de l’amour divin.

Prière. Puisse, Seigneur, la vue de l’image de la croix de notre divin Sauveur crucifié pour nos péchés, nous pénétrer des sentiments de la plus vive reconnaissance, pour ce qu’il a daigné faire en notre faveur, et nous porter efficacement à pratiquer les vertus dont il nous a donné l’exemple, afin de mériter le bonheur de lui être réunis dans le ciel pendant l’éternité. Ainsi soit-il.

Alban Butler, Abrégé des vies des Pères, des Martyrs et autres principaux Saints

« Il fallait que le Fils de l’homme soit élevé sur la Croix » (Io 3, 14) : commentaire de Dom Delatte

Comme Nicodème l’avait reconnu, Jésus était venu de Dieu : mais il en venait mieux que les prophètes, à un titre infiniment supérieur. Il vit dans la pleine lumière ; il est lui-même la lumière. Qui est jamais allé puiser la vérité à sa source? qui est descendu de ce sanctuaire pour nous apporter la vie? Il n’en est qu’un seul au monde qui possède l’autorité absolue : c’est le Fils de l’homme, celui qui est descendu du ciel, qui y est remonté, qui y règne aujourd’hui. Il est le vrai docteur de l’humanité. Et il faut qu’il soit élevé sur le monde, montré au monde, vu de lui. Il faut que l’évangélisation porte son nom partout. S’il a été élevé en croix, c’est pour que sa croix même lui fût une chaire d’où il parlât au monde, pour le salut de ceux qui ont foi en lui. Les choses se passent comme jadis au désert (Nm 21, 6-9). Lorsque le peuple des murmurateurs fut atteint par la plaie des serpents de feu. Moïse fit dresser sur une croix un serpent d’airain : il suffisait de le regarder pour être guéri. Il en va de même dans l’économie nouvelle : tout homme qui lève les yeux avec foi vers le Seigneur crucifié, qui croit à la doctrine du Seigneur crucifié, échappera à la mort éternelle. L’efficacité de cette seconde naissance dont il a été parlé à Nicodème se puise au sacrifice du Calvaire. Tout homme, Juif ou gentil, qui croit « en lui », c’est-à-dire qui a foi, qui est baptisé et qui demeure en lui, possède la vie éternelle. On ne peut puiser la vie que là où elle est.

Prières

Oratio

Deus, qui in præclára salutíferæ Crucis Inventióne passiónis tuæ mirácula suscitásti : concéde ; ut, vitális ligni prétio, ætérnæ vitæ suffrágia consequámur : Qui vivis et regnas.

Oraison

Ô Dieu, qui lors de la glorieuse Découverte de la Croix, instrument de notre salut, avez renouvelé les miracles de votre passion : faites qu’au prix de cet arbre de vie, nous méritions d’obtenir la vie éternelle.

Prière de Thomas a Kempis (1380-1471)

Louange et gloire vous soient rendues à jamais, Seigneur Jésus, qui, pour un pécheur tel que moi, avez daigné descendre des cieux, et monter sur l’arbre de la Croix, afin de satisfaire à la divine justice pour mes péchés ! Là, dépouillé de vos vêtements, et couvert de blessures en tout votre corps, vous avez été suspendu entre deux larrons, comme le plus infâme voleur, vous le plus beau des enfants des hommes, vous le vrai Fils de Dieu, vous le Roi des rois et le Seigneur des anges ! Soyez environné de bénédictions, de splendeurs, d’actions de grâces, et de cantiques de louanges, ô Agneau de Dieu, modèle de douceur ! Car il n’y a pas d’honneurs que vous n’ayez mérités par votre Passion et votre Mort, et par les ignominies de toutes sortes que vous avez endurées sur la Croix. Recevez donc cet humble tribut de louanges, ces dévotes actions de grâces, ces adorations de mon esprit, ces pieux hommages de ma bouche, pour la souveraine charité, l’immense charité que vous m’avez témoignée en votre Passion. Oh ! Combien donc m’avez-vous estimé, pour me racheter à si haut prix ? Vous avez donné certes ce que vous aviez de plus précieux, car est-il rien de plus précieux que votre personne sacrée ? Et vous vous êtes livré tout entier pour moi ! C’est pourquoi, je vous en conjure, ô doux Jésus, source de bonté, de charité, ne permettez pas que j’en perde jamais le souvenir ; faites que l’image de votre corps attaché à la Croix brille sans cesse à mes yeux, et que chacune de vos cicatrices imprime profondément votre Amour en mon cœur. Ainsi soit-il.

Prière de Saint Ildefonse de Tolède (606-667) à la Très Sainte Vierge

Ô douce Vierge, Illuminatrice des cœurs, guérissez mon aveuglement, illuminez ma foi, fortifiez mon espérance, allumez en moi la charité. Comme l’aurore brillante, vous avez précédé la course du Soleil éternel, vous éclairez le monde de la lumière de la grâce, vous illustrez l’Église par l’éclat de vos vertus. Ô glorieuse Souveraine, vous êtes Celle dont parle l’Écriture en ces termes : Dieu dit : « que la lumière soit », et la lumière fut. Ô Lumière pure, Lumière ravissante, Lumière illuminant le ciel, éclairant le ciel, faisant trembler l’enfer ! Lumière ramenant les égarés, fortifiant ceux qui languissent, réjouissant les Anges et tous les saints de la Cour céleste ! Ô Lumière révélant les Mystères, découvrant les choses cachées, dissipant les ténèbres ! Faites-nous voir nos souillures ; relevez nos ruines, dissipez nos ténèbres, guérissez les malades, éclairez les pécheurs dans la voie de la pénitence. Ainsi soit-il.

Antiennes

Ã. O Crux splendídior cunctis astris, mundo célebris, homínibus multum amábilis, sánctior univérsis, quæ sola fuísti digna portáre taléntum mundi : dulce lignum, dulces clavos, dúlcia ferens póndera ; salva præséntem catérvam in tuis hódie láudibus congregátam, allelúia.

Ã. Ô Croix plus brillante que tous les astres, célèbre dans le monde, vraiment aimable aux hommes, plus sainte que toutes choses, seule tu as été digne de porter la rançon du monde : doux bois, doux clous, portant un doux fardeau ; sauve ce peuple assemblé aujourd’hui pour chanter tes louanges, alleluia.

Antienne grégorienne “O Crux splendidior”

Antienne O Crux splendidior

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